Une édition pas follement excitante, mais 2 bonnes surprises, un doc sur Jim Morrison et District 9.
A Paris, j’ai eu du mal à obtenir mon accréditation pour le 35e festival de Deauville. « Qu’est-ce que Bakchich veut faire sur le festival ? » A ton avis ? Un reportage sur les danses folkloriques normandes ? Une enquête sur les hôtels Lucien Barrière (quoique) ? Est-ce que le Public Système, qui organise le festival, serait chatouilleux depuis le petit papier de Bakchich sur les coulisses de cette boîte de com’ et d’événementiels ? Arrivé à Deauville, je me dirige vers le C.I.D, centre névralgique du festival, aiguillé par de gentils cerbères à oreillettes (« Vous ne pouvez pas passer par là », « Faites le tour », « C’est fermé »), je parviens à récupérer : 1 : Mon badge. 2 : Le programme du festival.
Et là, déception. Où sont les films ? Si les stars sont à Venise, dans le désordre, Viggo Mortensen, Matt Damon, Julianne Moore, Eva Mendes, Nicolas Cage, Charlize Theron, Oliver Stone ou encore Michael Moore, les films ne sont pas non plus dans la station balnéaire normande. Alors, porque, se demande le lecteur de Bakchich, angoissé au plus profond de son être ? Tout d’abord, à cause de la stratégie des grands studios. Depuis quelques années maintenant, les grosses machines américaines sortent durant l’été et simultanément dans le monde, pour éviter le piratage. Les distributeurs ont également compris que le Français moyen pouvait avoir envie de voir un blockbuster en été. Le festival de Deauville, inventé pour faire durer la saison touristique 15 jours de plus, entre le 1er et le 15 septembre, se retrouve maintenant sans gros film. Cette année, ce sont des titres comme L’Age de glace 3, Harry Potter et le prince de sang mêlé, Là-haut, Transformers 2 : la Revanche, Public Enemies ou Very Bad Trip qui ont échappé au festival.
Si Deauville a perdu les grosses machines de l’été, le festival est également orphelin des bons films qui préfèrent faire un petit tour à la Mostra de Venise ou à Toronto. Ainsi, cette année, pas de The Road, d’après Cormac McCarthy, simplement un des films les plus attendus de l’année, pas de The Men who stare at Goats, gros délire avec George Clooney, ni de Bad Lieutenant 2 avec Nicolas Cage, pas de Capitalism : A Love Story, le nouveau Michael Moore, ni de Survival of the Dead de George A. Romero ou encore Life during Wartime de Todd Solondz. On en est là… En désespoir de cause, le festival de Deauville joue maintenant la carte du cinéma indépendant (est-ce que cela veut dire quelque chose à Hollywood ?) et cherche tous les ans le nouveau Little Miss Sunshine ou tout autre « feel good movie », comme on dit chez les Ricains.
Je critique, je critique, néanmoins, dès mon arrivée, je me prends deux belles claques. Tout d’abord avec le doc When You’re Strange : A Film about the Doors. Cinéaste de fictions épatantes comme Ça tourne à Manhattan, Tom DiCillo réalise un doc sur Jim Morrison et sa bande, constitué intégralement de bandes d’époque, des images époustouflantes, pour la plupart jamais vues. Il montre un Jim Morrison pour le moins contrasté, tour à tour poète, rebelle, bouffon, roi du marketing, génie, junkie incontrôlable… Trop de succès, de filles, de dope, le Roi lézard finira bien sûr dans le décor, à savoir, au fond d’une baignoire à Paris, le 3 juillet 1971, à l’âge de 27 ans. Pour son premier doc, Tom DiCillo a tout bon. A travers la destinée de quatre mômes des années 60, il nous fait revivre une incroyable page de l’histoire américaine, avec en toile de fond la guerre du Vietnam, la lutte pour les droits civiques et l’émergence du mouvement hippie. C’est sublime ; on en reparlera lors de la sortie, en 2010.
L’autre baffe du jour, c’est Neil Blomkamp, 29 ans, qui me l’inflige. Venu du clip et de la publicité (la pub avec la Citroën-Transformer, c’est lui), Blomkamp signe son premier long-métrage, District 9, un film de SF malin et excitant. Le pitch ? Une soucoupe volante géante dégueule 1,5 millions d’aliens sur Johannesburg. Les immigrés du troisième type sont parqués dans un ghetto, genre Soweto. Bientôt, l’employé falot de la société privée qui doit procéder au transfert des extraterrestres dans un nouveau camp va subir une étonnante métamorphose. Tourné comme un documentaire, District 9 accumule les scènes drôles, flippantes, ultra-spectaculaires, et ce pendant 110 minutes. On en reparle le 16 septembre…
Deux films excellents en une seule journée : Deauville pas mort ! Ce n’est pas le cas de Simon Berryer, alias, Sim, qui vient de casser sa pipe à l’âge canonique de 83 ans. Tout à coup, je me sens un peu triste…
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