Une naissance et un parcours difficiles
Le 14 septembre 1960, les cinq pays principaux producteurs de pétrole (Arabie Saoudite, Iran, Irak, Koweit et Venezuela) fondent à Bagdad ce qui allait devenir la plus puissante des organisations jamais créées par des pays en voie de développement : l'OPEP. Parmi les fondateurs, deux noms méritent d'être retenus : Juan Pablo Pérez Alfonzo, vénézuelien et Abdallah Tariki, saoudien. La motivation première était de s'unir pour riposter aux baisses des prix du pétrole décidees par les compagnies pétrolières. Ils sont progressivement rejoints par le Qatar en 1961, l'Indonésie et la Libye en 1963, Abou Dhabi et l'Algérie en 1967, le Nigeria en 1971 puis l'Equateur et le Gabon en 1973 - mais ces deux derniers pays se retireront respectivement en 1992 et ne 1996. L'association compte aujourd'hui onze membres et son siège est basé à Vienne, en Autriche.
L'histoire de l'OPEP reste cependant mouvementée.
En juillet 1965, suite à une première tentative de création d'un cartel pour peser sur les prix du brut, l'OPEP fixe des taux d'augmentation maxima de la production des Etats membres mais ces quotas ne sont pas respectés.
En janvier 1968, suite à la guerre des six jours israélo-arabe, l'association arrache aux compagnies occidentales un accord sur l'élimination des rabais sur les prix de vente. A la fin de cette décennie, le baril vaut 1,80 dollars.
Lors de la 22ème conférence de l'organisation en février 1971, les compagnies pétrolières seront contraintes de renoncer aux traditionnels contrats bilatéraux. Un " accord d'ensemble " est signé relevant sensiblement les prix et les taxes, et établissant un programme des prix pour six ans.
En octobre 1972, l'OPEP, qui comptabilise deux tiers des exportations mondiales de brut, contre 40 % aujourd'hui, déclenche le processus des nationalisations. Les pays producteurs pourront progressivement acquérir une participation de 51 % dans leurs gisements.
Le premier choc pétrolier arrive en octobre 1973. En peine guerre israélo-arabe, une entente historique intervient entre l'Iran et l'Arabie Saoudite, qui se mettent d'accord sur la fixation des prix, et sont suivis par les autres pays membres de l'OPEP. Ceci sans consulter personne de l'extérieur. Un embargo est décrété par les producteurs arabes contre les pays jugés pro-israéliens, comme les Etats-Unis et les Pays-Bas tandis que la France et la Grande-Bretagne sont épargnées. En décembre 1973, c'est l'explosion des prix qui passent à 11,65 dollars le baril et qui quintupleront en décembre 1974. Le premier choc pétrolier a permis aux pays consommateurs de prendre conscience de leur faiblesse et d'admettre la nécessité de s'allier face à l'OPEP.
C'est dans cet esprit qu'est créée, le 18 novembre 1974, l'Agence Internationale de l'Energie (AIE). Les royalties et les taxes perçues par les pays producteurs augmentent en septembre 1974. En 1975, se déroule le premier sommet de l'OPEP à Alger. En décembre de la même année, le terroriste Carlos prend en otage onze ministres au siège de l'organisation où trois personnes sont tuées.
En 1979, c'est le second choc pétrolier. La révolution islamique en Iran et l'arrêt des exportations irakiennes font flamber le baril. L'Arabie Saoudite tente de freiner la hausse mais aucun prix de référence ne peut être établi. Les augmentations interviennent en ordre dispersé jusqu'en 1980, années où certaines cargaisons de brut s'échangent à plus de 40 dollars le baril.
La même année, en septembre, la guerre Iran-Irak provoque des hausses variables selon les pays. Un plafond maximal de production est fixé pour la première fois par l'OPEP en mars 1982, mais il ne sera pas respecté. En octobre 1984, les quotas se réduisent pour une nouvelle fois et quatre pays non membres - Egypte, Mexique, Malaisie, Brunei - acceptent de coopérer avec l'association. En janvier 1985, les prix baissent. Il n'y a plus de tarifs officiels et l'unité est rompue. La première rencontre, réunissant l'OPEP et les pays producteurs non membres (Angola, Chine, Colombie, Egypte, Malaisie, Mexique, Oman), a lieu en avril 1988, mais aucun accord de sera déterminé.
Puis, se déclenche la guerre du Golfe d'août 1990 à février 1991. Un embargo commercial est décidé par l'ONU contre l'Irak en août 1990, qui instaure le programme " pétrole contre nourriture ". Ce système permet à ce pays de vendre un peu de brut pour acheter, sous strict contrôle de l'ONU, des vivres, des médicaments et des biens de première nécessité. L'Irak est donc exclu des plafonds de production de l'organisation. Ce qui pose un problème aujourd'hui. En effet, ce pays, qui possède les secondes réserves de pétrole brut les plus importantes du monde après l'Arabie Saoudite et qui ne peut rien exporter, pourrait, grâce à sa production, détendre le marché si les restrictions étaient levées.
En novembre 1997, l'OPEP se réunit à Djakarta et relève sa production de 10 % en ne comptant pas compte de la crise asiatique, ce qui provoque l'effondrement des cours de 40 %. Elle décide, en mars 1999, de réduire la production de 1,7 million de barils par jour (b/j) afin de faire remonter les prix du brut.
En mars 2000, la production augmente pour stabiliser les cours, qui ont triplé en quelques mois. L'Iran, ne s'associant pas à cet accord, augmente sa production de son côté.
Réélu fin juillet à la tête du Venezuela, Hugo Chavez a inauguré son mandat par une tournée des pays de l'OPEP, dont le moment fort a été sa visite en Irak, très contestée par les Etats-Unis.
Suite à la montée récente des prix du baril, qui provoque un mécontentement mondial, l'OPEP a décidé, lors d'une conférence ministérielle tenue à Vienne le 10 septembre dernier, d'augmenter sa production, actuellement de 25,4 millions de b/j, de 800 000 b/j dès le 1er octobre.
Mais quoi qu'il en soit, l'OPEP tient à garder son indépendance face aux Etats-Unis et ne veut pas céder à la pression des pays industrialisés qui cherchent à faire baisser le prix du baril de pétrole. Comme le souligne l'OPEP, qui ne s'estime pas la seule responsable de la flambée des prix, " les pays industrialisés doivent baisser leurs taxes à leur niveau national ". Alors que les Etats-Unis viennent de décider de puiser dans leurs réserves stratégiques 30 millions de barils sur une période de 30 jours. Pour les Etats-Unis, les réserves stratégiques représentent 570 millions de barils de brut (soit un mois de consommation américaine), ce qui vient de faire légèrement baisser les cours du brut. l'Union européenne, quant à elle, ne peut pas intervenir dans son ensemble car les réserves sont propres à chaque pays membre. Pourtant le marché est proche de l'équilibre. La capacité mondiale de production est estimée à 81 millions de b/j face à une demande située, pour le quatrième trimestre 2000, à 78,5 millions.
Une réunion avec pour mots d'ordre : cohésion politique et unité
Quarante ans après sa création, l'OPEP se réunit, pour la seconde fois, du 27 au 28 septembre à Caracas, au Venezuela, en plein crise pétrolière internationale. Les dirigeants des onze pays de l'Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole doivent adopter une déclaration définissant leurs objectifs et priorités communes. Etaient également présents lors de cette rencontre, en tant que pays non-membres mais producteurs et en qualité d'observateurs, la Norvège, le Mexique, Oman, la Russie et l'Angola. Chakib Khelil, ministre algérien du Pétrole, tient à préciser que désormais " Nous voulons, en organisant des sommets tous les cinq ans, donner le signal qu'au plus haut niveau politique, nous voulons la stabilité du marché ".
Mais l'heure est au dialogue. Tous les membres de l'OPEP sont unanimes : une rencontre est nécessaire avec les pays consommateurs. Et une date de rencontre entre ministres de l'Energie a été déterminée : le 17 novembre à Ryad (Arabie Saoudite). Ali Rodriguez, président de l'OPEP a tenu à déclarer que " la nécessaire stabilisation du marché ne dépend pas exclusivement de l'OPEP, elle requiert le concours des pays consommateurs, sans oublier le rôle important que jouent les grandes compagnies internationales ". (Rappel : les principales compagnies pétrolières mondiales sont : l'américain Exxon Mobil, l'anglo-américain BP, l'anglo-néerlandais Royal Dutch-Shell, le franco-belge TotalFinaElf et l'américain Chevron).
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