Finie la présidence de l’Union, Sarkozy doit désormais écouter les recommandations de Berlusconi, Brown et Merkel quant à la politique européenne.
Le 22 février, le G4, c’est-à-dire les quatre pays de l’Union européenne membre du G20, c’est-à-dire du groupe des vingt pays de référence sur le plan économique au niveau mondial – vous suivez toujours ? – se sont réunis à Berlin afin de définir leur position pour la réunion d’avril du G20 en question.
Pour la France, la réunion a constitué une accumulation de déconvenues. Nicolas Sarkozy avait demandé dans un premier temps qu’elle se prolonge en une réunion de la zone euro avec comme ordre du jour une réflexion sur le problème que posent à la zone les pays fortement endettés à savoir en ce moment principalement la Grèce et l’Italie. Dans ce dernier pays la dette publique représentera fin 2009 110% du pays, ce qui en fait un des pays les plus endettés du monde. Berlusconi prend cette situation avec distance. Depuis que le cours de la livre s’est effondré, la production italienne, valorisée sur la base du taux de change constaté sur le marché est supérieure à la production anglaise… Certes, le déficit budgétaire italien pourrait atteindre 4% du PIB en 2009, mais Berlusconi souligne à qui veut l’entendre que celui de la France sera de 5% et celui de la Grande Bretagne de 9%. À Rome, on le proclame haut et fort, l’homme malade de l’Europe, ce n’est pas l’Italie, c’est le Royaume-Uni…
Pour Sarkozy, s’occuper de la zone euro en proclamant son désir de venir en aide aux Italiens et aux Grecs paraissait particulièrement avantageux. Il pensait ainsi renouer avec les dossiers européens de fond, attitude qui lui avait valu un surcroît de popularité l’automne dernier. Et la France n’étant pas en première ligne, cela lui permettait de ne pas paraître acculé à l’action. Seulement, voilà, les Allemands se sont refusés à jouer ce jeu. D’abord, la présence des Britanniques sur les sujets concernant l’euro commence à les agacer. Ils ont gardé un mauvais souvenir du G4 d’octobre dernier où la BCE et le Trésor britannique se sont entendus pour mener le jeu alors qu’ils considéraient que c’était à eux que revenait cette mission. Ensuite, Mme Merkel veut à tout prix réduire le nombre de sommets pendant lesquels elle est obligée de supporter Sarkozy. Résultat à Berlin, on n’a parlé que de la réunion du G20 d’avril et ce, le plus brièvement possible.
Têtu, Sarkozy est revenu à la charge, insistant sur le fait que les Italiens avaient proposé en octobre de créer un Fonds européen récupérant une partie des dettes publiques des pays les plus endettés comme l’Italie, la Grèce, le Portugal ou encore l’Irlande. Le but de cette opération de réduction des dettes publiques de certains pays serait double : elle permettrait d’alléger le coût sur les budgets de ces pays des versements d’intérêt ; surtout, elle permettrait de rapprocher leur niveau de taux d’intérêt de celui de l’Allemagne. En 1999, au tout début de l’euro, il y avait une différence entre les taux grec et allemand à long terme de 0,2 points. Aujourd’hui, on est à plus de 2 points …Sarkozy a donc repris cette idée devant Mme Merkel jusqu’au moment où il a découvert que maintenant les Italiens défendaient une autre idée : autoriser la BCE à prêter directement aux Etats en difficulté, ce que le traité de Maastricht interdit pour l’instant. A la grande et désagréable surprise de Sarkozy, le ministre allemand des Finances a fait savoir qu’il en avait discuté avec son ami et homologue italien et qu’il fallait réfléchir à comment amender le traité de Maastricht sans en trahir l’esprit.
Sidéré de cette connivence germano-italienne, ayant à peine pu échanger trois mots avec un Gordon Brown de plus en plus dépressif, Sarkozy est rentré de Berlin avec la terrible conviction que l’Europe comme moyen de bluffer les Français, c’était fini…
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