8 OPINIONS
- LES OPINIONS EXPRIMEES : le sens et la motivation.
1°) Rôle des opinions exprimées
Pour l'observateur du risque politique, l'opinion est intéressante à connaître dans la mesure où elle est susceptible de déboucher sur des actes qu'elle annonce directement : vote, greve, agression armée etc...
Les gens de marketing (commerçants ou politiciens) y recherchent aussi l'expression des besoins à satisfaire et susceptibles d'être cristallisés par un vendeur charismatique.
2°) Nature des opinions exprimées
Dans les pays qui attribuent un rôle reconnu à l'opinion publique dans la vie politique (démocratie) ou économique (libre marché), l'enquête d'opinion et surtout le sondage par échantillons, occupe une place sans doute excessive au regard de sa fiabilité douteuse; mais tant d'intérêts s'y attachent...
D'autres techniques indirectes permettent de prendre la température du grand public:
- entretiens dirigés ou non (conversations de bistro, "dîners en ville", coulisses des congres politiques chers aux policiers des Renseignements généraux
- correspondance personnelle, lettres à la presse
- consommations "culturellement significatives": objets, images (graffiti et dazibao, film), musique et chansons qui traduisent une attitude (les opéras de Verdi dans la Lombardie autrichienne du Risorgimento? le rock dans la contestation contemporaine?)
Plus directement décisives sont les opinions qui s'expriment en forme de choix directs ou d'actions visant à influer sur les choix:
- les élections
- les manifestations pour faire pression sur les décideurs: greves, défilés, campagnes de signatures
- les actes de violence revendiqués et justifiés : émeutes, terrorisme, guerilla
Egalement chargés de sens sur des risques possibles:
- les divers actes juridiques de la vie politique, et notamment "l'agenda" des questions traitées par rapport aux questions oubliées ou cachées;
- les déclarations gouvernementales effectuées dans un cadre formel (au parlement, dans une négociation diplomatique, dans une conférence de presse officielle, dans des colloques d'étude sur les grands problemes...).
- les programmes politiques exposés généralement en période électorale ont une certaine valeur indicative, moins parce qu'ils représentent la pensée réelle des candidats décideurs, mais parce qu'ils créent un cadre d'engagements qui peut être contraignant.
- les écrits politiques des "leaders d'opinion" conscients de l'être : grands éditorialistes, "intellectuels" engagés...
Bien que ou parce qu'elles sont proches de l'action, ces manifestations d'opinion doivent être considérées avec prudence quant à leur motivation et aux circonstances. Est-on en présence d'une opinion ou d'une action? d'une attitude ou d'une tactique?
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3°) Authenticité des opinions exprimées?
La multiplication des sondages sur la cote de personnalités, véritables plébiscites permanents, le poids des budgets publicitaires dans la vie civique, tout conduit à suspecter la fiabilité des résultats d'enquêtes d'opinion publique. Même dans l'hypothese optimiste d'une conduite rigoureuse des enquêtes, on peut s'interroger sur l'authenticité des opinions exprimées.
L'opinion exprimée à la va-vite pour se débarrasser d'un enquêteur payé à la tâche, les cris poussés dans une manifestation de rue, les discours de banquets électoraux, les poses avantageuses prises devant un public complaisant, représentent-ils vraiment le fond de la pensée, si pensée il y a, c'est à dire ce qui structure la vision du monde et ordonne les comportements
Une premiere question à se poser concerne le mode de traitement intellectuel (pour ne pas dire cognitif) de l'information reçue et sa transformation en opinion stable et confirmée.
Comment est vérifiée l'information? le citoyen ou le décideur censément rationnel, le professionnel de la vérité (chercheur, journaliste ou magistrat) a-t-il vraiment l'intention le temps et les moyens de tester l'information qui fonde sa conduite? la recherche de la preuve dans les sources et de la rigueur dans l'évaluation est-elle la chose du monde la mieux partagée?
La parcelle d'opinion induite par le fait nouveau est-elle constamment confrontée aux autres opinions de l'individu et à ses explications du monde. Quelle est la cohérence du systeme d'opinions qui en résulte? peut-on en déduire des familles d'attitudes attribuables à telle catégorie sociale (par exemple les ouvriers ou les ruraux ou à telle catégorie d'individus regroupés par styles de vie?( )
Quelle en est aussi la continuité dans le temps? quelle en sera la fiabilité dans l'avenir au regard de circonstances éventuellement difficiles, marquées par la violence ou par l'incertitude?( )
Et, de maniere plus générale, quel est le rôle des opinions dans la genese des comportements politiques? Profondément vécue à l'intérieur de soi ou exprimée devant un public, l'opinion est-elle un guide pour l'action ou un ensemble de rêves confortables pour se mettre en harmonie avec une image souhaitée?
L'information contribue à la formation des opinions mais n'explique pas tout : les faits ne parlent pas par eux-mêmes, ils doivent être interprétés (pas de "news" sans "views").
Les interprétations non plus ne parlent pas par elles-mêmes. En la confrontant aux faits, on peut à la rigueur démonter une théorie mais pas en prouver la validité.
Enfin les interprétations paraissent s'appuyer sur des visions profondément ancrées en chaque humain et parfois des visions différentes selon les circonstances. La vision est à la fois un ensemble de concepts décrivant la société, une image de cette société, un ensemble de valeurs qui déterminent les jugements sur l'actualité et sur l'avenir.
L'une de ces visions (Adam Smith, Burke, Hobbes, l'école réaliste des Relations internationales) se fonde sur un pessimisme envers la nature humaine, le progres, la justice : elle privilégie la prudence, l'expérience, la modération des procédures politiques et judiciaires, le contrat limité pour l'équilibre des intérêts.
L'autre vision (Rousseau, Condorcet, Thomas Paine, les socialismes utopiques) croit à la vertu, à la raison, au progres.
De ces attitudes fondamentales découlent des jugements différents sur les situations, sur les buts et valeurs, sur les méthodes de l'action politique (et donc sur le risque).
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