La recherche dans le monde, définition.
Chacun est naturellement persuadé que la recherche est partie intégrante du monde contemporain. Sans elle, aucune de ces nouveautés qui nous fascinent dans la vie quotidienne, comme dans les domaines mystérieux de l'espace, de la biologie, de la médecine...Avec un budget moyen de 2,5 % du P.I.B. - et un idéal de 3 %- les nations modernes font preuve d'efficacité tant en matière civile que militaire.
A l'aune du nombre de brevets déposés, de publications scientifiques ou selon les budgets, on estime que la recherche est également partagée entre les Américains du nord, les Européens, le reste du monde où le Japon compte pour un bon tiers à lui seul. Paradoxalement, les chercheurs ne parviennent pas à établir un système de comparaison rigoureux entre nations! Des difficultés surgissent entre les concepts de recherche fondamentale ou de recherche appliquée, entre les études et les charges de développement, ou bien entre le civil et le militaire. Le cas le plus typique est trouvé dans l'aéronautique (Boeing, Airbus) où l'on n'arrive pas à se mettre d'accord sur de sincères critères de concurrence. Il convient , conclut l'orateur, d'être "circonspect", "tout ceci appelle discussion et interprétation", et il faut un peu de prudence avant d'accuser les autres de recevoir des subventions d'Etat...
La recherche en Europe.
Depuis longtemps, la coopération est "intense et efficace" . Si les initiatives communes n'existent que depuis la fin de la dernière guerre, elles ont vu se rétablir un équilibre entre laboratoires européens et américains, alors que ces derniers avaient bénéficié dès les années trente, d'un "exode massif des cerveaux". Certes, l'émigration scientifique, liée aux données géopolitiques, a toujours été un phénomène assez actif. Aujourd'hui, une certaine stabilité, n'excluant pas d'importants échanges, est la règle. Après la guerre, la recherche s'est reconstituée à partir des grandes entreprises et de grands organismes étatiques. Pour fixer des priorités, on est parti d'une liste de problèmes établie par les plus grands savants de l'époque ( Perrin en France, par ex). En tête de liste, le calcul numérique fut paradoxalement un échec du fait de l'ignorance des industriels. Par contre, la curiosité de l'atome était grande (bombe atomique oblige...) et il est apparu judicieux de comprendre "la structure ultime de la matière". Le CERN fut créé à Genève avec l'appui des Américains et une vaste expérimentation commune fut entreprise (tunnel d'accélération des particules). La biologie était le troisième sujet de recherche mais son implantation reste dispersée : les savants ne s'unissent que si la nécessité se fait sentir. C'était le cas du CERN, non de la biologie liée à de petits laboratoires. Tout récemment, le CERN a pris un essor énorme que les Américains ont tenté de concurrencer sans succès au Texas, en raison du coût énorme des installations nécessaires (plus de dix fois le coût de Genève déjà implanté). Venus à résipiscence, les Européens les accueillirent à Genève avec un "ticket d'entrée" de 500.000 dollars payés en supra conducteurs excédentaires. Ce fut une "très bonne nouvelle" conclut l'orateur, louant la qualité des chercheurs US dans les techniques du froid et des aimants. Pour la première fois, le flux des chercheurs s'était inversé au profit de l'Europe.
La politique de la France. Le partenariat.
Sans chercher l'exhaustivité, le conférencier donne quelques exemples. En dehors de la recherche au sein du CERN la France - et singulièrement avec le Président de Gaulle - a manifesté une ambition qui s'est révélée profitable. Lors de la guerre froide, elle a réussi à s'immiscer entre les deux Grands un peu par hasard. Avec les Russes s'est engagée une étude sur l'ionosphère (mission VEGA : Vénus + Comète de Haley) sur la planète Vénus, les Français ont imaginé de s'y rendre en ballon dont ils construisirent les nacelles, les Russes utilisant leurs lanceurs. De leur côté, les Américains, en pleine tension politico-militaire, fournirent les radars-émetteurs témoignant qu'à travers leurs savants, les nations savent coopérer pacifiquement.
L'aventure d'Ariane est mieux connue et suivie avec intérêt par le grand public. On sait moins quels en furent les difficiles débuts. Alors que les Allemands craignaient de s'opposer aux Américains dans les années 60/70, ils acceptèrent de construire deux satellites de communication (Symphonie) très performants avec les Français, mais après l'échec du lanceur Europa, ils suggérèrent de demander un lanceur américain au lieu de persister dans le projet Europa. Les Américains qui n'acceptaient que le facteur recherche et non le facteur commercial dans ces satellites, démontrèrent leur refus d'une autonomie européenne en refusant. Les Allemands se rallièrent alors à Ariane (2/3 français) pour la partie laboratoire en escomptant un contrat important (Spacelab) en Amérique, qu'ils n'eurent pas...
Ces péripéties montrent la nécessité d'une politique européenne même si les participations externes parfois aléatoires sont toujours bienvenues.
Le conférencier conclut sur des notes d'espoir, sur l'impact positif de la recherche scientifique au niveau mondial, à laquelle le Japon et l'Inde se joignent désormais avec éclat. Eureka, qu'Hubert Curien a lancé avec l'appui du Président Mitterand et avec Et.Davignon, le programme Esprit, sont des instruments essentiels de la recherche européenne dans laquelle la France est active. On compte ainsi une dizaine de programmes qui se poursuivent avec succès. L'abandon de la navette spatiale Hermès prévue sur Ariane V n'a pas de conséquence. On peut en effet réaliser l'apesanteur en laboratoire et atteindre des températures de l'ordre de : 10 -18 degrés, où les atomes parfaitement froids ne bougent plus...
Malgré des succès spectaculaires, les chercheurs sont inquiets de la réduction de leurs crédits : le reflux des armes est malheureusement aussi celui des moyens de la recherche. Notes d'Henri Douard.
Lettre d'Alerte Aux Réalités Internationales d'avril 1998
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