1969. De Gaulle ne veut pas offrir le lit de la Présidence à son rival Pompidou. Quoi de mieux que manipuler quelques clichés grivois de la femme du broussailleux Georges.
Il n’y a que le talent de Serge Gainsbourg pour nous enfiévrer du mirage que 69 ait été une année érotique.
Francis Zamponi, lui, ne s’y est pas trompé. Le journaliste et romancier fait paraître 69, année politique, en clin d’œil à une époque trop souvent observée par le rétroviseur d’un certain conformisme. Qui trempe dans l’ouate de la commodité historique : héritage de Mai 68, libération des mœurs, maoïsme et autres « ismes », Woodstock, premier homme sur la Lune et j’en passe. Le spécialiste des questions de police et de défense préfère taper en pleine poitrine. D’une affaire française à la quinte de toux persistante. Au plus haut sommet de l’Etat, entre De Gaulle, Pompidou et les renseignements français. Comme si tout cela conservait une étrange force d’actualité.
1969 donc. Quelques mois après les « événements » qui ont mis le pays en ébullition, la lutte fait rage dans le clan gaulliste. Le général voit pulluler les candidats à sa succession. Georges Pompidou se voit déjà en haut de l’affiche.
C’est dans ce contexte qu’éclate l’affaire Markovic, du nom d’un garde du corps d’Alain Delon, retrouvé assassiné quelques mois avant le retrait de De Gaulle. Bientôt, des photos circulent : on y verrait Mme Pompidou en tenue légère au côté du dandy yougo. Dans des positions pas très catholiques qui provoquerait une crise cardiaque à tante Yvonne. La rumeur se propage, l’emballement gagne les cercles gaullistes et une partie de la SDECE (ancienne DGSE) prépare la machination. Pour faire mijoter à feux doux les ambitions du rival aux épais sourcils. Elle échouera avec fracas puisque le « petit professeur », comma aimait l’appeler ses détracteurs, sera finalement élu.
L’œil du lecteur suit un ancien des services secrets qui comparait devant une juge d’instruction pour des faits qui le lie à ses pratiques de barbouze. 40 ans auparavant, année du complot politique. Le roman, qui retrace cet épisode charnière d’une lutte sans merci où tous les coups sont permis, jouit d’une fluidité de lecture amorcée par des dialogues frappant de justesse. Dont la frontière fiction/réalité est sciemment voilée. De quoi élargir le spectre de la réalité historique.
Autrement érotique, dans les jupes de la République.
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