Enquêter sur les fraudes au budget européen, renforcer la coopération entre les Etats membres et contribuer à l’arsenal législatif : une mission difficile pour l’OLAF.
A parcourir la dixième édition du rapport d’OLAF, l’Office européen de Lutte Anti Fraude (cf. document ci-dessous) on serait tenté de croire que l’Union Européenne dispose de l’arme absolue contre toutes les formes de fraude à l’éligibilité et à l’usage des milliards d’euros qu’elle distribue. D’abord aux États membres, et dans une moindre mesure, au titre de son « action extérieure », à tous les bénéficiaires de la générosité européenne dispersés sur tous les continents.
Impression hélas trompeuse. Fort d’un effectif de 500 personnes sous la direction –intérimaire depuis janvier 2010- de Nicholas Ilett, et d’un budget de fonctionnement de 57 millions d’euros en 2009, OLAF peine à remplir sa triple mission.
Il est vrai qu’enquêter sur les fraudes au budget européen à l’intérieur et à l’extérieur des institutions de l’Union, renforcer la coopération entre les états membres pour combattre la fraude et enfin contribuer à mettre en œuvre des politiques anti-fraude et des initiatives législatives, n’a rien d’une sinécure dans un monde ou la cupidité ambiante exacerbe les appétits, à commencer par celui du crime organisé.
Thierry Cretin et Ian Walton, les adjoints opérationnels d’Ilett sont à la peine ; faute de temps et surtout de moyens humains suffisants, un grand nombre de décisions prises par l’OLAF consiste trop souvent…à ne rien faire et à classer l’affaire sur laquelle ils ont obtenu un signalement : ainsi en 2009, sur 740 décisions prises, 220 seulement ont abouti à l’ouverture d’un dossier d’enquête.
Le cas le plus problématique demeure celui des multiples arnaques dans le domaine des fonds structurels. Une manne de 347 milliards d ‘euros à répartir de 2007 et 2013 qui attire toutes les convoitises, et destinée à combler les handicaps économiques « structurels » des régions les plus pauvres. Où comme chacun sait, prospèrent les organisations mafieuses. Comme l’indiquait Nicholas Ilett au journaliste de BoIJ (Bureau of Investigative Journalism) il y a peu, « le plus grand défi pour moi consiste à déterminer comment avoir l’impact maximum avec les 20 et quelques enquêteurs que je peux dédier au secteur des financements structurels ». Une confidence qu’il se garde bien de divulguer dans la version 2010 du rapport de l’Office, de crainte, sans doute, qu’il ne tombe entre des mains ennemies.
Sur le nombre d’enquêtes en cours, le rapporteur de l’édition 2010 souligne : « A fin 2009, 369 enquêtes d’OLAF étaient en cours de réalisation, dont 354 dans l’Union et 15 dans des pays candidats à l’entrée ( !). Une part significative des enquêtes internes à l’Union concerne un nombre réduit de pays : Belgique, Bulgarie, Italie, Allemagne, France (où 22 enquêtes sont en cours) et Roumanie. Cela n’implique pas nécessairement que d’avantage de fraudes sont commises dans les pays où OLAF a ouvert le plus d’enquêtes. Une coopération plus étroite avec les autorités locales peut aussi conduire à d’avantage de signalements à l’Office ».
On relève également que les informateurs de toutes sortes - le plus souvent des entreprises ou des individus ayant un rapport quelconque avec la fraude présumée- sont à l’origine de 46% des signalements. Une proportion qui se maintient d’année en année depuis 2005. De plus, 27% des informations concernent des accusations qui n’entrent pas dans le champs des compétences de l’Office et « sont transmises, quand cela est nécessaire, vers les autorités compétentes »…
Eric Woerth s’adressant à Mme Bettencourt : "Madame, vous allez avoir une enquête de l’Union européenne… !".
Mme Bettencourt : "Si c’est l’OLAF, je n’ai rien à craindre. L’argent que j’ai touché de l’Europe est déjà parti dans les enveloppes… !!".