Dans la presse cette semaine, une heure à lire Charlie Hebdo, et quelques minutes à essayer de comprendre les propos de Madame Royal.
Ségolène, notre Jeanne d’Arc nationale entend des voix. À propos de la Guadeloupe, elle a imaginé le pire, la guillotine. Tout va se « terminer mal (sic) », comme « en 1789 » ! (l’humanité, 23/02/89 ). N’ayez pas peur madame, l’histoire ne repasse pas les plats. Dans trois ans votre altesse Royal ne sera pas guillotinée pour « trahison ». Les sans-culottes retiendront un autre chef d’accusation.
Du panache ! Cavanna à propos du procès pour antisémitisme gagné par Siné, dans Charlie Hebdo. « J’estime que nous devrions nous réjouir de voir un confrère de notre bord échapper à un genre de censure qui porte la presse à l’hypocrisie ». Génial, chapeau, du grand Cavanna… Mais pourquoi ne pas l’avoir dit plus tôt ? Pourquoi si tard ?
Dans Direct Matin (04 /03/09), une question d’une journaliste à Alain Juppé : « Vouloir des immeubles qualitatifs en termes de développement durable et vouloir la mixité sociale, dans un contexte économique difficile, n’est-ce pas poursuivre deux objectifs contradictoires ? » Parce que d’après cette journaliste, les pauvres n’ont pas le droit à des appartements de qualité ? Nous avons envie de demander à monsieur Juppé si être journaliste et être intelligent, ce n’est pas contradictoire.
Dans Marianne du 28 février Hortefeux : « la patronat doit comprendre que l’effort doit être partagé en temps de crise ». Pendant les périodes de croissance le ministre leur laisse-t-il la totalité des bénéfices ? On ne le saura pas.
Alors que Newsweek titre sur « We are all socialist now », Charlie Hebdo fait sa couverture sur « la tentation du protectionnisme ». Protectionnisme de protection, « l’action, le fait de protéger, de défendre quelque chose, quelqu’un » dit le Robert qui ne trompe jamais. Jusqu’ici on pouvait écrire que Val, directeur de Charlie Hebdo, était devenu libéral, tendance MEDEF. Après cette couverture, on peut se demander si la rédaction n’adhère pas aux valeurs de leur patron.
Un portrait de Valérie Pécresse dans ELLE (28/02). « Il y a plus de dix ans qu’elle trace sa route, loin des journaux people… ». Loin des journaux people, pas de chance, dans ELLE, notre ministre cohabite avec Sean Penn, elle partage la même page que Brad Pitt, Jennifer Aniston et autres peoples. Souhaitons lui que sa route ne s’arrête là pas pour autant.
Le JDD (01/03/09) aligne les portraits de certains fonctionnaires qui pantouflent. Trois sur huit ont été nommés par des socialistes. Que veut nous dire le journal de Lagardère ? Les socialistes aussi ne sont pas exempts de critique. C’est gentil de nous le rappeler, à entendre Montebourg on l’oublierait. Mais si c’est pour museler l’opposition, c’est moins glorieux.
« Ségolène (…) connaît bien les DOM (…) Mais je pense que ce n’est pas à elle d’aller, en tant qu’ancienne présidente de la République, rencontrer des hommes et des femmes qui sont dans la rue » Matine Aubry, le 18 février sur France Inter, cité par Libération (27/02/09). Ségolène Présidente de la République ? Libération aurait aimé. Ségo devra se contenter d’être une ancienne candidate. Ce n’est pas déshonorant.
Il n’est pas bon d’être un ami du journal de la gauche tarama. Le Nouvel Obs (26/02) après avoir lâché BHL, abandonne Val en rase campagne. Sur une page entière « Une histoire de Charlie Hebdo » signée par Cavanna, et pas un mot sur notre ami Val. Le directeur de Charlie n’est pas cité une seule fois. Même Bakchich n’aurait pas osé.
Au moment où « Libération allume les feux de détresse », « Agnés Touraine (…) a elle aussi annoncé au conseil de surveillance du 10 février qu’elle mettait fin à son mandat de présidente, considérant sa mission comme « accomplie ». (Stratégie du 19/02/09). Que faut-il comprendre des déclaration des cette dame ? La mission accomplie, c’est la mort du journal dont elle assurait la présidence.
Dans Libération du 2 Mars « le ministre britannique au Commerce a prévenu hier que l’opposition « idéologique » à la privatisation partielle de la poste britannique, Royal Mail, risquait de précipiter une victoire des conservateurs ». Il faudrait dire à ce monsieur que l’« idéologique » n’est pas une maladie.
« Deuxième idée reçue sur 1929 : la chute du commerce international, le retour au protectionnisme. Pas du tout. C’est l’effondrement du crédit qui a entraîné l’effondrement de la production, lequel a fait chuter les échanges internationaux, qui se sont effondrés du tiers entre 1931 et 1933. » Ce n’est pas Emmanuel Todd. C’est de l’Oncle Bernard, et c’est pour ce genre d’analyse qu’on a du mal à abandonner la lecture de Charlie Hebdo.
Philippe Val, cette semaine : « Internet est l’égout idéal ou circule toute cette pourriture ». La phrase est belle. Mais est-ce vrai ? Nous ne serons vraiment convaincus que lorsque nous aurons rencontré Philippe sur Internet.
Bernard Maris ne démontre strictement rien et ne fait qu’afficher un crédo. C’est clairement contre productif.
Si vous vouliez lire la même chose en plus limpide, il suffisait de lire la chronique de Vittori dans les échos il y a pas loin d’un mois.
Et il démontre, lui, que la causalité de l’effondrement des échanges avec les lois protectionnistes est plus que douteuse, d’autant qu’en 2009 ils se sont déjà effondrés alors qu’aucune législation notable n’a encore été adoptée (on passera sur le blocus des jouets chinois par l’inde). Et là, les chiffres sont on ne peut plus nets, notamment les variations de 20 à 30% du frêts containers ou vrac en décembre, janvier, février.
Comme quoi, on peut toujours se passer de lire charlie.
Sur Siné et Siné Hebdo, une autre analyse récente, parue sur Le Grand Soir, corrobore la thèse de Caricatures et caricature.
Il en résulte que la vraie bonne raison d’acheter Siné Hebdo, c’est de tailler des croupières à Charlie Hebdo, de jouer Siné contre Val, de participer à la vengeance du réprouvé, à un règlement de comptes privé en arguant de la dérive idéologique de Charlie Hebdo. […]
Lire ici : « Siné Hebdo, un nouveau-né borgne et ridé. »
Ce qui m’intéressait n’était pas tant l’opposition Charlie vs. Siné Hebdo que les commentaires de Bertrand Rothé sur le Charlie Hebdo de cette semaine, en particulier ce commentaire sur la une qui est loin d’être argumenté.
J’aurai dû également citer ceci.
Il s’agit de faire le lien entre le nombrilisme de Sarkozy et le protectionnisme dont il fait preuve dans ses mesures pour soutenir les entreprises de l’automobile, tout cela sur fond de scatologie. Riss présente le président de la République comme un contorsionniste particulièrement efficace, capable de faire le tour de lui-même. Le contorsionniste manipule son propre corps pour mieux faire illusion.
Le dessin de Riss est une charge qui vise à montrer les contradictions de Nicolas Sarkozy, plutôt qu’un élan incontrôlable et incontrôlé en faveur du libre-échangisme, comme vous semblez le penser. Il y a quelques semaines, Charlie Hebdo avait tenté de démontrer les risques de dérives nationalistes engendrées par le sur-protectionnisme, sur le mode de la caricature. Il n’a jamais été question, en revanche, de chanter les louanges du « libre-échangisme à la sauce bruxelloise ». Ou alors trop subrepticement pour le modeste lecteur que je suis. (Rassurez-vous, quand on lit Philippe Val ou Oncle Bernard, s’agissant d’Europe, on sait à quoi s’attendre. Faut pas prendre les enfants du bon Dieu pour des canards sauvages et les lecteurs de Charlie Hebdo pour des grands naïfs « à genoux » etc.)
« Le débat protectionnisme contre libre-échangisme est fondamentalement piégé. » Comme tout choix binaire.
Et pour faire bonne mesure :
Notons tout de même les limites du dessin qui finalement réduit sa critique à un raisonnement très basique : « le protectionnisme de Sarkozy = de la merde » sans chercher à expliquer quels intérêts peuvent être servis par ce protectionnisme, sans dire d’ailleurs que toute aide directe aux banques et aux entreprises s’apparente à du protectionnisme, maladie largement partagée par les Etats occidentaux actuellement.
Il est amusant de voir publié ce dessin des semaines après l’annonce de ces mesures protectionnistes et après que certains Etats européens les aient critiquées justement comme protectionnistes, obligeant Sarkozy à justifier ses mesures. Charlie Hebdo se targue de commenter l’actualité, mais cette fois avec un peu de retard…
Certes, Cavanna se réjouit — sans doute à juste titre —, mais pourquoi ne pas citer aussi la fin de sa chronique ? (Peut-être parce que Bakchich fournit du contenu à Siné Hebdo dirait une mauvaise langue ?)
Je suis heureux que Siné échappe à la condamnation, je le dis, je serais encore plus heureux si son journal ne cultivait pas la haine personnelle contre Charlie Hebdo comme un fonds de commerce.
À lire intégralement ici : http://charlieenchaine.free.fr/?breve213.
« Jusqu’ici on pouvait écrire que Val, directeur de Charlie Hebdo, était devenu libéral, tendance MEDEF. Après cette couverture, on peut se demander si la rédaction n’adhère pas aux valeurs de leur patron. »
Cette diatribe serait plus convaincante si l’interprétation que vous faites de cette une n’était pas légèrement biaisée. N’oublions pas qu’il s’agit d’une caricature et qu’elle se lit de façon peut être un peu plus subtile, par exemple, comme le propose le blog Caricatures et caricature.
Le dessin de Riss joue du ressort scatologique. La solution géniale de Sarkozy, le protectionnisme, solution « qu’on peut trouver chez nous », n’étant autre que « de la merde ». Le plaisir qu’à Sarkozy à se flairer le derrière fonctionne comme une métaphore de l’absurde. Le dessinateur tient à se démarquer, comme d’ailleurs la grande majorité des journalistes, du protectionnisme que bien des économistes présentent comme une solution bien pire que le libre échange.
À lire : le Match Charlie / Siné Hebdo du 4 mars 2009.
« C’est de l’Oncle Bernard, et c’est pour ce genre d’analyse qu’on a du mal à abandonner la lecture de Charlie Hebdo. »
Rien à ajouter ;-)
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