Comme 2009, 2010 nous a réservé son lot de très belles surprises, signées en grande partie par de jeunes réalisateurs ou même des cinéastes débutants. Etonnant, non ?
Dans Tokyo, Gaspar Noé filme les errances de l’âme d’un petit dealer qui refuse de quitter le monde. Avec ce film-trip, hanté par le 2001 de Kubrick, Noé nous plonge dans un au-delà cinématographique, un monde hypnotique de sensations, de chocs, de sexe et de drogues. Le film est trop long, parfois bêtement provo, mais même en l’état, c’est meilleure virée dans le continent cinéma de l’année.
Takeshi Kitano revient au film de yakuza et fait un carnage. Un sublime objet de mise en scène, un enfer géométrique où des personnages interchangeables maculent d’hémoglobine la toile du peintre Kitano.
Emmené par Mads Mikkelsen, un groupe de Vikings découvre l’Amérique et la mort. Un chef-d’œuvre barbare, hypnotique et expérimental du réalisateur de la trilogie Pusher et Bronson.
Comment la guerre transforme les hommes en bêtes sauvages. Tourné comme un film de fiction, un documentaire exceptionnel sur une escouade de soldats danois en Afghanistan. Choc !
Destination émotion avec deux poids lourds de Cannes. Le miracle Beauvois, son meilleur film, sur massacre des moines de Tibhirine. Et le voyage au bout de la nuit d’Iñarritu, où Javier Bardem, qui s’offre la performance de l’année, tente d’assurer l’avenir de ses enfants avant de mourir.
Pour son premier long-métrage, le couturier Tom Ford fait vibrer la pellicule, cite Douglas Sirk ou Wong Kar-waï et transforme l’ectoplasmique Colin Firth en un comédien magnifique, justement récompensé à Venise.
Dans la jungle thaïlandaise, un homme accompagné de fantômes s’engage dans son dernier voyage. Du cinéma hypnotique, immersif, magique. Une des plus belles Palmes de Cannes. C’est beau une jungle la nuit…
Inspirée d’une histoire vraie, la cavale d’un escroc génial, incarné par le grand Jim Carrey, prêt à tout pour retrouver l’homme de sa vie. Le premier film, sensible et imparable, des scénaristes de Bad Santa.
Le dernier tour de piste d’un chanteur de country paumé et alcoolo. Un Oscar ultra-mérité pour Jeff Bridges, incroyable d’humanité, son meilleur rôle depuis The Big Lebowski.
Une succession de cascades débiles et dangereuses, de scènes dégueulasses et régressives. A consommer en relief et pour la première fois en France dans une salle où le public communie en hurlant de dégoût et de rire. Du très bon mauvais goût…
Des bons films, il y en avait un paquet d’autres en 2010. En vrac, Fantastic Mr Fox, film d’animation drôlement élégant ; l’incroyable adaptation de la BD Kick Ass ; Mammuth, pour la résurrection du colossal Gégé ; Faites le mur !, le doc hilarant de Banksy ; The Social Network, qui confirme que Fincher n’est pas seulement l’homme du tic et du toc ; Scott Pilgrim, un drôle d’objet pop ; We are Four Lions, l’humour contre la connerie des terroristes ; A serious Man, comédie mélancolique des frères Coen ; l’hypnotique White Material de Claire Denis ; l’épileptique Green Zone ; Cellule 211, thriller espagnol électrisant ; L’Arbre, au charme envoûtant ; Anvil, un des meilleurs films sur le rock ; Buried, un exercice de style claustro ; L’Elite de Brooklyn, polar crépusculaire ; City of Life and Death, une œuvre magnifique et anxiogène sur le massacre de Nankin.
La reprise de l’année : Le Narcisse noir
Simplement un des plus beaux films du monde, dans une copie miraculeuse.
Les plus beaux plans de l’année :
La scène du lac des cygnes des Hommes et des dieux, le travelling d’ouverture d’Outrage de Kitano et la caméra qui s’élève doucement lors de la partie de pêche de Jeff Bridges et Robert Duvall dans Crazy Heart.
Les révélations de l’année
Jesse Eisenberg dans The Social Network, Thomas Dekker dans Kaboom, Aaron Johnson vu dans Kick Ass ou Nowhere Boy et la sublime Carey Mulligan, vue dans Une éducation et la suite de Wall Street.
« Je vais repeindre mon lino avec le jus de tes couilles ! » Yolande Moreau dans La Meute.
A l’année prochaine !
Enter the Void : un objet filmique de poseur inculte, prévisible dans toute sa laideur racoleuse, dont le titre siérait aussi bien aux derniers "Kitano" (mais pour d’autres raisons…).
En revanche, The Ghostwriter, est un chef-d’oeuvre de tristesse géopolitique, la meilleure chose qui soit arrivée au cinoche "assimilé ricain" (et au cinoche tout court) depuis longtemps, et c’est dommage que vous n’ayiez su le voir…
Ecoutez, vous n’allez pas me croire, mais je n’avais pas réalisé que je n’avais choisi que des "petits films".
Mais ne concluez pas trop vite. Ce n’est pas parce que vous avez zéro budget que vous êtes un génie ou parce que vous avez 200 millions de dollars que vous êtes un gros naze. Je juge un film sur ce qu’il est, ce qu’il me fait ressentir, pas sur son budget.
Pour preuve, mon film préféré l’année dernière était Avatar, pas vraiment une série B fauchée ! Et je dois ajouter que j’ai adoré la suite de Tron, que j’ai vu la semaine dernière. Une petite chose à 170 millions de dollars.
Oui, vous avez raison, j’ai oublié Toy Story 3 que j’adore et qui est vraiment un des meilleurs Pixar. Mais aussi Les Petits ruisseaux, avec le génial Daniel Prévost, et l’étonnant Dans ses yeux.
Mais non, Inception ne fait pas partie de mes chouchous de l’année, je m’y suis copieusement ennuyé. Inception = déception !