Le vieux continent frémit à l’idée de voir la France de Sarko Ier - et sa politique économique insolite - prendre la tête de l’Union.
Tandis que l’on se réunissait à Versailles pour parachever l’adoption du Traité européen simplifié de Lisbonne selon un processus auquel personne ne comprend rien, à Bruxelles, on commence à s’inquiéter de ce que sera la présidence française de l’Union européenne.
Jean Claude Juncker, le président de l’Eurogroupe, répète de façon systématique que la France ne fait rien pour redresser ses finances publiques, au point que cela devient un problème. Ce faisant, il reflète l’opinion des autres partenaires européens de la France. En particulier des Allemands. Ces derniers sont en train de se persuader que l’hostilité caricaturale de Paris à la BCE (banque centrale européenne) et le refus de faire un geste même symbolique en matière de finances publiques traduit plus fondamentalement une volonté de provocation qui risque de rendre tout progrès dans la construction européenne impossible.
D’autant que s’ajoutent à cette dimension économique des positions politiques qui intriguent et irritent Berlin. Le soutien ostensible à une éventuelle candidature de Tony Blair à la nouvelle présidence de l’Union européenne, le maintien du discours fumeux sur l’Union euro-méditerranéenne sont autant de positions jugées de plus en plus inadmissibles par les Allemands.
Résultat, à Bruxelles, il est admis que le « couple franco-allemand » est désormais une fiction et que Paris, une fois terminée l’affaire du Traité constitutionnel grâce à l’adoption du traité de Lisbonne, va s’enfermer dans une attitude assez systématiquement négative sur tous les dossiers économiques. Deux personnes paraissent incarner dans cette situation une certaine retenue et la poursuite des ambitions européennes françaises de naguère : Pierre Sellal, l’ambassadeur auprès de l’Union, et Jean Pierre Jouyet, le secrétaire d’Etat aux Affaires Européennes.
Dans ce contexte, ce qui inquiète le petit monde bruxellois, c’est que ces deux hauts fonctionnaires venus du landernau socialiste - Sellal fut directeur de cabinet de Védrine et Jouyet directeur adjoint de celui de Jospin - sont donnés sur le départ après la présidence française. Autre européen historique sur la sellette, Michel Barnier. Atterré par la remise en cause unilatérale des quotas de pêche par Nicolas Sarkozy, il reprend à l’envi une formule qu’il affectionne : « la France n’est pas grande quand elle est seule ». Quand on sait qu’il l’avait utilisée la première fois contre Villepin, son prédécesseur au Quai d’Orsay, lors d’une conférence des ambassadeurs, on mesure son évolution dans l’opposition au « sarkozysme européen ».
Les plus europhiles de la majorité présidentielle voient dans les dérives anti-européennes de Sarkozy son éloignement des dossiers les plus techniques pour des raisons liées à la complexité de sa vie privée et leur prise en main par Henri Guaino, dont l’euro-scepticisme est bien connu.
En fait, il y a probablement une dimension plus forte qui est le fait que Nicolas Sarkozy ne supporte pas de ne pas pouvoir tout trancher lui-même du fait des contraintes européennes. Il a acquis le pouvoir et le partager lui semble anormal, surtout si c’est avec les eurocrates. D’où l’équilibrisme de Jouyet et Sellal, tandis que le déficit budgétaire de 2008 est annoncé maintenant comme risquant de dépasser les 3% du PIB.
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