Pourquoi Nicolas Sarkozy est encore revenu, hier à Versailles, sur la réforme des collectivités territoriales ? Et cela malgré l’opposition de nombreux élus UMP.
Pour la première fois depuis 1848, le président de la République s’est adressé directement aux parlementaires (députés et sénateurs), réunis hier en Congrès à Versailles. « Nous irons au bout de la réforme des collectivités locales », a promis Nicolas Sarkozy. « Nous ne nous déroberons pas devant la réduction du nombre des élus régionaux et départementaux, nous ne nous déroberons pas devant le problème de la répartition des compétences ». Et de conclure le chapitre, par ces mots : « Nous irons jusqu’au bout de la réforme de la carte administrative ».
De quoi conduire à la mise en place des conseillers territoriaux, comme le préconisait, un an plus tard, en mars 2009, le rapport Balladur, avec la fusion des élus régionaux et des élus généraux. Manière aussi d’inscrire son nom au cœur de l’histoire de France, comme Napoléon l’avait fait, en 1800, avec la mise en place des départements…
Cette volonté d’entamer une réforme du millefeuille administratif n’est pas nouvelle chez Nicolas Sarkozy. Il y a un an, en juin 2008, à Limoges, le chef de l’État s’était montré très clair sur ses intentions de réformer les « structures territoriales ». « Il va falloir qu’un jour – je me demande si ce ne sera pas un chantier pour 2009 –, on parle des structures territoriales en France. Parce que nous sommes arrivés à un degré de complexité sans précédent ! Comment on s’y retrouve ? », s’était interrogé le chef de l’État.
Moins de six mois plus tard, lors de son discours de Toulon, Sarkorzy en avait remis une louche. « Le moment est venu de poser la question du nombre des échelons de collectivités locales dont le nombre et l’enchevêtrement des compétences est une source d’inefficacité et de dépenses supplémentaires ». Avant d’ajouter : « J’assumerai mes responsabilités sur la diminution des effectifs et sur la réforme des échelons territoriaux français. Cela fait trop longtemps qu’on en parle, maintenant on va agir, on va décider ».
Le sujet est pourtant politiquement glissant – un parlementaire sur quatre est aussi conseiller général ou régional – pour un gain limité : cette réforme n’est pas la priorité des Français en ces temps de crise et reste techniquement difficile à appliquer. Cerise sur le gâteau, elle est loin de faire l’unanimité au sein de la majorité, puisqu’elle revient à demander à des milliers d’élus locaux d’accepter la suppression de leur siège.
Face à ce « big bang » territorial annoncé, les sénateurs ont déjà fait valoir leur opposition. Une commission de 36 sénateurs, présidée par Claude Belot (UMP), vient de publier un rapport qui se veut très clair sur la question : refus de toute suppression de mandat et d’échelon territorial, aucune création de conseillers territoriaux qui remplaceraient les conseillers généraux et les conseillers régionaux.
Le président du Sénat, lui-même, Gérard Larcher, ne cache pas à ses visiteurs son intention de se faire le porte-voix des réticences des parlementaires. Si son prédécesseur, Christian Poncelet, avait l’habitude d’exécuter toute demande de réforme élyséenne, Larcher, lui, revendique son indépendance par rapport au Château. Et juge la compression du nombre des élus locaux tout bonnement inconcevable. De quoi affaiblir sa cote à l’Élysée…
Malgré ces embûches, Sarkozy tient coûte que coûte à sa réforme. Manière d’envoyer un message à son électorat : les réformes se poursuivront jusqu’à la fin de son mandat et l’explosion des déficits publics n’est que temporaire. « Avec cette réforme des collectivités, on recherche plus d’efficience, plus d’économie, une simplification de l’organisation en la rendant plus compréhensible aux Français », commente le sénateur UMP, Philippe Marini. « Aujourd’hui, on a des niveaux d’administration territoriales qui se chevauchent et qui font des doublons. » Sur son blog, il y a quelques jours, le sénateur Jean Arthuis se faisait encore plus clair : « La perspective d’un déficit global de nos finances publiques supérieur à 120 milliards d’euros, soit 6% du produit national, doit faciliter notre prise de conscience et nous aider à surmonter toutes les tentations d’immobilisme ».
En un mot, les élus, à commencer par les sénateurs, n’ont plus qu’à être d’accord. S’ils ne le sont pas, ils devront présenter de solides arguments. « Des nuls », a l’habitude de trancher Nicolas Sarkozy, quand députés ou sénateurs ne votent pas les textes comme un seul homme.
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Et alors ?
C’est quoi le problème avec cette réforme ?
La désorganisation administrative française est tellement caricaturale que j’aie toujours soupçonné la Loi de « décentralisation » de 82 de n’être qu’une manip’ des Jacobins pour mieux se régaler de l ’échec de la démarche trente ans après.
Ha il a bon dos l’idéal républicain…
"Manière aussi d’inscrire son nom au cœur de l’histoire de France, comme Napoléon l’avait fait, en 1800, avec la mise en place des départements…"
C’est curieux, j’ai toujours cru que les départements avaient été créés en 1789 par la Constituante…
Bien sûr que non !
Lisez n’importe quel texte de l’époque révolutionnaire, vous y verrez les départements. Ils datent de 1790. Lettres patentes du Roi, données à Paris le 4 mars 1790 : "Louis, par la grâce de Dieu, & par la Loi constitutionnelle de l’Etat, ROI DES FRANCOIS : A tous présens & à venir ; SALUT. L’Assemblée Nationale, après avoir entendu les Députés de toutes les provinces du Royaume, a décrété, les 15 Janvier, 16 & 26 février dernier, & Nous voulons & ordonnons ce qui suit : La France sera divisée en quatre-vingt-trois Départemens. (…)"
Ce que Bonaparte (en 1800 et non Napoléon) a fait c’est de mettre en place le corps préfectoral. C’est à dire qu’il a soumis les instances départementales élues au pouvoir politique central…