Surprises ! Le terme d'anglicanisme ne date que de la fin du 19ème siècle ; il est aujourd'hui surtout utilisé hors de l'Angleterre. Les Anglais, eux, se disent simplement membres de l'Eglise d'Angleterre. La constitution de cette Eglise résulte des influences croisées, calvinistes et catholicisantes, c'est la "voie médiane".
Impossible de comprendre l'anglicanisme sans faire appel à l'Histoire. L'histoire de l'Eglise d'Angleterre ne remonte pas à Henri VIII et à la décision de ce Roi de rompre avec Rome. Avant lui, le christianisme était implanté de longue date dans le nord, dès le troisième siècle et l'archevêque actuel de Canterbury est le 102° successeur de Saint Augustin. Après Henri VIII, d'autres monarques ont renoué avec Rome, fugitivement.
Les démêlés entre l'Eglise d'Angleterre et l'Eglise catholique romaine accompagnent l'histoire du royaume, dès les 14è et 15è siècles (avec John Wyclif, entre autres) et s'étalent sur 130 ans. Certes, 1533 avec la rupture entre Henri VIII et Rome marque une date clé. Rome avait refusé d'annuler son mariage avec Catherine d'Aragon, union stérile, à un moment où l'Espagne de Charles Quint et l'Angleterre sont en guerre. Henri VIII fait prononcer son divorce par l'Eglise d'Angleterre et épouse Anne Boleyn dont il espère un héritier.
En 1534 le roi se déclare "seul chef suprême de l'Eglise d'Angleterre", qui devient ainsi Eglise d'Etat ("Acte de suprématie"). Ce schisme n'entraîne pas de changement théologique. Henri VIII confisque les biens des monastères (pour financer ses guerres) redécoupe les diocèses pour les rééquilibrer et fait publier (1539) la "Grande Bible" en anglais à usage liturgique. Son succésseur Edouard VI poursuit le processus réformateur, introduit l'anglais pour la lecture de l'épître et l'évangile à la grand messe. Les protestants calvinistes du continent exilés en Angleterre influence le cours des choses. Le "Livre des prières communes" en anglais, synthèse de la liturgie anglicane est publié en 1549. Il s'agit toujours de liturgie et pas théologie.
Bloody Mary
Marie Tudor succède (1553), pour cinq ans à Edouard VI. Avec elle, l'Eglise d'Angleterre revient au catholicisme romain (mariage des prêtes interdits), ses persécutions brutales ("Bloody Mary") ne réussissent pas à abroger les acquis de la Réforme. Lui succède une fille d'Henri VIII, Elisabeth 1er, qui, bien que plutôt catholique sympathise avec les Réformés et se contente du titre, laïc, de "Gouverneur" de l'Eglise d'Angleterre.
Avec Jacques 1er, déjà roi d'Ecosse, devenant aussi roi d'Angleterre (1603), c'est la naissance du Royaume-Uni. Mais l'Ecosse est calviniste (influence française) sans évêque donc. L'épiscopat imposé alors par l'Eglise d'Angleterre n'a jamais été accepté par l'Eglise presbytérienne d'Ecosse. N'y figure aujourd'hui qu'une petite Eglise anglicane. Charles 1er arrive (1625) : marié à
une catholique, il est complaisant avec le rituel catholique. Seule, cependant l'Eglise d'Angleterre a droit de cité, les autres sont persécutées... Les protestants (dits "puritains", pour leur rigueur) font décapiter Charles 1er et l'archevêque de Canterbury. C'est la guerre civile. Avec Charles II (1660) c'est le retour de l'Eglise d'Angleterre et des évêques. Les protestants s'inclinent où émigrent dans le Nouveau Monde, les catholiques se cachent. Son successeur Jacques II, catholique romain est partisan d'une seule Eglise...
Il faudra attendre 1829 pour que l'égalité civile et religieuse soit établie entre les anglicans et les autres religions. Jusqu'au milieu du 19ème siècle il étair nécessaire d'être anglican pour avoir une fonction administrative ou d'enseignement en Angleterre. Des évêques (29) siègent toujours à la Chambre des Lords.
A la fin du 19è siècle, on assiste à plusieurs réveils religieux : le "réveil évangélique" et le "mouvement d'Oxford" avec divers courants, la "High Church", rigoriste et la "Low Church" plus populaire.
Influence
Se pose alors la question : la religion anglicane doit-elle être exportée ? doit-on essayer de convertir l'autre ? En fait le mouvement missionnaire anglican s'est limité aux seuls pays où les Anglais étaient en force : Amérique, Inde, Australie, Afrique...et dans un premier temps les expatriés sont restés membres du diocèse de Londres.
Avec l'indépendance des pays, sont apparues les Eglises anglicanes locales, indépendantes et autonomes. C'est l'absence de centralisme du pouvoir qui caractérise la communion anglicane, une autorité dispersée, une liberté difficile à gérer ( conférence de tous les évêques seulement tous les dix ans).
Personne ne peut parler au nom de l'Eglise anglicane, c'est la communion qui réunit les différentes Eglises. L'Ecriture, la tradition, le credo, le témoignage des saints et l'expérience permanente du Saint-Esprit se combinent, interagissent, s'équilibrent et se contrôlent.
Peu de différences sur le plan théologique avec l'Eglise catholique romaine en ce qui concerne les sacrements du baptême et de l'eucharistie. La réconciliation des pénitents est offerte à tous ceux qui le désirent. Quant aux ministères ordonnés, l'Eglise est divisée sur l'ordination des femmes au sacerdoce.
L'Eglise d'Angleterre est très engagée dans l'oecuménisme : création d'une commission mixte en 1964 devenue permanente en 1970 avec l'Eglise catholique romaine.
Les relations avec l'Eglise orthodoxe sont bonnes mais les différences de culture sont marquées, de même avec l'islam (conception de la religion enracinée dans un Etat).Notes de Jacques Braconnier
La Lettre d'Alerte aux réalités internationales de janvier 1998
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