Un déferlement d’infos et de documents accablants sur le web a bousculé la communication « grande époque ORTF » d’Air France, du BEA et d’Airbus. Décodage.
Aux lendemains des crashs aériens, les institutionnels du transport aérien avaient l’habitude d’une communication assez bien huilée, façon grande époque d’Habsheim (1988) [1], où les boîtes noires avaient été directement envoyées sur la base militaire de Villacoublay (voir la vidéo du juge Sengelin réclamant désespérément la saisie des boîtes noires).
Nous étions en plein lancement commercial de l’A320 et un crash, ça pouvait faire désordre si l’avion était incriminé. Cette fois, les grands acteurs de l’aviation française ont du faire face à un déferlement d’infos et de documents sur le web qui les a peut-être obligés à sortir des positions consensuelles habituelles du type « Ah bah, l’avion est tombé à cause de la météo » ou « L’enquête est en cours, circulez, y a rien à voir ». Un autre refrain ? « C’est de la faute des pilotes ».
La presse française établie et respectable, dont on retrouve les « experts » sur tous les plateaux de télé, celle à qui les chargés de com’ du Bureau enquêtes analyses (BEA) ou de notre grande compagnie nationale font la bise lors des conférences, a parfois été à la traîne derrière des sites internet comme radiocockpit. Ce site de pilotes, évidemment un brin corporatiste, fourmille de documents officiels. On pouvait trouver les fameux messages Acars émis par l’avion, le rapport d’incident d’Air Caraibes, la compagnie qui, elle, avait changé ses tubes Pitot un mois après que ses pilotes se sont fait une belle frayeur, le rapport des incidents qui auraient du pousser Air France à changer ses fameuses sondes plutôt que son logo.
Selon le Quotidien du Tourisme, le nom de la compagnie s’écrit « en un seul mot » afin, selon elle, de refléter son ambition « de s’affirmer comme une marque internationale ». Des ambitions qui seront mises à mal par l’humoriste Stéphane Guillon dans un sketch décapant sur France Inter.
A noter d’ailleurs que dans la course à l’info, le Brésil a mis un but dans les dents des journalistes français, en annonçant le premier avoir récupéré les fameux messages Acars « par une source interne à Air France ».
Très fort ! Justement, des journalistes brésiliens ont moyennement apprécié les sarcasmes de Paul-Louis Arslanian (le patron du Bureau enquêtes analyses), lors de la conférence de presse de mercredi 17 juin, démarrant par un sermon aux journalistes qui font leur travail en tentant de comprendre ce qui s’est joué dans la catastrophe du vol AF 447, distribuant ensuite les bons et mauvais points : « votre question n’est pas très intéressante » ou à un autre, qui parle pourtant français : « je n’ai pas le temps d’apprendre le brésilien. Comment dit-on "je ne sais pas" en brésilien ? ».
Dans notre série « ils détestent la presse et le font savoir » : nous avons eu aussi un Pierre-Henri Gourgeon, patron d’Air France qui joue dans le registre déplacé de la colère alors que celui du profil bas serait nettement plus approprié. Ce dernier a convoqué pour un petit déjeuner de presse le 11 juin dernier l’Association des journalistes professionnels de l’aéronautique et de l’espace (AJPAE). A la question insistante de l’un d’entre eux, il sortira de ses gonds et traitera les journalistes d’ « irresponsables », nous rapporte un confrère présent. Même pression du côté d’Airbus, qui n’hésite pas à menacer les journalistes de poursuites en diffamation. Une presse qualifiée aussi d’ « irresponsable » . Oui, nous sommes en plein salon du Bourget : pas question de venir jouer les grains de sable en posant des questions sur la technologie Airbus au moment où le Qatar achète une vingtaine d’A320 ?
Mais tout n’est pas perdu, Air France peut encore compter sur les « amis de la maison ». Quelques jours avant l’intervention de son directeur général, un « expert accidents et pilote de ligne », François Grangier, est venu dire dans le journal télévisé de David Pujadas tout le bien qu’il pensait des entreprises Air France et Airbus : « Je trouve très courageux de la part d’Air France de se lancer de manière anticipée dans une telle modification (des tubes Pitot, NDLR), sans avoir la crainte de se voir attribuer à tort une responsabilité ». Plus tard, il distribuera aussi un bon point au fabricant des avions qu’il pilote : « le principe de précaution consiste à faire des choses avant qu’elles en deviennent dramatiques et c’est le but d’Airbus Industries ». Avant d’être expert, François Grangier est commandant de bord… à Air France. La direction appréciera… Cette séquence avait comme un p’tit air d’ORTF.
A travers blogs et sites internet d’initiés, revient souvent la thèse d’un Bureau enquêtes analyses (BEA) marchant main dans la main avec Airbus et Air France, protégeant les intérêts de ces deux grosses multinationales. Un complot ourdi en quelque sorte pour protéger des actionnaires gavés d’euros. Mais la genèse de cette « loi du milieu » ne se trouve t-elle pas dans les bizutages de la promo 1965 de polytechnique ? Paul-Louis Arslanian (patron du BEA), Noël Forgeard (ancien patron d’EADS tombé pour une malheureuse affaire de délit d’initié), Claude Lelaie, directeur des essais en vol d’Airbus et Pierre-Henri Gourgeon (actuel patron d’Air France après avoir tenu les rênes de la Direction Générale de l’Aviation Civile) étaient tous inscrits cette année là !
Et si l’amitié était plus forte que l’argent ?
À lire ou à relire sur Bakchich.info :
[1] Le 26 juin 1988, lors d’un meeting aérien, un A320 s’est écrasé lors d’une démonstration de vol, faisant trois morts et plusieurs blessés.
A propos de l’accident d’Habsheim, qui est ici cité, il faut quand même savoir qu’il s’agit d’une faute de pilotage caractérisée : tout pilote digne de ce nom ne fait pas un passage à vitesse minimale à une altitude extrêmement basse, même en ligne droite en vol horizontal, avec la manette des gaz sur plein ralenti, avec un avion qui a des réacteurs double flux, qui ont un temps de réponse très long ! N’importe quel pilote habitué des présentations en vol pourrait le dire. Ni quand on est seul à bord, ni, a fortiori avec des passagers auxquels ont fait prendre un risque tout à fait certain en mettant leur vie en danger, car le crash est quasi assuré ! C’est donc une faute grave et absolument inexcusable.
Mamie Nova : 13000 heures de vol, ancien pilote de chasse, pilote de ligne, ayant fait des présentations en vol à basse altitude…
Merci pour cette réaction. J’attendais depuis longtemps qu’un professionnel intervienne et mette les points sur les i !
Respectons la douleur des victimes et laissons les autorités compétentes terminer leur enquête (qui promet d’être longue et difficile) sur ce drame
Bonjour,
Pour un pilote, vous ne semblez pas très curieux. Allez donc faire une visite ici : http://www.eurocockpit.com/ et aussi leur forum, et vous verrez que ce que racontent de nombreux sites web ne sont pas des affabulations…
Qui a sorti les causes "foudre", "orage", etc. ? Ce ne sont pas les journalistes, mais bien les copains et les coquins du BEA, de la DGAC, d’Air France et Airbus.
Sans commentaires…
Bien heureusement pour nous, il y a les messages ACARS, qui ont été divulgués en partie et selon les premières analyses partielles par Radiocockpit, ils sont accablants.
Le mieux qu’aurait à faire le BEA serait de présenter tout le détail des messages et leur explication. Mais on peut leur faire confiance : circulez, y a rien à voir !
Sinon, que "pitot" se prononce "pitot" ou "pitote", peu importe, tout le monde a compris.
Et ce que raconte "le mal rasé" comme vous dites, ce sont des faits.
Et "prise d’air" ça te dérange pour un pilote ?????????????????????
Ton "badin" avec "Piltot"c’est mieux ???????????????
Pour faire plus simple !!!!!!!!!!!
Tes connaissances de pilote c’est quoi exactement ??????????????????
Le simu ?
Depuis combies d’heures EXACTEMENT ? n’as tu été aux commandes d’un AVION seul !!!
Les Institutionnels du transport aérien auraient déclaré : "Trop de com’ tue la com’". Ils doivent être au delà de la loi Hadopi et pour la censure des sites comme Bakchich, Rue89, Médiapart, Arrêts sur images, La télé libre etc…. ! Bref des sites qui nous balancent des infos intéressantes que les médias traditionnels commencent à reprendre… !
En tout cas, déjà la revue de presse de France Inter reprend les infos des médias ci-dessus. Mais avec le moralisateur Val aux commandes, cela ne va peut-être pas durer… !
Les sovjets d’Air France, d’Airbus et du gouvernement français se vantent toujours que l’histoire d’accidents d’Airbus est meilleure que celle de Boeing. FAUX, ARCHI-FAUX : Repris du site http://jacno.com/crashs-stats-2.htm
"Voici les chiffres concernant les accidents pour les "gros" avions, les Airbus A 330 et 340 et les Boeing 777. Il s’agit des avions qui intègrent les nouvelles technologies informatiques. Il est important de noter que ces chiffres concernent 842 Airbus et seulement 672 Boeing, soit 20 % de moins. Malgré cet écart, la comparaison est désastreuse pour Airbus.
Accidents selon la définition de l’annexe 13 de l’OACI :
Airbus 330/340 : 8
Boeing B 777 : 1
Dont pertes totales :
Airbus 330/340 : 3
Boeing B 777 : 0
Voici les chiffres concernant les accidents pour les "petits" avions, la série des A 318 à A 321, toujours appelée A 320, pour Airbus, et celle des B 737-600 à B 737-900, dénommés B 737NG (Next Generation), pour Boeing. Il s’agit des avions qui intègrent les nouvelles technologies informatiques. Il est important de noter que ces chiffres concernent 3236 Airbus et seulement 2388 Boeing, soit 26 % de moins. Malgré cet écart, la comparaison n’est pas très glorieuse pour Airbus.
Accidents selon la définition de l’annexe 13 de l’OACI :
Airbus A 320 : 22
Boeing 737NG : 8
Dont pertes totales :
Airbus A 320 : 13
Boeing 737NG : 3
Voilà la vérité."