Pétrole : tout flambe à nouveau

Les experts du marché pétrolier ont ceci de commun avec la plupart des experts, c’est qu’ils se trompent avec une régularité impressionnante. Depuis six mois, le prix du baril s’effondre et tous d’expliquer doctement qu’il ne pouvait en être autrement. La récession est là et elle diminue automatiquement la demande. Les pays de l’Opep ont réduit la production et prévoyants, se sentant menacés d’un contre-choc pétrolier, ont engagé en début d’année des plans d’austérité pour éviter une explosion de leur endettement comme cela avait été le cas au milieu des années 80.

Et voilà que tout change. D’abord, l’hiver, malgré le réchauffement climatique qui tient maintenant du dogme dont la contestation vous envoie en enfer – Allègre est en train d’en faire l’expérience - a été froid, ce qui fait que les stocks au début du printemps étaient moins importants que prévu. Ensuite, le Nigeria n’en finit pas de réduire sa production. Les indépendantistes du delta du Niger, en fait peu politisés mais franchement mafieux, font monter les enchères du racket sur les compagnies pétrolières. Ils sont même allés jusqu’à donner début juin 72 heures aux compagnies pétrolières pour quitter les lieux, les seules ayant vocation à rester étant celles qui comprennent leur lutte et le manifestent par une contribution plus ou moins spontanée à son développement.

Pétrole en stock

Malgré la qualité du brut local, les compagnies pétrolières cherchent de ce fait de plus en plus à partir et se disputent les faveurs de la Guinée Equatoriale voisine, état minuscule qui a en outre l’avantage d’être membre de la zone franc, ce qui facilite les calculs de rentabilité. Enfin, les gisements les plus coûteux, ceux du Canada, sont rentables à 80$ le baril. Et les compagnies qui ont investi dans l’Alberta font tout pour que les prix remontent, y compris en procédant à des stockages massifs. Certaines méchantes langues se permettent de parler de spéculation. Alors qu’il s’agit d’assurer par une gestion prudente l’avenir des réserves d’hydrocarbures … !!

Résultat, les prix montent et les experts revoient leurs prévisions. La référence en la matière est le service d’analyse économique de Goldman Sachs. En mars dernier, ce service annonçait un pétrole à 60$ le baril fin 2009, avec la possibilité que le prix soit en fait de 62$ - il faut être précis dans ces cas là. Aujourd’hui, il annonce sans états d’âme qu’on en sera à 85$. Il faut dire que vendredi dernier, on était à 70$. D’ailleurs, dans son jargon inimitable, Goldman Sachs fait de cette prévision une sorte d’évidence puisqu’on assiste à « une hausse des prix de nature cyclique, l’économie se stabilisant et l’Opep maintenant ses réductions de production pour ramener les réserves de pétrole aux niveaux d’il y a une dizaine d’années ».

Déficit : un trou plus profond

On s’était mal compris en mars… Mais cela devient plus clair. Ce qui est clair, c’est que la facture pétrolière va de nouveau s’alourdir. En France, la baisse du prix du pétrole avait permis à Bercy d’anticiper une stabilisation du déficit extérieur à 55 milliards €. Mais la hausse nouvelle ruine ces espoirs et on parle maintenant d’un déficit de 70 milliards, soit plus de 3% de la production, soit une situation plus grave qu’en 1982, quand il avait fallu lancer le plan de rigueur.

Depuis, l’Allemagne, grâce à l’euro, fait les fins de mois de la France et Angela Merkel a beau le rappeler régulièrement avec agacement, est-ce la faute de Paris si le prix du pétrole monte ?

Il y a quand même un hic dans tout cela : si le pétrole est plus cher, la consommation baissera sans qu’on ait besoin de la taxe carbone… !!

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