On hésite entre le pathétique ou le risible. Aujourd’hui à 18h, le conseil national du parti se réunit à Paris. L’enjeu : la confirmation de Martine Aubry au poste de Premier secrétaire.
Bon alors c’est qui la patronne du PS ? Selon un décompte proclamé, samedi 22 matin vers 5 heures du matin par la direction du parti socialiste et à l’issue d’une nuit de rumeurs et d’intox, la maire de Lille devançait Ségolène Royal de 42 voix, sur 134.784 suffrages exprimés, soit 0,03%. Rendez-vous compte 42 voix… Ça commençait déjà mal pour départager deux candidates…
Et pourtant, ce n’était rien à côté de la « bordélitude » qui allait suivre, pour reprendre l’expression utilisée par un strauss-kahnien à Reims. Car Ségolène Royal et ses partisans allaient aussitôt parler d’erreurs et de tricherie, appelant à une action de la justice et à un second vote des militants. Ce qu’a clairement refusé Martine Aubry.
Tout le week-end, on a donc eu le droit à une bataille de chiffres censée témoigner, d’un côté comme de l’autre, de la légitimité de la démarche. Dans ce contexte, s’est engagée une belle partie de ping-pong. D’un côté, le lieutenant de Royal, Manuel Valls a pointé « des irrégularités, de la triche » dans le Nord, assurant que son équipe allait en appeler à la justice pour « faux en écriture ». De l’autre, la fédération socialiste de Lille - fief d’Aubry - a répondu par le dépôt d’une plainte en diffamation contre le député-maire d’Évry.
« Et bien nous voilà arrivés à un point de non-retour », commente amer un militant socialiste très actif dans la vie du parti. Avant de lâcher, ironique : « Au moins, tout le monde sait que le PS n’a jamais été aussi transparent… » Comprendre : chacun sait dans le parti que la triche existe ! D’ailleurs, l’ancien ministre de l’Intérieur, Daniel Vaillant, chargé de présider les travaux de vérification a expliqué qu’il n’était « pas question d’arriver à une comptabilisation incontestée. On n’a pas refait les totaux, on n’est pas là en comptables ». En clair, un peu plus, un peu moins, qu’est-ce que ça change ? Ça a le mérite d’être clair !
Selon le camp Royal, des problèmes ont été signalés dans une quarantaine de fédérations : des cases mal cochées, des cartes d’identités et du parti non demandées à l’entrée, des procès verbaux bizarrement remplis. Jean-Pierre Mignard, l’avocat de Royal et patron de Désirs d’avenir, estimait, hier, son pessimisme « devant l’ampleur du travail et devant l’ampleur de la collecte des documents à réaliser ».
Dans le camp Aubry, le son de cloches était un tantinet différent. « Pour nous tout va bien », lançait hier Christophe Borgel, proche de la maire de Lille. Avant d’ajouter : « Les seuls résultats pour nous, ce sont ceux qui ont été communiqués à 5 heures du matin samedi et qui donnent Martine Aubry en tête avec 42 voix ». De quoi remettre un peu d’huile sur le feu face aux ségolénistes… Surtout que dans le même temps, les présidents socialistes de huit régions ont apporté leur soutien à la maire de Lille : François Bonneau (région Centre), Jean-Paul Huchon (Ile-de-France), René Souchon (Auvergne), Daniel Percheron (Nord-Pas de Calais), Claude Gewerc (Région Picardie), Laurent Beauvais (Basse-Normandie), Martin Malvy (Midi-Pyrénées) et Alain Le Vern (Haute Normandie).
Bon et maintenant ? « C’est lamentable », soupire un élu socialiste qui préfère, comme beaucoup en ce moment, ne pas être cité. Il continue : « ce week-end, les élus socialistes qui étaient sur le terrain se sont fait cracher à la figure par des gens qui sont excédés par nos petites histoires. “Vous êtes même pas capables de vous entendre entre vous”, nous lancent nos électeurs qui sont de plus en plus confrontés à la crise et qui attendent des réponses de notre part. Nous, qu’est-ce qu’on fait pour eux ? Rien. On a lâché notre électorat ».
Dans cette bouillie de plus en plus grande, devant laquelle la droite, le centre et l’extrême-gauche se délectent, le PS a réuni hier une « commission de récolement ». Pour ceux qui auraient été sur la planète Mars depuis un mois, ce terme ne laisse pas entendre que les socialo vont jouer à un collage géant pour rapprocher les pro-Aubry et les pro-Royal - même l’utilisation effrénée de la glue ne le permettrait plus aujourd’hui - mais exprime une sorte de « tribunal administratif » interne au parti.
En somme, cette commission présidée par Daniel Vaillant - proche de Lionel Jospin et Bertrand Delanoë - avec l’assistance de deux secrétaires nationaux, Bruno Le Roux et Kader Arif, a dû examiner un par un les procès verbaux contestés. Pour ne pas rajouter de crise à la crise, chaque camp - Aubry, Royal, Hamon - était dûment représenté au sein de cette instance. À regarder de près : des « anomalies » en Guadeloupe, Moselle, Nouvelle-Calédonie ou encore à Lille. Et si cette commission ne prenait pas en compte les « remarques » du camp Royal, François Rebsamen, soutien de l’ex-candidate à la présidentielle a menacé de saisir la justice et d’appeler à une manifestation devant le siège du PS. Clair, l’ultimatum.
Ce soir, le conseil national - l’équivalent du parlement du parti - devra se prononcer sur le rapport remis par la commission de récolement. Une instance dans laquelle Ségolène Royal est minoritaire, puisque la majorité de ses membres a été désignée proportionnellement aux résultats du vote du 6 novembre sur les motions.
La fête, salle de la Mutualité à Paris, risque fort de tourner au vinaigre ce mardi. Car l’enjeu est de taille et les protagonistes déterminés à aller jusqu’au bout pour défendre leur bout de gras : la confirmation ou l’infirmation de l’avance d’Aubry pour le siège du PS avec à la clé un CDD de 3 ans et une possibilité de promotion à l’Élysée. Selon plusieurs membres de la direction du PS, on ne devrait pas s’acheminer vers un nouveau vote des militants - comme le réclamait encore Royal hier matin au nom d’« une question de principes » - pour la simple et bonne raison que les militants comme les élus de fédérations en ont assez. Trois votes en quinze jours, ça commence à bien faire… surtout vu le résultat.
Si Aubry est confirmée après décision du conseil national, que fera Royal ? Et si Royal est proclamée vainqueur, que fera Aubry ? Étant donné la situation du PS depuis plusieurs mois, on hésite entre l’implosion, la production en chaîne de poupées vaudou avec ses dix aiguilles ou l’hystérie collective. Reste l’issue heureuse : les socialo se remettent au boulot. « Personne n’a intérêt à laisser imploser le parti », raconte un élu, « mais il est clair qu’il va être ingérable et que nous allons le payer aux élections européennes ». Dès lors, certains avancent déjà l’idée d’un nouveau congrès du PS après le scrutin de juin 2009, avec une simplification des modes de désignation du Premier secrétaire.
Face au spectacle de cette division qui n’en finit plus, un membre de Solférino, se lamentait hier : « pour être socialiste en ce moment, faut vraiment être con ». Avant de conclure : « D’ailleurs, moi j’ai arrêté de le faire. À la dernière présidentielle, j’ai voté Bayrou ». Les socialistes ne sont pas sortis de l’auberge !
À lire ou relire sur Bakchich :
Pourquoi pas 2… PS ?..
Deux PS… se répartissant moitié moitié les biens… les recettes fiscales… comme les militant(e)s ?
Deux PS… l’un dirigé par la dame du Nord et les éléphants… l’autre par la dame de Poitou-Charente et ses partisans…
Aucun conflit… Le Ps.1 pourra ainsi re-désigner JOSPIN… en 2012… Le Ps.2 re-désignera vraisemblablement ROYAL…
Deux sûretés valent mieux qu’une… Deux PS valent mieux qu’un !.. n’est-ce pas ?
Que ces 2 ps se partagent équitablement les biens et surtout… les énormes recettes prélevées par les Impôts… et vivent leurs vies !
Ce serait UN VRAI CHANGEMENT… n’est-ce pas ?