Nicolas Sarkozy, qui s’exprime sur le Grand Paris aujourd’hui, se veut lyrique et consensuel. Sauf que demain, quand on parlera de gros sous, on ne parlera plus d’amour.
« Tu as rudement bien bossé, Jean Paul, il faut qu’on y aille ensemble » Et aussi : « Vraiment Bertrand, nous devons unir nos forces ».
Lorsque, la semaine dernière, Jean-Paul Huchon, Bertrand Delanoë et le ministre des Transports, Christian Blanc, étaient reçus ensemble à l’Elysée, Nicolas Sarkozy et Claude Guéant se sont voulu apaisants.
Terminées les escarmouches entre Christian Blanc et la Région Ile-de-France. Tout le monde, il est formidable.
Le plan de mobilisation pour les transports de Jean-Paul Huchon est juste une perfection. Et le projet pharaonique de Blanc sur la boucle de140 kilomètres de métro sécurisés sur l’ensemble de l’Ile-de-France tout aussi génial. Trop cher ? On raccourcira un peu le « 8 » qu’avaient dessiné les services du ministère du Transport et on grignotera peut être un peu sur les réseaux dessinés par la Région.
Reçus hier mardi en fin d’après-midi par Claude Guéant, quelques journalistes triés sur le volet ont entendu le secrétaire général de l’Elysée évoquer les budgets mis sur la table par le chef de l’Etat : 35 milliards d’euros au total. Soit vingt et un pour le projet Blanc et 14 pour « le réseau secondaire », mis en oeuvre par la Région et la ville de Paris. Au diable l’avarice !
A l’Elysée, on en frémit d’avance. Le discours du Président n’est pas au raz des pâquerettes. Sarko veut imprimer sa marque, réinventer la cité, être au rendez vous de la ville monde ! Mixité, modalité, solidarité, le Parisien, va-t-il annoncer, gagnera une demie heure de transport par jour. Il faut aller vite, un projet de loi sera présenté dans les deux mois.
Finies les querelles théologiques sur la gouvernance du grand Paris. « Je ne comprends rien à toutes ces constructions », lâche Nicolas Sarkozy en privé. Et dans le discours qu’il prononce aujourd’hui, il ne doit annoncer que l’établissement d’un organisme ad hoc. Sans plus de précisions. Et encore, assure-t-il, en préservant les structures actuelles.
L’heure est au rassemblement. D’autant que les sénateurs planchent, au sein d’une commission de travail, sur ces sujets de réforme des collectivités locales et certains ont fait savoir en haut lieu que, s’il y avait une annonce le mercredi 29 sur ce sujet, ils se fâcheraient très fort. Or pour le gouvernement, ce n’est pas le moment, entre Hadopi et loi hospitalière, de chatouiller le Sénat.
Le Président est heureux. « On va rattraper en dix ans ce qui n’a pas été fait en vingt ans », aime-t-il répéter à ses visiteurs. Quel plaisir de recevoir des architectes comme Roland Castro ou Jean Nouvel, les chouchous du Château. Roland Castro avait déja été la coqueluche de François Mitterrand et des socialistes, au début des années 80, quand la gauche prétendait encore rénover les banlieues et détruire les tours, aux Minguettes ou ailleurs. Et voici Castro tète de gondole à nouveau à l’Elysée. Un éternel retour !
L’Etat n’a pas encore versé, avanceront les esprits chagrins, les six milliards d’euros qui représentent sa contribution au plan des transports de la Région (ligne 13, RER A) ? Le gouvernement, promet le Président en privé, compte bien aider les élus locaux : subventions, taxations sur les plus values financières ou les mètres carrés de gares, création d’un « VT » (Versement de Transport). Lorsqu’on aime, on ne compte plus. Et tant pis pour la hausse du niveau des prélèvements obligatoires, qui revient à chaque campagne électorale dans le programme de l’UMP.
Quant au projet Blanc, les 21 milliards d’euros ne sont pas encore sur la table. Le ministre est parti frapper à la porte des qataris, mais sans succès.
En fait, il se dit que ses 140 kilomètres de métro sécurisés devraient être financés par un des fameux Partenariats Publics Privés (PPP), cette formule géniale qui laisse des groupes privés emprunter aux banques pour financer l’investissement public. D’où une économie apparente pour le budget de la Nation. Sauf que l’Etat s’engage, dans ces concessions de service public new look, à verser une annuité pour couvrir les frais de fonctionnement et couvrir une partie des intérêts de l’emprunt. Dans cette économie mixte, façon libérale, mieux vaut avoir les meilleurs avocat de la place. Pas sûr que nos vieux ministères puissent rivaliser avec Vinci, Bouygues et consorts.
De ces mesquines polémiques, il ne sera pas question aujourd’hui. Ne boudons pas notre plaisir, le Président est heureux.
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Paris, le jeudi 29 avril 2009 – 03:12 MYSTIFICATION ! En tout cas pour une partie du discours de Sarkozy. Si vous avez pu écouter et être attentifs, vous aurez observé que de nombreuses parties du discours de Sarkozy sur le grand Paris pour ce qui était du droit de la culture pour tous, étaient tirées de l’interview qu’a accordé Carla Bruni à « La Tribune & Moi », il y a environ un peu plus de 10 jours. Extrait : Carla Bruni-Sarkozy l’avait annoncé depuis plusieurs mois ; elle voulait, en qualité de première dame de France, lancer une fondation et mettre son nom au service d’une cause caritative. Après son soutien à la lutte contre le sida, elle a annoncé en mars, la création d’une fondation en faveur de la culture et de l’éducation. Est-ce un hasard ? Non. Explications en exclusivité dans le journal sorti en kiosque. Mais voici le lien qui vous permettra de lire le début de l’interview : Entretien avec Carla Bruni-Sarkozy http://www.latribune.fr/tribune-moi/people/20090424trib000370065/entretien-avec-carla-bruni-sarkozy-.html
Réécoutez le discours, lisez l’interview et vous comprendrez comment Sarkozy peut mystifier le peuple.