Feu le président polonais Kaczynski, mort dans le crash de son avion le 10 avril, n’aimait pas que les pilotes de ses cercueils volants lui résistent. En 2008, un pilote avait fait les frais d’un déroutement pour raison de sécurité.
Célèbre dans le monde entier, le Tupolev TU 154, le modèle d’avion qui s’est crashé samedi 10 avril avec à son bord le gratin de l’Etat polonais et son président, s’est construit une bien pâle réputation.
Rapportée par un pilote qui participait à un reportage effectué par France 3 Côte d’Azur en juin 2006, l’anecdote vaut bien une caisse de Smirnoff : « les journalistes suivaient un contrôle de la Direction Générale de l’Aviation Civile (DGAC) sur l’aéroport de Nice. Nous leur avions indiqué un avion à contrôler et à filmer : un vieux Tupolev 154, (comme celui de l’accident de Smolensk, NDLR), qui appartenait au leader russe du gaz, Gazprom, mais qui avait été reconverti en charter à bas prix pour des tours opérateurs. Au dernier moment, les inspecteurs ont préféré ne pas le contrôler. C’était mettre le nez dans les magouilles des dérogations permettant à ces avions obsolètes de se poser sur nos aéroports et de survoler notre pays ».
Et puis, il fallait pouvoir déchiffrer le cyrillique sur les documents de bord… Effectivement, la réglementation internationale des critères de spécifications, la « CS 25 » n’est pas appliquée à ces avions hors d’âge. Une autre loi s’applique, bien connue en aviation sous le nom de « la loi du grand père ». On part du principe que ces avions, bien que ne répondant plus aux normes modernes, ont été construit, à l’époque - celle de nos grands pères - dans les règles de l’art. Et leurs compagnies ne sont pas obligées de les adapter avec des systèmes embarqués modernes assurant une meilleurs sécurité. « Pour pouvoir se diriger en Europe, raconte notre témoin, les pilotes russes utilisaient des GPS bas de gamme ! ».
Sans compter que l’Ex-URSS a toujours refusé les transferts de technologie occidentale, regardant avec une certaine méfiance des instruments qui pouvaient aider mais aussi … contrôler et surveiller. Un vieux réflexe de la Guerre Froide, sans doute…« Ainsi, le TU 154 n’est pas doté d’un système de navigation perfectionné, le Trak- Flight Path Angel, explique Thierry Le Floc’H, ancien pilote du Groupement de liaisons aériennes ministérielles (GLAM). Descendre dans le brouillard et refaire quatre tentatives d’atterrissages me paraît très risqué. »
Doit-on envisager pour le crash de l’avion du président polonais derrière l’erreur de pilotage invoquée, une « pression » subie par l’équipage ? Fort possible. D’abord, l’atterrissage était prévu juste avant la commémoration de Katyn, une cérémonie, pour laquelle il aurait été très malvenu diplomatiquement que le président Kaczynski arrive en retard, pour cause de déroutement à Minsk ou Moscou. « La règle des déplacements officiels est de prévoir une marge. De surcroit, il me parait délirant d’embarquer autant d’officiels dans le même avion » explique Thierry Le Floc’H.
Notre confrère Marcin Sobczyk, journaliste au Georgian Daily ajoute un élément en faveur de cette thèse : « en 2008, en plein conflit entre la Georgie et la Russie, le président Kaczynski a fait un vol pour aller soutenir le leader Georgien. Il a piqué une colère contre le pilote, qui pour des raisons de sécurité avait refusé d’atterrir à proximité d’une zone dangereuse ». Selon nos informations, ce commandant de bord aurait ensuite été débarqué des cockpits… Après, ses collègues avaient plutôt intérêt à garder le cap indiqué par le doigt présidentiel.
De son côté, la compagnie d’avions de ligne polonaise LOT a investi dans des Boeing et des Embraer, et les Tupolev militaires servant aux déplacements des officiels sont surnommés depuis longtemps « les cercueils volants » par les Polonais.
Depuis leur mise en ligne dans le début des années 70, les Tupolev ont tué plus de 6000 passagers, avec près de 200 accidents, au cours de vols essentiellement assurés par la compagnie russe Aeroflot. Les Tupolev 154 ont connu 57 accidents sur les 954 produits, soit un taux élevé de 6% ! Ces avions de conception soviétique sont aujourd’hui totalement dépassés mais continuent de servir l’Afrique et l’Europe de l’Est, voire même l’Europe tout court. Servir. Ou desservir ?
A lire ou relire sur Bakchich.info
Le taux d’accidents des Tupolev 154, (de 6%) est extrêmement élévé par rapport aux autres modèles d’avions, pour lesquels on est plus proche de moyennes tourant à 1%.
Une "compagnie poubelle" - de facto composée de "cercueils volants" (puisque le principe consiste en l’empruntant à risquer de passer de vie à trépas)- se définit par plusieurs critères :
Une maintenance qui ne respecte pas les calendriers de visites tech
des pannes non répertoriées sur les documents de bord
des équipages peu ou mal formés, sous pression, ne bénéficiant pas de leurs temps de repos réglementaires
des finances qui ne sont pas saines
un manque de rigueur généralisé, pas de retour d’expérience , pas de traitement des incidents
etc. etc.
Avant de plaindre les polonais, jetez un oeil aux CV des défunts. La Pologne est certes un pays qui n’a pas toujours eu de chance au cours de l’histoire mais là, je pense qu’ils n’auront pas trop de mal à s’en remettre.
A quand notre tour ?
Il faut dire que la durée de vie d’un avion se compte souvent en dizaines d’années. A titre d’exemple, le 747 de Corsair immatriculé jadis F-GSEA (celui avec des vagues stylisées sur le fuselage), sur lequel vous avez peut-être fait des voyages aux Antilles. Il s’agit d’un avion qui a fait son premier vol le 17/10/1984 (Construction number 23032/063) et qui a été exploité successivement par :
1984-1997 : Singapore Airlines
1997-2004 : Corsair
2004-2005 : Air Atlanta Icelandic
2005-2007 : Travel City Direct
2007 (4 mois) : XL Airways
Depuis novembre 2007 : Air Atlanta Icelandic.
Et l’électronique de bord du Tupolev polonais est loin d’être rudimentaire, comme l’illustre la photo du lien.
Au vu des premiers éléments qui filtrent, il semble que le pilote n’a rien respecté du tout, & comme le président polonais n’était pas connu pour être un tendre & pour ses ordres péremptoires…On peut imaginer que le président a pu exiger que le gars essaye d’atterrir malgré les risques… Quant à l’enquête, ça va arranger tout le monde la thèse de l’erreur du pilote !
http://thalasrum.over-blog.com