Le procès Stern déballe mou

La cour d’assises de Genève juge à partir de ce mercredi Cécile Brossard, accusée d’avoir tué de quatre balles, le 28 février 2005, son amant, le milliardaire Édouard Stern, 50 ans. Sauf rebondissement toujours possible, il ne s’agit que d’une tragique histoire de cul qui a mal tourné, comme Bakchich l’a écrit. Le couple était un fervent adepte des pratiques sado-masochistes.

On a souvent parlé de complot et de contrat, mais aucune enquête un peu sérieuse, aucun ouvrage n’ont pu en apporter la moindre preuve. Il aurait été absurde de faire exécuter le banquier Édouard Stern par sa maîtresse attitrée depuis quatre ans ! Cécile Brossard, particulièrement fragile, alterne les séjours en hôpital psychiatrique depuis le meurtre.

© Oliv’

Les « amis » d’Edouard et de Cécile

Et puis, il existe une règle non écrite en Suisse (comme à Monaco) : on peut se livrer sur son territoire à tous les trafics, à une condition : ne pas tuer. Cela effraie les happy few. Sauf quelques rares exceptions, cette règle est en général respectée. Pour faire disparaître Édouard Stern, un « accident », lors d’une de ses parties de chasse en Afrique, aurait été plus logique.

En revanche, c’est vrai que tout ne devrait (normalement) pas être déballé au procès. C’est le deuxième volet du dossier. Le couple n’avait pas l’habitude de s’envoyer en l’air à deux. Il invitait des « amis ». Édouard Stern, l’ancien propriétaire de la banque Stern, vendue à la Société de banque suisse (SBS), ne manquait pas de candidats pour partager sa couche et ses fantasmes.

Cécile Brossard, très bien organisée, avait l’habitude de tout enregistrer. Les quelques journalistes présents en décembre 2007 lors de la première audience publique devant la chambre d’accusation de Genève, ont eu un aperçu de ce que pouvait donner un grand déballage. Toutes les précédentes audiences s’étaient déroulées à huis clos.

Le nom de Pascal Bruckner

A cette occasion, Cécile Brossard, les cheveux blonds mi-longs lâchés, est apparue engoncée dans une doudoune blanche. «  Elle n’est manifestement pas une oie blanche, même si elle s’est présentée devant vous dans cette couleur », lâche Daniel Zappelli, le procureur général de Genève.

Suit l’énumération de certaines pratiques sexuelles plutôt débridées. Ne propose-t-elle pas une partie fine à Gérard S., un journaliste parisien de droite assez connu, de faire l’amour avec un hermaphrodite ? Cécile Brossard lui assure que « ce serait le pied ».

Quant aux photos de Madame R., une femme du monde, pour ne pas dire du grand monde, sur une chaise gynécologique, on peut imaginer qu’elles feraient grimper l’audimat de certains sites Internet pas très regardants au niveau de la morale.

Même le nom du philosophe Pascal Bruckner est sorti dans la presse suisse. « C’était une curiosité pour moi. Le monde de Cécile Brossard était un monde interlope que j’avais un peu fréquenté quand j’étais étudiant », se justifie l’auteur de La tentation de l’innocence.

Les mœurs de personnalités parisiennes

Il s’est donc passé un miracle : malgré les conditions particulièrement atroces de l’exécution d’Edouard Stern (Cécile Brossard lui loge une quatrième balle dans la tempe alors que le banquier est au sol), la jeune femme n’est plus poursuivie pour assassinat mais pour crime, ce qui « coûte » beaucoup moins cher.

De plus, l’expert psychiatre Jacques Gasser conclut à une responsabilité très légèrement diminuée : en clair, c’est 25 % de peine en moins. Comme par miracle, la plupart des personnalités tricolores citées dans le dossier ont été oubliées. Elles ne sont pas citées comme témoins. Ce n’est jamais très plaisant de justifier ses pratiques sexuelles devant la presse internationale (une cinquantaine de journalistes assistent au procès).

Pascal Maurer et Alec Reymond, les deux défenseurs de Cécile Brossard, plaident le crime passionnel. S’ils parviennent à convaincre le jury populaire, leur cliente s’en tire avec 8 ans de prison. Comme elle en a effectué déjà la moitié, elle serait bientôt libérable… et rapidement expulsée de Suisse puisqu’elle est Française.

L’affaire Rhodia enterrée

Marc Bonnant, l’avocat de la famille Stern, estime qu’une condamnation pour meurtre tout court « permet d’infliger une peine suffisamment sévère pour garder sa part symbolique », soit entre 10 et 20 ans.

Enfin, il existe bien un troisième volet dans le dossier Stern, qui n’a pas encore été véritablement exploré. Des commissions rogatoires sont bien parties de France après la mort d’Édouard Stern. Toutes les armoires et les tiroirs du banquier, à son domicile comme dans ses bureaux, ont été vidés. Les enquêteurs s’intéressent notamment à l’affaire Rhodia, et à l’incroyable déconfiture de cette entreprise de chimie, créée en 1998 par le géant pharmaceutique Rhône-Poulenc.

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