En janvier 2009, le conseil général de la Somme commande une exposition de dessins, puis décide de l’interdire. Le catalogue est paru.
Cette affaire avait fait du bruit, à l’époque. Mais malgré l’émoi suscité dans les grands titres de la presse nationale, rien n’y fit. Ce qui est d’autant plus inquiétant. Quelle affaire ? Trois fois rien, celle d’une censure bon teint, corollaire d’un ordre moral qui ne dit pas son nom, abattant ses foudres sur quelques œuvres d’art jugées pas comme il faut.
En janvier 2009, le conseil général de la Somme commande une exposition, puis décide de l’interdire, onze jours avant son vernissage. L’intitulé de la chose, « Pour adultes seulement », laisse assez bien deviner de quoi il s’agit. Or le titre est trompeur. Car de pornographie tous azimuts, de sexes défouraillés, de femmes ouvertes et en couleurs, il n’est point question. Ici, on a demandé à vingt-cinq illustrateurs pour la jeunesse et à un affichiste de renom de placer quelques-uns de leurs dessins érotiques. Ce qui a sans doute dû déplaire en haut lieu, c’est la juxtaposition des mots « jeunesse » et « érotiques ». En réalité, ces dessins traitent de façon sensible et poétique la sexualité de nos amis les humains. Et encore.
À bien regarder le catalogue de cette expo fantôme, qui regroupe 31 des dessins interdits, on se demande bien ce qui a pu passer par la tête des censeurs. Indécents, ces dessins ne le sont jamais. Vulgaires, encore moins. Ils sont même à mille lieux de cette représentation quotidienne du corps – essentiellement celui de la femme –, sur les milliers d’affiches publicitaires, spots télévisés, clips vidéo auxquels il est difficile d’échapper. L’association des bibliothécaires de France a décidé de publier l’objet du scandale. Un acte de résistance.