Ce colloque vient dans la continuité du déjeuner-débat organisé en 1998 avec Evelyne Sullerot (18 mars, l'étrange liaison entre les taux de chômage élevés et une natalité basse) et de la conférence de Béatrice Majnoni d'Intignano (6 juin, une Europe sans jeunesse) au cours desquels les mêmes questions avaient été déjà évoquées : les économistes et démographes René Valette, Gérard Calot et Edouard Rochas ont exposé au colloque de Lyon le 5 février la situation de la France, de l'Europe, et du monde, la géographe Brigitte Prost a tenté d'analyser les déséquilibres territoriaux et les migrations réelles ou potentielles.
Ces exposés ont été suivis de témoignages confessionnels ou culturels (un pasteur prostant : Guy Bottinelli, un chef d'entreprise, Michel Rebatel, un syndicaliste, Jacques Leblanc, CGT). Les conclusions ont été tirées par Bernard Husson, Directeur du centre international d'études pour le développement local.
Je voudrais ici esquisser, à grands traits, une synthèse en cinq points.
1. L'inquiétude a changé de nature. On a un peu moins peur du nombre des immigrants, mais on a maintenant peur du vieillissement dû à l'allongement de l'espérance de vie et surtout à la baisse de la natalité. Regarder le nombre des décès donne une vision du passé. Regarder le nombre des naissances offre une perspective de l'avenir. Le sud vit en même temps le passage à la modernité et le retournement démographique qui a déjà été vécu dans le nord avec ses problèmes : la mortalité infantile; l'éducation des filles, la promotion de la femme, la mise en place d'une protection sociale. Dans les pays très pauvres, la natalité se maintient, dans les pays qui ont amorcé leur développement, la natalité reste élevée, mais commence à baisser. La population mondiale pourrait se stabiliser autour de 9 milliards d'habitants en 2050, quelles seront les parts de la France et de l'Europe sur ce total? Question majeure !2. La démographie devient une science plus exacteLes indicateurs sont maintenant fiables (même si nous n'avons pas encore suffisamment de certitudes); trois facteurs permettent de déterminer l'avenir d'une population : l'indicateur de fécondité, l'âge de la femme au moment de la procréation, le solde des migrations.
L'histoire des populations se présente comme suit : au niveau mondial au terme d'une longue période de lutte pour l'existence caractérisée par une population peu nombreuse, une extraordinaire et très rapide croissance comportant une phase d'accélération suivie d'une décélération accompagnée d'une détérioration de la pyramide des âges, détérioration qui devrait avoir des conséquences catastrophiques.
On ne veut plus vivre au pays.
Le besoin d'une analyse démographique régionalisée accompagnée d'une étude des migrations (proches ou lointaines) se fait sentir, en d'autres termes, la prise en compte d'une dimension spatiale est nécessaire. On ne s'enracine plus on cherche à s'implanter ailleurs. La demande des pays d'accueil (des personnes qualifiées)
est à comparer à l'offre des pays émetteurs (du personnel peu qualifié), il est peu probable qu'il y ait adéquation. La qualité de l'intégration a une importance grandissante.
4. Interactions entre la politique et la démographie ?
C'est un grave sujet de préoccupations : ces interactions, nulles dans un sens, sont considérables dans l'autre : on déplore le manque d'intérêt quasi total des politiques pour la démographie, alors que les évolutions démographiques ont une influence énorme sur la vie politique. Au delà des problèmes financiers évidents mal résolus (allocations familiales, fiscalité ne défavorisant pas trop les familles), il y a de très nombreux problèmes spécifiques (scolarité, logement)
5. Les questions politico-éthiques sont multiples. Vivre ensemble, cela se décline de deux façons : vivre en couple, et vivre en société, la démographie problème de couple, est aussi un important problème pour l'État qui ne peut se désintéresser de l'avenir, ce qui fonde la légitimité de son intervention, mais on peut aller plus loin et soutenir qu'il y a un véritable devoir de l'État de s'occuper des enfants et des générations futures auxquelles il conviendrait de léguer un patrimoine enrichi par rapport à celui dont nous avons hérité. On peut aussi discuter de la légitimité des moyens mis en ouvre pour accélérer ou pour décélérer : la prime au troisième enfant ne choque pas, l'avortement obligatoire comme en Chine pose problème.
En conclusion : il y a bien un gravissime problème de baisse de la natalité en France et aussi en Europe ce problème ne pouvant pas être dissocié du problème mondial : La France ni même l'Europe ne sont pas isolées, leurs problèmes démographiques s'analysent aussi par rapport ceux du reste du monde.
Notes de Jacques Bourdillon
Ce qu'est la transition démographique
Selon des rythmes divers, tous les pays du monde finissent par traverser trois étapes : celle de la démographie naturelle avec des taux élevés de natalité et de mortalité, celle de la démographie de transition avec une explosion du nombre d'habitants due à la conjonction de la baisse de la mortalité sous l'effet de l'hygiène et des soins modernes de santé sans que le taux de natalité ne baisse en proportion à cause de la lenteur d 'adaptation des comportements, celle de la démographie de pays moderne et développé avec de faibles taux à la fois de la mortalité et de la natalité.
L'explosion démographique n'aura pas lieu
Depuis le début des années 1990, les experts de l'ONU révisent à la baisse leurs estimations antérieures (12 milliards en 2050) de l'évolution de la population mondiale. Cette relative décrue n'empêche pas la population mondiale de croître, passant de 6 milliards en 1999 à près de 9 milliards en 2050.
Voir aussi, le très riche numéro Futuribles, hors-série, janvier 1999 : « L'an 2000, et après.... ».Regards sans frontières mars 1999
Hugues PUEL, Economie et Humanisme
Démographie et développement : pour des visions d'avenir *L'école française de démographie a mis à jour l'hypothèse de la transition démographique, mouvement qui touche tous les pays du monde, à des rythmes divers. L'Afrique sub-saharienne elle-même entre dans cette évolution. Et les organismes internationaux de réviser à la baisse leurs prévisions de population mondiale pour le XXIème siècle. L'humanité serait ainsi capable de maîtriser collectivement sa démographie.Mais les transformations sont inachevées et de graves déséquilibres de développement affectent la vie de cette planète où selon le dernier rapport du PNUD sur les quatre milliards d'habitants du Tiers monde, les trois cinquièmes n'ont pas les structures sanitaires de base. Un tiers n'a pas d'accès à l'eau potable. Un quart ne dispose pas d'un logement correct. Un cinquième des enfants quitte l'école avant cinq ans de scolarité. Un cinquième des habitants du Tiers monde souffre d'insuffisance en calories et en protéines. Continuent à se poser de graves questions de solidarité internationale, comme celui de l'endettement excessif des pays du Sud.
En Europe, le nouvel équilibre démographique n'est pas si assuré que cela, car les taux de natalité tendent à descendre à des niveaux qui ne permettent plus de renouveler sa population. Cela soulève, entre autres, des questions de vision d'avenir, d'accueil de migrants et de financement des retraites. Une juste politique familiale devrait aider à redresser cette situation. Encore faut-il que la prise de conscience se fasse, que l'idée de politique démographique soit acceptée et que des dispositifs législatifs et fiscaux adaptés soient mis en place.
* Hugues Puel a ouvert les travaux de notre colloque de Lyon sur " Les réalités démographiques d'aujourd'hui ".
COMPLEMENTS:
Population 6 milliards d' hommes Migrations
Geographie economique et humaine sur Internet; GLOBAL-MONDIAL
TABLE DES PAYS EN DEVELOPPEMENT; Concepts du développement
|