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LE FORUM SOCIAL EUROPEEN DE PARIS-SAINT DENIS (13-16-2003) |
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Une année dominée par des débats engageant l'avenir de l'Union européenne avec élargissment de 15 à 25 membres, et la rédaction d'une Constitution.
»Le Forum 2003
Cette manifestation, organisée à l'appel de 1.500 associations, syndicats et mouvements altermondialistes, se présente comme un espace de rencontres entre organisations de la société civile des pays d’Europe occidentale, centrale et orientale. Lors de ce Forum, il s'agit d’affirmer non seulement la nécessité d’une autre Europe au service des citoyens, mais aussi d’en démontrer la possibilité et d’esquisser les voies et les moyens de sa réalisation. Ainsi, l'association altermondialiste Attac, très critique à l'égard de la constitution européenne, propose "21 exigences" qu'elle souhaite voir intégrer dans le texte, parmi elles, le retrait de "la concurrence comme objectif et norme supérieure de l'Union Européenne". Au coeur de ces débats, il y a la volonté de "faire entendre des voix généralement exclues du débat public, les populations les plus durement éprouvées par les politiques libérales et les logiques sécuritaires: les sans logement, sans papier, sans travail, les populations des quartiers populaires". Cette logique d'inclusion sociale se concrétisera notamment par l'accessibilité aux handicapés, la traduction des débats en langage des signes, l'hébergement gratuit chez l'habitant ou dans des locaux des municipalités. Le slogan central du Forum, "Pour une Europe des droits dans un monde sans guerre" exprime "l'idée que face à une Europe régulée par la concurrence et le marché nous opposions une régulation par les droits sociaux, politiques, culturels et écologiques des citoyens", a expliqué Pierre Khalfa, membre du sécrétariat d'organisation du FSE. Le moment fort de l'événement sera la tenue d'une manifestation-parade "pour une Europe des droits sociaux dans un monde sans guerre", samedi, à Paris. Les organisateurs attendent entre 40.000 et 60.000 personnes pour combattre le capitalisme libéral et défendre les droits sociaux européens. Quelque 55 conférences plénières, 250 séminaires, des centaines d'ateliers, et entre 150 et 200 spectacles, films, expositions et concerts auront lieu entre Paris et sa proche banlieue. Environ 60 nationalités seront représentées avec un effort d'élargissement à l'Europe continentale et oriental et plus d'un millier d'organisations - syndicats, associations politiques, humanitaires, religieuses, professionnelles - se répartiront entre les quatre cités hôtes du Forum social européen. Une quinzaine d'événements vont se greffer au FSE proprement dit: l'assemblée européenne pour les droits des femmes (qui se tiendra le 12 novembre à Bobigny, Parc de la Bergère), le forum des enfants (12 novembre, à l'Académie Fratellini, Saint-Denis), des forums sociaux locaux (Saint-Denis sera le lieu du Forum des autorités locales) et un forum syndical.
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Programme et participants
Les débats du Forum social européen reprennent les grands thèmes défendus par le mouvement altermondialiste, notamment la dénonciation du libéralisme, en les déclinant et en les adaptant au contexte social européen. Des débats sont prévus sur le thème "Contre la guerre, pour une Europe de la paix et de la justice", sur "l'attitude à l'égard de l'hégémonisme des Etats-Unis et de leurs projets de guerres préventives", sur les relations Nord/Sud, la dette et le développement dans les pays du Sud. "Contre le néolibéralisme, pour une Europe des droits, sociale et démocratique" sera une des thématiques sociales abordées. Les droits économiques et sociaux, les politiques économiques alternatives en Europe, les services publics, la pauvreté, feront l'objet de conférences et séminaires. "Pour un non de gauche à la constitution européenne" évoquera les institutions, de même qu'une "analyse de la Convention pour l'avenir de l'Europe" (projet Giscard de constitution européenne). Il sera aussi question de l'avenir de l'Europe de l'Est et de la Turquie. Le thème "contre le racisme et la xénophobie, pour le dialogue des cultures" permettra de débattre de la politique européenne d'immigration, du conflit israélo-palestinien, de l'islamophobie, de l'antisémitisme... C'est au sein de ce débat qu'interviendra l'intellectuel Tariq Ramadan, dont la participation au FSE a été l'objet d'une violente polémique. L'environnement, la politique agricole commune, les OGM, le "droit à la santé face à la globalisation", les médias, la culture, l'éducation figureront encore parmi les sujets. Parmi les signataires du Comité d'initiative français, chargé de la préparation du Forum, on retrouve les syndicats (CGT, FO, SUD, l'Unsa, certaines organisations de la CFDT, la FSU), les structures traditionnellement associées à la mouvance altermondialiste (Attac, Confédération paysanne, Le Monde diplomatique, la fondation Copernic...). La Ligue des droits de l'Homme, le Mrap, le Gisti (groupe d'information et de soutien des immigrés) ou encore Ras-l'front font également partie du comité, de même que plusieurs associations humanitaires (Emmaüs, Comité catholique contre la Faim et pour le développement). Au-delà des organisateurs, le Forum réunira une nuée d'organisations étrangères aux étiquettes multiples: syndicats, groupements professionnel, ONG, associations locales ou spécialisées (exemple, Graine de jardin, association francilienne dont l'objet est "de favoriser le développement des jardins collectifs respectueux de l'environnement").
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Les partis politiques face au FSE
Conscients de la sympathie de l'opinion pour les idees et revendications altermondialistes, les partis traditionnels, de la gauche à la droite, y vont de leur initiative. Si l'extrême-gauche, le PCF et les Verts sont volontiers reconnus comme des interlocuteurs naturels par ce vaste mouvement de contestation de l'ordre économique établi, les autres partis ont fort à faire pour démontrer qu'ils ne sont pas indifférents aux problèmes soulevés par les altermondialistes. Parti socialiste Si les socialistes sont souvent chahutés par une fraction du mouvement, le PS juge "légitime" leur présence dans ce vaste regroupement, parce que dit le premier secrétaire du parti, François Hollande "nous sommes internationalistes" et que le PS s'affiche comme "un parti de transformation sociale". C'est pourquoi le PS sera présent au Forum social européen. Il vient de déclarer lors de la clôture du "Forum européen des socialistes pour une autre mondialisation" que le PS est favorable à la taxe Tobin applicable aux mouvements de capitaux spéculatifs, à une écotaxe ou encore à un prélèvement sur les ventes d'armes. Autant de propositions défendues par la mouvance altermondialiste. Mais il a d'autre part souligné que "le combat politique est nécessaire pour bâtir un autre monde... un grand mouvement social ne suffit pas... Il faut, à un moment, transformer politiquement. C'est le rôle du parti socialiste". A droite On a senti le danger d'abandonner le thème d'une autre mondialisation, c'est pourquoi L'UMP a organisé un colloque organisé à l'Institut du monde arabe à Paris sur ce thème, au cours duquelle Alain Juppé et Philippe Douste-Blazy, ont plaidé pour "une autre mondialisation" qui accorderait davantage de place aux questions sociales. Concluant les débats, le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin a estimé qu'il y avait de "formidables évolutions positives" dans la mondialisation et qu'il appartenait aux politiques de "rassurer" et surtout "d'éviter la diabolisation des échanges internationaux". A quelques jours du Forum social européen organisé par les altermondialistes, "cette journée vient à point nommé car nous aussi on veut changer le monde", a lancé M. Douste-Blazy, secrétaire général de l'UMP. Force ouvrière Le secrétaire général de Force ouvrière, Marc Blondel, a estimé que le Forum social européen , qui se tient en région parisienne de mercredi à samedi, est un "patchwork avec des préoccupations tellement différentes qu'il ne peut rien en sortir", dans une interview parue dimanche dans le quotidien lyonnais "le Progrès", tout en confirmant la présence de la confédération au forum.
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»Les altermondialistes: forces et faiblesses
Ce mouvement social, protéiforme et parfois divisé a su créer une dynamique de rassemblements et de débats sans pour autant être en mesure d'influer sur les grandes décisions politiques et économiques internationales. Le Forum social européen 2003 s'inscrit dans la lignée des différents rendez-vous antimondialistes - devenus depuis altermondialistes - qui ont vu leur participation grossir depuis le sommet du G8 de Seattle (Etats-Unis, 1999). Ces journées de débat, associées aux manifestations organisées lors des grands sommets internationaux (G8, OMC, etc...) ont eu pour effet de donner un écho médiatique aux partisans de la critique du néo-libéralisme, une situation que les grandes organisations internationales ont dû prendre en compte dans leurs travaux. Malgré quelques résultats, le caractère hétéroclite des organisations qui participent à la mouvance altermondialiste ainsi que la profusion des mots d'ordre qu'elles défendent donne parfois le sentiment d'une opposition sans propositions alternatives concrètes, et donc sans réelle possibilité d'influer sur les grandes décisions politiques et économiques internationales. Derrière le mot d'ordre rassembleur d'un "autre monde est possible", les priorités diffèrent en effet en fonction des acteurs, qu'ils soient humanitaires, politiques, syndicaux, pacifistes, écologistes ou alternatifs plus radicaux. En France, par exemple, le lien entre les différents acteurs peine à se construire concrètement. Le mouvement altermondialiste est ainsi capable de réunir 150.000 personnes sur le plateau du Larzac au début du mois d'août mais les promesses d'une "rentrée brûlante" de José Bové, porte-parole de la Confédération paysanne, et d'une montée en puissance de la contestation sociale sont restées sans effet, faute de relais suffisamment forts aux niveaux syndical et politique traditionnels. A ces éléments structurels expliquant la difficulté à faire émerger une série de revendications concises et pratiques s'ajoute par ailleurs la volonté des organisateurs des différents forums sociaux de respecter la diversité des partiesprenantes et de leurs prises de positions, qu'illustrera l'absence de déclaration finale au Forum Social Européen de cette semaine à Paris.
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»Un rendez-vous marqué par une polémique
La préparation de ce second rendez-vous européen a été marquée par une violente polémique sur la présence de Tariq Ramadan, intellectuel genevois et prédicateur vedette des jeunes musulmans européens qui doit intevenir dans le débat "contre le racisme et la xénophobie, pour le dialogue des cultures". C'est une tribune libre de l'islamologue qui a déclenché la controverse, après avoir listé une série d'intellectuels juifs Français (dont Taguieff qui n'a rien à voir avec le judaïsme) il les accusait de défendre la politique israélienne par communautarisme. Mis en cause, le philosophe André Glucksmann l'accusait en retour de nourrir une "obsession antisémite", tandis que l'Union des étudiants juifs de France (UEJF) estimait qu'en "s'attaquant à des intellectuels parce que juifs, Tariq Ramadan joue lui-même le jeu qu'il prétend dénoncer: le communautarisme de la pensée". La présence de Tariq Ramadan au Forum social européen a aussi scindé la gauche en deux camps, isolant le PS dans sa condamnation face aux Verts (dont se sont désolidarisés six Verts parisiens), au PCF ou à la LCR. Face à ce tir de barrage, les organisateurs du Forum ont répondu que Tariq Ramadan y "avait sa place". "On pense que c'est un faux procès qui lui est fait. Evidemment, si nous avions eu le moindre doute sur le fait qu'il pourrait être antisémite, nous ne l'aurions pas invité", a affirmé Pierre Khalfa, membre du secrétariat d'organisation du FSE. "On peut être en désaccord avec lui sur beaucoup de sujets", dit-il, "il a une conception du monde très marquée par la religion. Ce n'est pas la mienne. En tant que laïque et athée, je suis opposé à toute forme de communautarisme, mais on ne peut assimiler communautarisme et racisme". Aux côtés de Tariq Ramadan, participeront au débat des représentants associatifs de plusieurs pays européens et le président du MRAP (mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples), Mouloud Aounit. Le MRAP n'a pas annulé sa participation, estimant que l'article de Tariq Ramadan "ne développait pas un point de vue antisémite", même si le mouvement "condamne ces propos marqués par une logique communautariste qui constituent à tout le moins une grave maladresse porteuse, en germe, de racisme". Quant à Tariq Ramadan lui-même, il s'est expliqué en affirmant qu'il "fallait oser crever des abcès et questionner les non-dits dangereux". "Il y a aujourd'hui des intellectuels juifs comme musulmans qui poussent les membres de leur communauté à se définir contre les autres, enfermés dans leur ghetto intellectuel, ethnique ou religieux", dit-il. "En France, on ne peut parler d'intellectuel juif sans risquer de prêter le flanc au soupçon d'antisémitisme".
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Le cadre Le FSE se déroule du mercredi 12 novembre vers 18h00 au samedi 15 novembre à 21h00 sur quatre site de la région parisienne (un titre de transport forfaitaire est prévu pour se rendre sur chaque site): Parc de la Villette à paris (19e arrondissement) : 59 évènements sont prévus. Des débats auront aussi lieu dans dans les mairies du 3e, 10e et 19e arrondissements Saint-Denis (Seine-St-Denis): une trentaine de lieux (maries, stades, cinémas, musées...) pour 125 évènements Bobigny (Seine-St-Denis): une vingtaine de lieux pour 232 évènements Ivry-sur-Seine (Val de marne): une trentaine de lieux pour 196 évènements. Manifestation Samedi 15 novembre - 14h Place de la République - Manif-parade qui s'achèvera par une fête autour de bals, guinguettes et concerts.
Hébergement Hébergement collectif (11.000 places sont disponibles) dans des gymnases ou des espaces publics qui disposent de douches et de toilettes. 1.500 places "d'hébergement solidaire" (chez l'habitant) sont prévus. Pour les autres, hébergements payants dans des auberges de jeunesse et des hôtels.
Le financement du FSE est essentiellement public: l'Etat français contribue à hauteur de 15% du budget (500.000 euros), le reste étant apporté par les villes et les conseils généraux de Paris et sa banlieue hébergeant les différentes manifestations. |
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