Depuis sa disparition, il y a un an, Philippe Séguin s’est découvert des tas d’amis et de fils spirituels. Même le Front national revendique une part de son héritage, c’est dire !
Comme le duc de Guise – et bien qu’il n’ait pas été assassiné –, on dirait qu’il est plus grand mort que vivant. Un an après sa disparition, le 7 janvier 2010, Philippe Séguin est partout. Pas un discours ou presque dans lequel l’ex-président de la Cour des comptes, ancien président de l’Assemblée, ex-ministre, ancien député des Vosges et ex-maire d’Épinal ne soit cité. François Fillon reconduit à Matignon ? On lit dans les journaux qu’il est « le fils spirituel » de Séguin, ce qui est peut-être un peu excessif. Le même Fillon lance une consultation sur la dépendance ? Il « imite » Séguin, instigateur, en 1986, des états généraux de la Sécurité sociale. Un haut fonctionnaire est nommé à un quelconque poste ? Il ne manque pas de souligner dans sa biographie qu’il a « débuté » auprès de Philippe Séguin, qu’il l’a « côtoyé » et que, bien sûr, il continuera de s’en « inspirer ».
Pleurant sur la situation financière de leurs collectivités locales, présidents de conseils généraux et régionaux, de droite et de gauche, exhument régulièrement une petite phrase de l’ex-président de la Cour des comptes critiquant le rôle de l’État.
« Séguin était d’accord avec moi », dit régulièrement Arnaud Montebourg. « Le regretté Philippe Séguin », glisse le socialiste François Brottes dans sa réponse à François Fillon, l’autre semaine à l’Assemblée. Séguin ? « Un très grand talent qui n’a pas eu de destin », soupire Pierre Moscovici, qui craint peut-être de connaître le même sort. Un homme de la trempe de Jacques Chaban-Delmas, ajoute la ministre Nathalie Kosciusko-Morizet.
Dès que le débat en vient à l’Europe, l’euro ou les égarements de Bruxelles, il se trouve toujours un gaulliste nostalgique pour rappeler le discours anti-Maastricht de Séguin à l’Assemblée. Même Marine Le Pen veut sa part d’héritage : « Comme le disait avec un certain humour Philippe Séguin, s’est-elle exclamée il y a quelques semaines, l’UMP et le PS sont les détaillants d’un même grossiste : l’Union européenne ! »
Les milieux du foot ne sont pas en reste et la Fondation du football, dont il était le président, va décerner des Trophées Philippe Séguin du fair-play. En 2016, quand l’Euro se déroulera en France, on rappellera qu’il en fut le grand artisan. Et pour que la nostalgie soit totale, on peut même acheter sur le site eBay un carton de remerciements pour les voeux de 1998, signé de Philippe Séguin. Coût : 35 euros. Pas sympa de se faire de l’argent sur le dos d’un mort.