Synonymes: http://elsap1.unicaen.fr/ accès, acuité, alarme, anémie, angoisse, attaque, atteinte, bouffée, bouillon, cataclysme, chômage, chute, colère, convulsion, danger, débâcle, dépression, détresse, difficulté, ébranlement, élan, faillite, flambée, incertitude, krach, maladie, malaise, manque, marasme, misère, paroxysme, pénurie, péril, péripétie, perturbation, poussée, quinte, récession, redoublement, rupture, soubresaut, stagnation, tension, transe, transport, trouble.
Aucun facteur isolé n'a de force assez déterminante pour susciter une crise grave de l'environnement économique ou politique. Mais plusieurs facteurs peuvent entrer en conjonction pour créer une situation dangereuse difficile à maîtriser comme l'implosion de l'Union Soviétique, la guerre civile larvée en Algérie, la crise financiere et sociale aux Etats-Unis, le chômage en Europe.
Surtout la combinaison accidentelle des circonstances constitue un environnement propice à des stratégies d'acteurs conscients et habiles, capables de transformer la conjoncture en évenement de rupture et en dommage pour autrui.
Les facteurs de changement peuvent tres bien ne pas entrer en jeu, parce qu'ils n'ont pas la force nécessaire, parce qu'ils se diluent ou se dévient, parce qu'ils sont submergés ou contrés.... Le pire comme le meilleur n'est jamais sûr : fort heureusement, tous les rêves d'acteurs ne se réalisent pas.
En outre le changement peut se réaliser sans tension ou avec des tensions modérées, celles qui résultent par exemple de la négociation paisible entre acteurs. Les "problemes" sont le lot commun des êtres vivants : la vie courante se charge de résoudre ou de faire oublier les problemes qu'elle pose.
Enfin les tensions sont dans leur grande majorité résorbées par la faculté d'adaptation de tout organisme qui peut parfois évoluer sans modifier profondément son identité. Le grain de blé absorbé par un poulet produit du poulet et non pas du blé.
Pour que l'évènement transforme la tension en risque sérieux, il y faut une gravité exceptionnelle des enjeux et des circonstances particulières, celles de la crise. Il y faut fréquemment aussi un perturbateur par qui le scandale arrive.
A- L'INTERFERENCE DES NIVEAUX DE RISQUE:
Il est malheureusement facile d'imaginer les interactions possibles entre les trois grands domaines du risque: l'économie, le social et la politique et de construire une matrice potentielle de leurs impacts croisés.
Matrice qui se complique à l'infini des dimensions propres à chacun des domaines. Pour la société : population, groupes, modes de vie, opinions etc..; pour l'économie : les grands équilibres et les politiques spécifiques; pour la politique les différents domaines d'application...
Les experts ou le bon sens peuvent suggérer une estimation des connexions significatives qui caractérisent le risque politique en un lieu donné, à un moment donné.
Les philosophies politiques ne manquent pas non plus d'imagination dans ce domaine. Une conception courante fait précéder l'économie, et plus particulierement la technique, sur tout mouvement social, ce que traduit l'historien Ernest LABROUSSE : "Sur l'économique retarde le social, et sur le social le mental".
On peut tout aussi bien adopter un déterminisme totalement inverse : la guerre, le pouvoir, les messies (Jésus ou Mahomet) se moquant bien des cycles économiques et se chargeant de donner un sens et des objectifs à l'activité de production.
On peut enfin privilégier les phénomenes sociaux, tels que les mouvements démographiques ou les valeurs et comportements.
L'interférence des niveaux est en tout cas fréquente créant ainsi la complication et l'incertitude, donc le risque.
Depuis la fin de la Guerre Froide, ce qui tient lieu de contenu idéologique du modele mondial repose sur quatre notions essentielles : paix, démocratie, croissance, libéralisme économique. Il semble implicitement acquis que ces notions se soutiennent ou sont même interdépendantes.
Cela est-il ? cela devrait-il être ? Bonnes questions, mais quelles réponses ?
1°) Le libéralisme économique est-il le moteur de l'histoire?
La these : le libéralisme économique, celui de Smith et Ricardo, est un puissant instrument de progres puisqu'il met en oeuvre toutes les capacités de chaque individu. Il est en plus une valeur de référence, puisque l'épanouissement de l'individu est l'objectif suprême de toute société terrestre.
a) Le libéralisme favorise-t-il le progres économique?
1) Oui:
En économie interne,l'économie de marché semble prévaloir sur l'économie dirigée. En économie internationale, l'ouverture aux mouvements des marchandises, services, hommes et capitaux a bien accompagné la croissance depuis 40 ans.
2) Pas nécessairement:
Les économistes se demandent encore si le libéralisme , notamment dans les échanges, précede et suscite la croissance ou si, au contraire, il en profite. On connaît plusieurs expériences de croissance non libérale : l'Allemagne nazie, les économies de guerre, le New Deal de Roosevelt, les économies mixtes de l'Apres-guerre (la France par exemple ne se serait pas relevée sans la nationalisation de l'énergie et des grandes infrastructures)
Il peut exister aussi un libéralisme sans croissance : dans les pays tres développés où la croissance semble aujourd'hui saturée (pour raisons démographiques ? à cause de la part excessive faite aux consommations privées par rapport aux besoins collectifs?)
On n'est pas tres sûr de la cause exacte de la croissance:
* s'agit-il du libéralisme en tant que doctrine d'organisation politique de la production et des échanges?
* du capitalisme, systeme de concentration des capitaux au profit des entreprises et des états?
* de l'application de la science et de la technologie aux phénomenes économiques ?
* de la pression publicitaire exercée en faveur de la société de consommation, notamment à l'Est, au Sud... et à l'Ouest?
b) Le libéralisme économique favorise-t-il la démocratie ?
Dans la tradition des grandes déclarations des droits (Etats-Unis,France), les libéraux insistent sur le lien entre liberté d'initiative, droit de propriété, droits individuels, droits collectifs, contrôle du pouvoir d'état.
Il existe des libéralismes non démocratiques. Certes les monarchies libérales (Royaume-Uni, Belgique, Espagne...) sont également démocratiques. Mais on a connu des dictatures "libérales"sur le plan économique (le Chili de Pinochet) et le libéralisme économique des Nouveaux pays industrialisés (Corée,Singapour...) n'est pas vraiment démocratique.
On a connu aussi des démocraties non libérales : Sparte, la Convention de 1792, l'Union Soviétique...
c) Le libéralisme économique engendre-t-il la Paix ?
Oui, en principe, à l'horizon de l'Histoire:
- par la satisfaction de tous les besoins (?) , si on croit aux effets bénéfiques de la division internationale du travail et de la mobilité croissante des ressources;
- par la libre négociation généralisée de contrats se substituant à la violence politique;
Pour le moment, et sans doute pour longtemps, le libéralisme repose sur la compétition, source possible :
- de distorsions liées aux inégalités présentes difficilement supportées;
- d'effets de domination;
- de troubles liés aux ajustements structurels sur les budgets et les déficits extérieurs ainsi qu'aux ajustements sectoriels (réorientation,compétitivité).
2°) Développement et croissance
Quels qu'en soient les facteurs évoqués plus haut, le développement et la croissance économique sont-ils des vecteurs de libéralisme, de démocratie, de paix ?
a) Développement et libéralisme
Le développement économique favorise-t-il un épanouissement des droits individuels et collectifs, notamment des libertés économiques?
Oui, dans la mesure où le surcroit de richesse permet:
-le développement de "classes de loisir" (guerrier, moine, bourgeois, intellectuel, politicien, journaliste...) et d'une économie de services individuels (professions libérales) favorable aux libertés individuelles;
-le développement tend à diminuer la natalité, ce qui permet des modes de vie à hautes exigences;
Pas toujours, dans la mesure où la nécessité de maintenir un niveau de performance élevé peut conduire à limiter l'épanouissement de droits individuels:
- dans l'Histoire, conflits autour du droit du travail : esclavage des Noirs, luttes sociales du XIX°siecle...
- dans le monde contemporain : les sociétés performants s'accompagnent d'un conformisme social peu favorable aux différences individuelles (Japon ?) ou même de régimes autoritaires (Corée,Singapour,Taiwan).
b) Développement et libéralisme
La réussite économique favorise la démocratie:
- Elle permet de consacrer des ressources humaines et financieres à la conduite de la chose publique et au maintien du minimum de solidarité indispensable pour assurer l'adhésion des citoyens;
- Elle développe la pratique contractuelle à travers la vie des affaires, et un certain sens de la conduite raisonnable de projets de longue durée.
Mais ce n'est pas toujours nécessairement le cas:
- On connait des oligarchies prosperes dans l'Histoire (cités flamandes,Venise) et aussi des dictatures florissantes (monarchies pétrolieres);
- Il existe aussi des démocraties pauvres, notamment dans le monde rural et les sociétés traditionnelles (la Djemaa kabyle).
c) Le développement et la paix:
Le développement est en principe un facteur de paix, tout comme le libéralisme économique, si on admet qu'à la fin de l'Histoire tous les besoins économiques seront saturés.
Les modeles de pensée qui sont à la base du développement des pays les plus avancés (OCDE)se trouvent être aussi des modeles démocratiques : ce modele dominant impregne largement les comportements des Nations-Unies en matiere de relations internationales.
Il en serait autrement si l'Allemagne et le Japon avaient gagné la guerre, ou encore si d'autres puissances financieres, par exemple les monarchies arabes, pouvaient totalement appliquer leur conception de la vie internationale.
Rappelons aussi une évidence : des tensions et même des conflits graves ont toujours existé entre pays riches, soit pour plus de richesse, soit, grâce à la richesse, pour plus de pouvoir ou de prestige.
3°) La Démocratie:
a) La Démocratie favorise-t-elle la croissance?
Oui:
- parce qu'elle évacue certains conflits majeurs grâce aux procédures de négociation et à l'application de la loi;
- elle rassure partiellement sur la conduite des affaires politiques;
- elle facilite l'adhésion du plus grand nombre aux nécessaires solidarités économiques et sociales.
Pas nécessairement :
- quand la croissance exige une mobilisation absolue, sans contestation ni formalisme : les économies de guerre peuvent suspendre la démocratie tout comme les libertés;
- quand la démocratie consacre ses efforts sur la répartition des revenus plus que sur la production des richesses;
- quand la démocratie détourne l'attention du débat économique au profit de conflits subjectifs : la démocratie du sexe des anges (le juge Thomas et Myke Tyson) ou la démocratie de sérail.
b) La démocratie est-elle facteur de libéralisme?
Oui, dans la mesure où il est difficile d'imaginer un "gouvernement par le peuple" qui ne repose pas sur des individus rendus raisonnablement indépendants par leurs droits économiques ;
Mais pas nécessairement:
-le "gouvernement pour le peuple" peut tres bien être assuré par un dictateur "populiste" (fascisme, péronisme, colonels arabes) sans grande préoccupation pour les libertés;
- les régimes démocratiques les plus respectables s'accompagnent le plus souvent de solidarité, donc de politiques de redistribution par le pouvoir central et non par le marché (budgets publics, économie mixte, syndicats, social-démocratie allemande);
- égalité et fraternité ne sont pas toujours compatibles avec les libertés;
c) la démocratie favorise-t-elle la paix?
Oui, quand il existe une coalition mondiale des démocraties, dans l'Assemblée générale de l'ONU ? au Conseil de Sécurité ? Il est notoire que les démocraties se font rarement la guerre.
Pas nécessairement:
- quand les démocraties défendent leurs interêts contre des pays moins démocratiques : par exemple "la Croisade des démocraties contre Hitler" encore que paradoxalement l'acces au pouvoir de Hitler en 1933 se soit effectué dans des conditions plus démocratiques que l'avenement de la Cinquieme République en France.
- quand les démocraties se disputent entre elles, ce qui aboutit rarement à une guerre.
4°) La paix:
a) La paix favorise-t-elle la croissance?
Oui, en théorie, puisqu'elle permet de consacrer l'essentiel des ressources aux activités pacifiques : c'est le theme actuel des "Peace dividends" aux Etats-Unis. Et c'est aussi l'objectif profond, sinon la cause du retournement de la politique soviétique.
Pas nécessairement : les guerres ont toujours été facteurs de croissance pour les belligérants qui peuvent assumer l'effort de guerre (technologie, intensité des coordinations économiques qui a produit l'usine allemande clés en mains et le Liberty Ship américain).
La guerre est encore plus intéressante pour les neutres qui restent fournisseurs des belligérants (Suede, Suisse, Argentine).
b) La Paix facteur de libéralisme?
Oui, par opposition à la guerre qui est presque nécessairement dirigiste.
Pas nécessairement, quand la paix résulte d'une sécurité méfiante entre les Blocs : situation que le Monde a connue pendant 45 années de guerre froide. Le libéralisme économique ne pouvait se développer que dans l'espace délimité de l'OCDE. Les autres espaces procédaient d'une philosophie économique dirigiste et protectionniste (au Sud) et d'une économie socialiste à l'Est.
c) La paix, facteur de démocratie?
Les régimes forts non démocratiques -souvent des régimes militaires- aiment la guerre pour la conduire ou pour la préparer, pour mobiliser l'adhésion populaire.
En sens inverse la guerre, qui précede la paix, est souvent nécessaire aux démocraties afin de modérer les régimes militaires: Allemagne et Japon de la Deuxieme Guerre Mondiale, Argentine de la guerre des Falkland, Saddam Hussein. Et les démocraties succedent volontiers aux dictateurs vaincus (la 3° République succede à l'Empire, la République de Weimar au Deuxieme Reich, les généraux argentins perdent le pouvoir apres la Guerre des Falkland).
En conclusion, la nébuleuse idéologique de l'apres-communisme ne manque pas d'une certaine cohérence : il est exact qu'il existe une complémentarité entre libéralisme, croissance, démocratie et paix. Mais cette synergie n'est ni rigoureuse, ni automatique: elle ne doit pas empêcher les libéraux, les démocrates, les pacifiques et les économistes de rester attentifs à la vie internationale.
L'analyse de la situation contemporaine nous a montré l'interférence des niveaux de changement et de risque. Mais auusi que rien n'est univoque.
B- L'INTERFERENCE DES DUREES DU RISQUE:
Au point de vue des chronologies, toute situation est constituée :
- par le poids du passé : état des éléments existants à un moment donné, état des évolutions constatées pour chacun d'eux, mémoire physique et affective des évenements passés;
- par la perception de l'avenir : jugements formulés sur le passé et le présent, attentes et craintes envers l'avenir, hiérarchie des durées futures en fonction des urgences perçues et de la capacité d'agir.
- par un présent amplifié par le stress de l'urgence et des réactions face à face, par ce sentiment indéfini qui fait percevoir comme inhabituelles et différentes les choses qui ne changent pas.
Ces temps sont multiples et enchevêtrés, avec des bifurcations et retours toujours possibles.
Chaque risque a sa durée propre, avec son cycle d'intensité, ses ruptures de rythmes, ses seuils d'irréversibilité. Les cycles d'inflation, la vie des produits, celle des entreprises, l'état de grâce des présidents nouvellement élus, les idees à la mode, tout cela obéit à une logique qui rend le phénomene plus ou moins pertinent dans la genese des risques d'une situation donnée.
Les contenus d'un phénomene et sa forme changent avec le temps, sa vigueur et son impact aussi. On peut ainsi décrire le cycle de vie d'un produit, d'une entreprise, d'une phase de développement économique, d'un gouvernement et même d'un régime.
Le rythme propre du phénomene est un puissant facteur de risque( ). Mal évalué, il suscite la surprise et l'étonnement( ), trop rapide ou brusquement accéléré, il conduit au stress ou à la panique. Il est bien connu que les crises, notamment les conflits armés, précipitent les évolutions latentes.
L'échelonnement des problemes à traiter ou au contraire leur coïncidence n'est pas sans effet sur la solution. Devant un même danger échelonné dans le temps, celui des trois Curiace inégalement blessés, le dernier des Horace a su hiérarchiser la réponse au risque. L'interprétation du changement dépend beaucoup de la perspective de durée que l'on adopte : sur le tres long terme (et les tres larges espaces) la statique des structures semble prévaloir; à tres court terme (et pour des domaines restreints) la volatilité domine.
La juxtaposition en un moment donné de cycles hétérogenes produit la complication d'une situation embrouillée, la complexité d'une perspective aléatoire, la menace d'un danger, l'urgence d'une crise.
Il est sans doute utile d'analyser les temps d'évolution des risques. Parmi les plus significatifs pour notre sujet, on peut citer:
1°) les cycles économiques:
2°) le rythme des échéances politiques:
notamment le remplacement des dirigeants par voie électorale (le ryhme quadriennal américain, la combinaison française du septennat présidentiel et du quinquennat parlementaire), par voie révolutionnaire (Honecker et Gorbatchev) ou par mort naturelle (Lénine, Staline, Mao-Tse-Toung sont morts, Teng Chiao Ping et Fidel Castro finiront par mourir, et aussi le lecteur curieux de risque politique).
A plus court terme, les cycles annuels des arbitrages budgétaires constituent des rendez-vous significatifs de la politique d'un gouvernement.
Le politique, surtout dans les démocraties, vit essentiellement dans un court terme qui parfois se réduit au quotidien des sondages d'opinion.
Pratiquement aucun homme d'état n'a eu le temps de voir naître, évoluer, exploser, puis se résorber une crise réelle.
Les crises bien délimitées de la vie politique sont parfois de simples mouvements d'humeur, symboles de tensions profondes mais dont personne ne souhaite dérouler la logique jusqu'au bout, et qui disparaissent donc aussitôt dans l'oubli sans reglement de fond. Ce fut sans doute le cas, en France, du joli mois de mai 1968.
La crise est parfois la cristallisation occasionnelles de graves difficultés de fond qu'un stratege aurait dû régler autrement et avant qu'elles n'apparaissent .
La crise de SARAJEVO en 1914 aurait pu être gérée différemment en tant que crise : les services de police locaux ont été imprudents en voulant à la fois prouver la tranquillité de la Bosnie-Herzégovine et ne pas entourer l'Archiduc des égards et protections dûs au seul Empereur. Du côté serbe, les services spéciaux ont armé Gavrilo PRINCIP et ses camarades sans but tres précis, puisque les jeunes terroristes ont eux-mêmes hésité jusqu'au dernier moment sur la nature de "l'exploit" qu'ils voulaient réaliser.
Mais bien sûr, en arriere-plan jouaient d'autres logiques: celles des ambitions des Habsbourg dans les Balkans (puisque la Prusse avait réduit la vocation dans le Reich allemand), celles de la Russie dans cette même région (apres la défaite de 1905 devant les Japonais), les mécanismes de garantie réciproque au sein de l'Alliance et de l'Entente etc...Et c'est ainsi que le coup de pistolet de PRINCIP fit 20 millions de morts.
3°) Existe-t-il un cycle des guerres?
4°) les temps longs de la démographie et des moeurs:
Le remplacement des générations (vingt cinq ans?), celui des modes de vie (attitudes de la population au regard de la sécurité, de la santé, de la consommation...)
5°) le temps court et complexe de la crise:
Pour un phénomene donné, par exemple l'agressivité nationaliste ou la modernisation économique, l'état de maturation respective des cycles à court, moyen et long terme oblige à un diagnostic précis des opportunités et des risques.
Un gouvernement qui n'a pas su traiter à temps les causes démographiques, sectorielles, institutionnelles et psychologiques du chômage finit par se trouver confronté à une crise sociale insoluble. Sauf s'il a la sagesse de laisser au successeur le soin de régler les problemes afin de mieux le critiquer.
Ceci nous fait remarquer la dimension importante de la durée d'exposition personnelle au risque. Pour beaucoup de décideurs publics et privés, il ne sert à rien de philosopher sur le risque si l'évolution dépasse le cadre d'une existence humaine (à long terme, nous serons morts) ou politique (la durée d'un mandat) ou managériale. Il suffit de se couvrir pour la durée pertinente...sauf pour ceux qui croient à l'immortalité de la gloire.
Beaucoup de raisonnements à tres courte vue s'expliquent simplement par le pragmatisme de celui qui ne sera pas concerné par l'avenir lointain. "Apres moi le déluge", disait un chef d'état français; "Apres moi ce ne sera pas le vide, mais le trop plein" disait un autre.
Pourtant la breve durée de l'exposition personnelle ne protege pas des lentes évolutions accumulées : traverser en courant une plage de Normandie le 6 Juin 1944 est évidemment plus dangereux que d'y flâner cinquante ans plus tard.( )
C- L'INTERFERENCE DES ESPACES DE RISQUE:
La réflexion sur les relations internationales et, a fortiori, la science politique et administrative ont longtemps privilégié jusqu'à l'exclusive le territoire de l'état-nation.
On sait maintenant que les espaces pertinents sont beaucoup plus diversifiés.
1°) Les champs géographiques des acteurs du risque:
L'espace national est celui des solidarités constituées de longue date (les monarchies française, anglaise, espagnole au XVI° siecle), ou au contraire cimentées dans l'enthousiasme initial des jeunes indépendances. Il constitue aujourd'hui l'unité de base des organisations politiques, sans doute appelée à perdurer pour quelques générations malgré la montée du subnational (autonomies locales mais surtout dérégulations des entreprises et libertés individuelles), de l'international, du transnational et, bientôt, de l'échelon de pensée mondial.
L'espace international est celui des relations classiques entre états, relations qui transitent par les appareils gouvernementaux. Il concerne principalement la "haute politique" de puissance et de sécurité et, de plus en plus, la politique économique extérieure. Releve également du systeme international, la constitution volontaire d'espaces de solidarité (Union Européenne, OTAN, ALENA, ASEAN etc...).
L'espace transnational prend en compte les relations qui s'établissent entre les "sociétés civiles"sans nécessairement passer par les gouvernements. C'est le cas par exemple de la géographie des langues et des religions, des échanges culturels, des mouvements de capitaux, de la "low politics".
Il peut concerner par exemple des modes de vie et relations de voisinage (exemple : industrie micromécanique de la région alpine), des habitudes liées à un passé commun (francophonie).
L'espace mondial considere la planete, ou l'oekoumene dans son ensemble pour des questions qui dépassent le niveau des états : population globale, subsistances et ressources naturelles, écologie, santé...Les acteurs sont les états, les organisations internationales, les sociétés civiles, les individus eux-mêmes.
Une maniere assez voisine de découper l'espace des relations internationales distingue l'univers des acteurs liés par leur souveraineté (états, organisations internationales) et ceux qui, libres de toute responsabilité collective, peuvent se consacrer à la promotion de leurs intérêts personnels (univers subnational, transational, et aspirations mondialistes)( )
2°) L'étendue pertinente des espaces de risques :
Si tout acteur, ou toute victime, est potentiellemnt concerné par la totalité des espaces de risques, le champ pertinent est évidemment plus limité en pratique.
Une entreprise réalise consciemment ou non une segmentation des marchés nationaux et internationaux, en fonction de ses produits, de la clientele visée, de ses capacités de communication etc... L'espace des risques n'est pas nécessairement limité aux niches de marché. En effet, un exportateur français de meubles vers la Rhénanie est concerné par les effets de la réunification allemande, de la politique monétaire américaine, et peut-être aussi par l'intégrisme dans les banlieues. La segmentation des environnements pertinents s'ajoute donc à celle des marchés.
Un état ne joue pas sur le seul terrain (territoire et domaine) de ses compétences juridiques. Il est souvent amené à prendre en charge les préoccupations des groupes et individus de l'univers subnational. Parfois il doit leur concéder une autonomie d'action, même dans le domaine de ses prérogatives : c'est le cas notamment envers les entreprises, les individus, les régions...
En dehors des relations officielles entre états-nations, l'état joue fréquemment avec le transnational voire avec l'opinion mondiale qui peuvent lui procurer des appuis à l'étranger.
De même que se téléscopent, à un moment donné, les différents cycles d'évolution, la prise en considération des divers espaces où se jouent les phénomenes est une caractéristique essentielle du diagnostic stratégique.
"Le Temps a cessé,l'Espace s'est évanoui,nous vivons maintenant dans l'événementiel simultané..."Mac Luhan
Les chapitres consacrés à l'histoire et à la géographie du risque politique évoquent de nombreuses situations caractéristiques.
De maniere plus générale, comment peut-on caractériser la situation de crise?
1°) Elle combine les trois ordres d'interférence:
- les niveaux ou domaines de conflits
- les durées:
- les espaces concernés
2°) Le déclenchement de la crise:
- ce peut être un accident, d'ordre naturel ou humain mais purement contingent : l'explosion de TCHERNOBYL a montré l'opacité et l'inefficacité du systeme soviétique justifiant ainsi la Glasnost et la Perestroïka.
- l'évenement, lui, résulte d'un comportement volontaire d'acteur libre, donc difficilement prévisible même si on peut comprendre ses mobiles : l'attentat de SARAJEVO en août 1914, l'invasion du KOWEIT en août 1990.
- le retournement collectif de tendance ou d'attitude est assez proche dans le temps d'un accident ou d'un évenement, qu'il amplifie par l'effet de masse et de panique. L'évasion collective des Allemands de l'Est apres l'ouverture de la frontiere austro-hongroise, les krachs boursiers et bon nombre de cycles de conjoncture économique, la fin de l'état de grâce d'un chef charismatique présentent le caractere mystérieux de l'accident historique.
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