Plus combatif que jamais, Michael Moore s’attaque au libéralisme économique dans une Amérique transformée en dictature. Un doigt dans le fondement du capitalisme. Bien profond.
- J’aime bien Michael Moore, sa casquette crado, son jean XXL, sa façon candide de mettre les pieds dans le plat, comme une porcelaine dans un magasin d’éléphants.
Moi, je l’aime d’amour, car il ne se proclame absolument pas comme le pourfendeur du système et déclare benoîtement « Je veux réaliser des films que vous ayez envie de voir avec votre copine le vendredi soir. En plus, je vous raconte deux ou trois choses déconcertantes. » Pourtant, Michael le pamphlétaire commence à lasser la critique française qui a brocardé sa mauvaise foi de belle-mère et boudé son dernier film, "Sicko".
Faut dire que sa vision de la sécu française laisse songeur…
On l’a affublé de tous les maux. Moore manipule, simplifie, fait pleurer Margot et gagne du pognon. Quelle horreur ! Mais qui d’autre que lui gueule, bastonne, gratte là où cela fait mal. Depuis vingt ans, Moore dénonce inlassablement le capitalisme sauvage, la connerie de Bush (qui l’a traité de « gros tas de graisse ») ou le système de santé américain. Il est le caillou dans la chaussure, l’empêcheur d’enculer en rond, un homme capable de faire perdre son sang-froid aux cons et aux puissants grâce à l’arme ultime, sa caméra.
Bon, c’est quoi son nouveau pavé ?
Avec "Capitalism : A Love Story", Moore fait parler la poudre et se penche sur les dégâts causés par le libéralisme économique et la main mise des entreprises sur notre vie. Depuis Ronald Reagan, le rêve américain s’est métamorphosé en cauchemar. Le capitalisme est devenu un Moloch qui dévore ses enfants-ouvriers, un monstre qui a plongé des millions de gens dans la crise et qui s’est fait renflouer à coups de milliards de dollars par l’État pour mieux recommencer.
OK, mais c’est pas très nouveau tout ça.
Comme à son habitude, Moore fait le clown. Il déboule à Wall Street en fourgon blindé, entoure les plus grosses banques d’un ruban jaune estampillé « Crime Scene », veut faire une arrestation citoyenne du patron de la banque et gueule dans son mégaphone. Plus didactique, il nous refait l’histoire de 50 ans du capitalisme américain, et balance des trucs insensés. Tu savais que certaines des plus grosses boîtes US souscrivent des assurances-vie sur le dos de leurs employés et qu’ils touchent l’argent quand ceux-ci décèdent [1] ? Tu savais que toutes les sept secondes, une maison est saisie par les banques et une famille d’Américains se retrouve à la rue ? Tu savais qu’Henry Paulson, ancien président de la banque Goldman Sachs et secrétaire américain au Trésor de George Bush, a exigé 700 milliards de dollars pour sortir les banques du marasme qui lui ont d’abord été refusés, puis concédés grâce aux… Démocrates. Un véritable « coup d’état financier ».
Moore assure donc que les États-Unis ne sont plus une démocratie ?
Exactement et il exhorte le spectateur à prendre les armes. Tu vois un seul réalisateur en France qui ferait un truc pareil ?
Pas vraiment.
"Capitalism : a Love Story" de et avec Michael Moore.
En salles depuis le 25 novembre
[1] Pour en savoir plus, une visite s’impose sur deadpeasantinsurance.com