L'Europe présente une extrême variété de régime. En général, a exposé M. E. Reynaud, on trouve :
1. Un régime de base, où l'Etat joue un rôle prépondérant.
2. Un dispositif complémentaire, avec des acteurs du domaine professionnel (employeurs, organisations patronales et syndicales, et de patronales et syndicales, et de plus en plus les salariés eux-mêmes).
Les choix, historiques, correspondent à des données sociales, économiques, politiques, culturelles. Ils impliquent des retours en arriere difficiles et permettent plutôt des adaptations. Il existe trois grands modes de financement (avec combinaison possible des trois ) :
1. La gestion interne à l'entreprise.
2. La question externe, par une institution autonome spécifique (ce qu'on nomme "fonds de pension" à l'étranger).
3. Les contrats d'assurance passés avec une compagnie d'assurance.
Il faut ajouter à ces modes principaux les retraites individuelles (exemple : les "personal pensions" britanniques). L'Allemagne offre une image tres typée de la gestion interne (provision au bilan de l'entreprise et le Royaume-Uni de la gestion externe.
Les caractéristiques générales
Elles sont les suivantes pour les deux pays :
1. L'initiative vient des employeur, la retraite étant pour eux un instrument de politique du personnel, utile pour l'attirer, le fidéliser, se séparer de salariés. L'Etat intervient de façon majeure (fiscalité, réglementation).
2. Les dispositifs sont construits à partir des caractéristiques du régime de base dont ils constituent un complément. Au Royaume-Uni, le régime de base est une pension forfaitaire minimale, en Allemagne, une pension proportionnelle au salaire. La pension complémentaire représente une part moins importante de la pension globale en Allemagne qu'au Royaume-Uni. Dans les deux pays, l'employeur s'engage à payer une prestation déterminée à l'avance par les regles du régime (au Royaume-Uni, ce dispositif à prestations définies permet de mieux comprendre le comportement des employeurs et des fonds de pension sur les marchés financiers). La population couverte dans le secteur privé par un régime d'entreprise est de pres de 40% au Royaume-Uni et en Allemagne, de 46% pour l'ex-Allemagne fédérale. Il s'agit surtout d'hommes, de personnes travaillant à plein temps, de salariés des grandes entreprises de l'industrie et des services financiers, globalement, de cadres et de salariés parmi les plus qualifiés.
3. Sur le long terme (le dispositif a été mis en place dans les années 50-60), le nombre des affiliés stagne et aurait même tendance à baisser.
Le financement
Dans les deux pays, les régimes à prestations définies priment (91% des salariés affiliés au Royaume-Uni, 90 % en Allemagne).
Allemagne. Plusieurs modalités existent : caisses de pension, caisses de secours, contrats d'assurance. Mais, surtout, prévaut la logique des provisions au bilan, qui est la plus originale (logique appliquée aussi en Autriche, Luxembourg et Japon).
Le principe général est l'engagement de l'employeur à verser des prestations dont le montant est établi à partir de calculs prévus par les regles du régime, et qui seront tirées des ressources courantes de l'entreprise le moment venu. Cet engagement donne lieu à un provisionnement au bilan de l'entreprise, qui n'entre qu'au passif et uniquement sous forme d'écriture comptable. La defiscalisation de cette provision permet à l'entreprise de dégager des ressources qui sont soit réinvesties, soit investies sur le marché des capitaux. Ces provisions ont été largement utilisées pour l'autofinancement des grands groupes (un quart des ressources propres pour Bayer et Siemens, par exemple). Leur montant global s'est élevé, fin 1992, à 250 milliards de Dmarks (850 milliards de francs).
Un mécanisme important, instauré en 1974, est la mutualisation obligatoire : l'entreprise est tenue d'adhérer à un organisme de garantie des pensions (le P.S.V.). Celui-ci intervient en cas de faillite ou d'insolvabilité et ne couvre que les engagements dits "préservés" (correspondant à une ancienneté de 10 ans dans les employeurs et à un âge minimal de 35 ans). Ce P.S.V. est géré par les employeurs et l'organisation professionnelle des compagnies constatés, est tres faible (0,23% des engagements en 1994, 0,1% en 1995). Le paiement des prestations est gagé sur la rentabilité future de l'entreprise : en cas de déficience de celle-ci, l'ensemble des employeurs concernés se substitue à elle à travers l'organisme de garantie. Dans ce systeme, il n'y as pas de possibilité de cotisation salariale.
Royaume-Uni. Il s'agit, pour les britanniques, de fonds de pension autonomes, la gestion étant assurée par un organisme indépendant de l'entreprise. Les versements réguliers qui y sont effectués sont investis sur les marchés financiers.
Le fond est alimenté par les cotisations salariales, que l'employeur complete en fonction de l'évolution des rendements des capitaux sur les marchés financiers. (Les fonds ont été surcapitalisés jusqu'à ces derniers temps, parce que les marchés financiers étaient favorables dans les années 80 et sur, par suite de restructurations et de licenciements, de nombreux salariés ont quitté ces régimes en perdant leurs droits, peu préservés et non indexés). Si le rendement des capitaux ne permet pas de garantir les pensions, il limite leur coût, d'où des stratégies agressives d'investissement des fonds de pension sur les marchés financiers: les actions représentent environ 80% des actifs des fonds de pension (cette proportion pourrait baisser à l'avenir) et ceux-ci détiennent un tiers de la Bourse de Londres. Les fonds de pension représentaient, fin 1991, 344 milliards de Livres (environ 3.000 milliards de francs), hors opérations des compagnie d'assurance (env. 15%). Il s constituent le gage du paiement des pensions. En cas de déficience, celui-ci ne dépend que de la volonté et de la capacité de l'employeur à faire face à ses engagements ; il n'y a ni systeme de garantie, ni critere de solvabilité minimale. Une loi est en discussion au Parlement (à la suite de l'affaire Maxwell) : un fonds de garantie sera probablement créé pour faire face aux cas de vols ou de détournement de fonds, une représentation des salariés à hauteur d'un tiers pourrait être introduite, de même qu'un critere de solvabilité minimale.
La conclusion de M. Reynaud porte sur les enseignements à tirer pour la France, de ces exemples allemand et britannique. Elle figure avec l'ensemble documenté , plus actuel que jamais, des seize contributions à cette journée, dans un compte-rendu disponible à ARI
COMPLEMENTS
<Allemagne> <Royaume Uni> Retraites et Tiers Monde
- L'épargne salariale au coeur du contrat social Jean-Pierre BALLIGAND, parlementaire en mission et Jean-Baptiste de FOUCAULD, inspecteur général des finances Remis à Lionel JOSPIN en janvier 2000. Se procurer le rapport.
- L'Avenir des systèmes de retraite - Avis du Conseil économique et social. Réné TEULADE Remis en janvier 2000. Se procurer le rapport.