Dans trois mois, la nouvelle direction du PS affrontera son premier test électoral : les européennes. Et le pari n’est pas gagné ! Première étape aujourd’hui : les militants votent pour valider ou non les listes des candidats.
Pas une mince affaire, encore, pour le Parti socialiste, ces élections européennes de juin prochain. La constitution des listes a déjà été source de tensions internes. Depuis une semaine, une fronde s’est organisée autour du sénateur-maire de Lyon, Gérard Collomb, également partisan de Ségolène Royal, contre les listes concoctées par la direction. En cause : un jeu de chaises musicales qui a écarté des listes du Sud-Est, le poulain de Gérard Collomb. Le sénateur-maire a donc haussé le ton… mais il n’est pas le seul puisque plus de 600 élus socialistes ont signé sa pétition. « Les listes qu’on nous présente ont été élaborées par quelques camarades de la direction, souvent juge et partie », tiquait, il y a quelques jours, Gérard Collomb sur son blog.
Au poulain de Collomb dans la région Sud-Est, Thierry Philip, la direction a préféré Vincent Peillon. Pas de chance ! Le ségoléniste aurait préféré rester dans le Nord-Ouest… région que le député européen représente aujourd’hui au Parlement européen de Strasbourg ! Tout comme le fabiusien, Henri Weber, désormais parachuté dans le Centre. Mais la politique a ses raisons que la raison ne comprend pas… Martine Aubry voulait placer quelques proches, comme Gilles Pargneaux, dans le Nord-Ouest.
Résultat des courses : les déçus comme Peillon - qui a peu habilement parlé de « crève cœur » - et Collomb, qui ne s’est pas fait que des amis dans l’histoire, ont gagné des nouveaux surnoms : le « malgré nous » pour le premier, « Gégé, la colère » pour se second. Les bonnes traditions ne se perdent pas, rue de Solferino !
La direction du PS, elle, dément toute cuisine politique. « On verra que ces listes qui ont été approuvées à 93% par le conseil national du parti sont justes », se défend Christophe Borgel, secrétaire national aux élections, « qu’elles sont diverses et qu’elles respectent la parité ». Avant d’ajouter : « Honnêtement, les Français attendent de nous que nous soyons rassemblés en ces temps de crise et que nous cessions ces chamailleries ». Au moins, sur cette question aubrystes et royalistes partagent-il la même analyse…
Hier, sur France Inter, Ségolène Royal a elle aussi dénoncé les « zizanies indécentes » au sein du Parti socialiste au regard de la crise. L’ex-candidate à la direction du PS a d’ailleurs souhaité qu’elles « se terminent rapidement » pour que le PS obtienne « le meilleur score possible ». Aux dernières européennes de 2004, les socialistes avaient obtenu 28,9% des suffrages… un très bon score. Mais encore faut-il parvenir cette année à faire aussi bien. Et là, les socialistes sont assez sceptiques.
Même si au final, les listes devraient être approuvées par les militants ce jeudi 12 mars, l’affaire laissera quelques traces. « La déstabilisation de la campagne du PS n’est pas un acte anodin », a prévenu dans un courrier adressé aux contestataires, Jean-Christophe Cambadélis, membre de la direction du PS. Il faut dire que l’Europe reste un sujet sensible au PS. Il y a quatre ans, en 2005, la question du projet de Constitution européenne avait divisé les socialistes et participé à leur affaiblissement, avant la présidentielle de 2007.
Dès lors, sans poser la question institutionnelle, les socialistes aborderont la campagne par l’angle économique et social, en s’appuyant sur le Manifeste su Parti socialiste européen (PSE), signé par les leaders des partis socialistes et sociaux-démocrates. « La crise sera au cœur de la campagne car elle est au centre de la vie des Français », décrypte Christophe Borgel. La campagne s’annonce vigoureuse… « Il nous faut réinscrire la crise dans le clivage gauche/droite », ajoute Guillaume Bachelay, secrétaire national à l’Industrie. « Le piège que tend Nicolas Sarkozy, c’est de faire croire qu’il n’y a pas d’autre solution possible à sa politique, que la sienne ». Sacré Sarko !
« Pour la droite », ajoutent Borgel et Bachelay, « la crise est un phénomène conjoncturel, un éphiphénomène grave. Pour la gauche, il s’agit d’une d’un problème structurel qui remet en cause le système et qui rend nécessaire une autre politique » L’Europe à gauche toute, donc, pour le PS. Selon Guillaume Bachelay, « le score du PS aux européennes dépendra de la capacité à poser la question de la crise. Si le PS tient un discours mi-chèvre mi-chou, on laissera de la place aux autres ». Comprendre : le NPA d’Olivier Besancenot, le Parti de Gauche de Jean-Luc Mélenchon associé au Parti communiste de Marie-George Buffet, LO d’Arlette Laguiller, les Verts avec le tandem Daniel Cohn-Bendit-José Bové… Selon une enquête Ifop-Paris Match rendue publique mardi 17 février, l’extrême-gauche éclatée totaliserait 16% des intentions de vote (8,6% en 2004), derrière le PS (23%) et l’UMP (26%), mais derrière le MoDem de François Bayrou (14,5%).
Et s’il n’y avait que ça… Reste encore pour le PS à surmonter le problème de l’abstention pour des élections européennes qui déplacent rarement les foules. Et le résultat des partenaires du PS au Parlement européen pour parvenir à constituer ou non une majorité. Faites vos jeux, rien ne va plus…
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