Le Président de la République voulait liquider Mai 68. C’est raté. Les plus jeunes de ses partisans préfèrent célébrer l’événement. Ils se sont réunis mercredi dernier, au quartier latin, bien sûr, avec André Glucksmann pour procéder à l’inventaire de la révolte étudiante. Non sans nostalgie pour une époque qu’ils n’ont pas connue.
L’affaire a commencé par un mail adressé à une cinquantaine de bloggueurs d’influence (ou considérés comme tels) – en fait, le top 50 des blogs référencés par le site Wikio. Une invitation à venir débattre de cette angoissante – et urgente – question : « Faut-il liquider l’héritage de Mai 68 ? ». Banal. Presque de saison.
A ce détail près que le courrier électronique émanait des jeunes de… l’UMP. Si, si, le parti dont le candidat, devenu depuis Président, affirmait justement qu’il fallait liquider Mai 68.
Question que la victoire du dit candidat avait, croyait-on, définitivement tranchée. Au moins dans cette famille politique. Et voilà que la jeune garde de l’UMP rouvre le débat. Sans prendre de gants. L’invitation précisait qu’il s’agissait là « d’une occasion unique de discuter et de débattre de « l’esprit de Mai » dont nous fêtons cette année le 40ème anniversaire ! »
« Fêter l’esprit de mai… » Et puis quoi encore ! Besancenot n’aurait pas dit mieux. Belle brochette d’hérétiques que voilà. Cela méritait bien que Bakchich aille voir à quoi ressemblait cette 5ème colonne du bolchévisme international.
D’autant que le responsable de la communication des jeunes UMP avait commis une singulière bourde en envoyant son mail. Ce novice a tout bonnement oublié d’occulter l’ensemble des adresses des bloggueurs… Du coup, l’impair a suscité un buzz d’enfer autour de la réunion. Certains antisarkozystes patentés promettant de venir porter, vertement, la contradiction dans la réunion.
Il n’en fut rien. Mais le spectacle était au rendez-vous. Glucksmann père (André) et fils (Raphaël), dans un duo inattendu d’où il ressortait, en gros, que Sarkozy était le fils spirituel de Cohn-Bendit – voilà qui réjouira les intéressés. Un discours empreint de nostalgie – ah, on se marrait plus en ce temps-là, hein, André… – émaillé de questions, parfois hallucinées, de la salle ; certains intervenants ayant visiblement mal digéré leurs notes de lectures. Et une étonnante étude comparée de la sexualité des générations, à quarante ans de distance.
Drôle d’assistance d’ailleurs. Si l’on était au pays de la jeunesse bien née et pas trop colorée, on était loin, en revanche de pénétrer dans le temple du sectarisme. L’auteur de ces lignes se vit d’ailleurs accueilli par un… lecteur assidu de Bakchich, très inquiet de la santé financière du site, et grand amateur des articles consacrés à… Rachida Dati. Par respect pour l’avenir politique de ce subversif, nous tairons son nom – d’autant qu’il a promis de s’abonner. Faudrait pas trop tarder, d’ailleurs, jeune homme…
Pour tout dire, quelques trotskystes auraient dressé une barricade dans la rue adjacente – commémoration oblige, la réunion se tenait dans un bar branché du quartier latin -, qu’il n’eût pas été étonnant de voir une bonne partie de la relève sarkozyste se lever pour aller les rejoindre. Juste pour s’encanailler. Juste pour humer le parfum défendu de la lacrymo. Que voulez-vous, c’est bien beau d’être le parti du président, mais on s’emmerde un peu. Moi, je serais Patrick Devedjian, je m’empresserai de remettre tout ce petit monde au pas, scrogneugneu !
Glucksmann est grotesque, mais il faut l’excuser, il est devenu gâteux.
Nietzsche parlait du nihilisme, Glucksmann en est un bel exemplaire, lui qui était parti (sur une fausse route) pour déboulonner les "maîtres-penseurs", tout ce qu’il a réussi à montrer contre les maîtres et les penseurs, c’est l’absence de pensée, la sienne, et que celle-ci ne l’empêche pas de parler ni de se croire malin alors que pour dire des choses pareilles il a pas dû se creuser longtemps . Nul et décevant.
Benjamin Lancar, qui s’adresse à la salle à la fin de la vidéo, est le président d’UMP Grandes Ecoles. La façon dont il est brièvement présenté dans ce reportage pourrait laisser penser qu’il est président des Jeunes Populaires, ou encore que l’initiative "40 ans après…" émanerait de la branche jeune de l’UMP.
Il n’en est rien. "40 ans après…" est une opération de l’UMP Grandes Ecoles, mouvement à la croisée des Jeunes et de l’UMP, qui ne rassemble que l’élite de l’élite de ces jeunes bien nés.
D’ailleurs pour l’anecdote, le torchon brûle entre jeunes et grandes écoles, les seconds souhaitant s’emparer de la présidence des premiers, présidence qui rappelons-le sera mise en jeu en septembre prochain. La concurrence sera féroce et nous promet de jolis cafouillages encore en sarkozie.
"40 ans après… est une opération de l’UMP Grandes Ecoles, mouvement à la croisée des Jeunes et de l’UMP, qui ne rassemble que l’élite de l’élite de ces jeunes bien nés"
Ce mouvement a-t’il un but à long terme ? Comme par exemple faciliter la naissance d’une sorte de "Skull and Bones" français ?