Chaque année, c’est pareil : l’été, c’est un sac d’embrouilles. Petit inventaire des emmerdeurs et des emmerdements estivaux.
Retournons au Castellet, charmant village du Var, dont nous avons déjà salué les parkings exorbitants. Le Castellet appartient à une catégorie de « curiosités » catastrophiques qui, sur la foi d’une réputation usurpée et d’un éloge suspect dans quelque guide touristique, permet au touriste de gaspiller une journée de vacances : le « village médiéval » - notons qu’un site d’information touristique régional le baptise joliment de « village féodal », ce qui désigne non une époque, mais un régime politique et nous éclaire sur la qualité des rédacteurs de ce site fort bien équipé, d’autre part, en fautes d’orthographe…
Dans un tel village « médiéval », il faut vraiment chercher pour apercevoir du médiéval. Dans ses ruelles que l’on arpente forcément à pied, tout est envahi par des boutiques diverses, dont la décoration n’obéit à aucune règle de modération esthétique : un débordement de bandeaux et de panneaux criards, une avalanche de menus et de réclames, un bric-à-brac étalé sans retenue. Les murs disparaissent jusqu’au premier étage sous ces coulées de lave mercantile, bien malin qui peut les dater et trouver une éventuelle raison de les admirer.
A part la place du château, tout en haut, le village est un foirail, et à part deux ou trois boutiques où l’on peut envisager une possibilité d’artisanat local, toute cette bimbeloterie vient d’on ne sait où. Il y a bien sûr les poteries (pourquoi faudrait-il que tout village médiéval abrite des potiers ? Surtout quand il n’y a pas un gramme d’argile dans un rayon de cinquante kilomètres ?), les bijoux de pacotille, les tas de savonnettes et leur escorte de flacons d’« huiles essentielles » et d’« essence de lavande » (on est en Provence, la lavande est obligatoire), et l’arsenal des nappes et des serviettes de table « ensoleillées » ( ?), l’huile d’olive et les pots de miel de provenance absolument inconnue et invérifiable. Et puis tout le reste, qui déconcerte un peu : une boutique affiche imperturbablement qu’elle vend de « l’artisanat mexicain », comme s’il existait une connexion spirituelle et artistique entre le Var et le Yucatan.
Et puis, il y a le vaste champ de la restauration, snacks avec sandwiches à 5,20 euros, les machines à glaces italiennes qui croupissent en plein soleil, une terrasse ombragée, toutefois, et donc prise d’assaut, et des restaurants dont les menus, globalement, sentent le surgelé : l’un d’eux, qui revendique une « cuisine de spécialités régionales », propose à un prix stupéfiant une préparation de « filet de panga ». Rappelons que le panga est une sorte de poisson-chat élevé au Vietnam, à raison de 300 kilos au mètre cube, qui passe pour être nourri avec les pires déchets et engraissé par diverses hormones. Le poisson favori des cantines bas de gamme. On est à 5km de la Méditerranée à vol d’oiseau… Il ne reste plus qu’à espérer que les enfants n’auront pas faim.
Les enfants, c’est le « cœur de cible » de l’escroquerie estivale. C’est pour les satisfaire qu’on se tape le parc d’attractions de sept attractions dont trois en panne (15 euros par tête plus les gaufres), la piscine avec toboggan à trois cents mètres de la plage (forfait journée : 17 euros, insolation comprise, champignons aux roupettes en prime), le zoo avec douze macaques qui s’enfilent, un lama fatigué, une panthère empaillée et, tenez-vous bien, des chèvres, des lapins et des poules (qui sont devenus des bêtes exotiques pour nos bambins urbains), et, si l’on est en zone maritime, l’inévitable aquarium avec exhibition de dauphins dans un bassin. Au risque de passer pour radin, j’estime que cramer 100 euros à quatre pour ces pèlerinages rituels s’apparente à une extorsion de fonds.
Et pour couronner la journée, je ne saurais trop recommander l’inévitable crêperie bretonne qui, entre deux moules-frites, s’étale insolemment, désormais, sur le moindre site touristique, même à mille kilomètres de la Bretagne (il est vrai que la pizza décongelée au four électrique a, en retour, conquis l’Armor). Qu’on se le dise, au cas où vous ne l’auriez pas remarqué, la crêpe bretonne est une préparation alimentaire dont le prix de revient n’excède pas quelques centimes d’euro, allez, disons, cinquante centimes d’euro avec le sucre ou une pincée de gruyère râpé sur une galette de sarrasin. On peut vous la vendre dix euros sans rougir, ce qui fait cher la bouchée, d’autant plus que le bon sens impose de critiquer fermement les qualités gastronomiques de cette aberration alimentaire (j’ai vu proposer une « crêpe aux merguez », et il faut avertir que la présence de champignons en boîte ne dénote pas une élévation de sapidité remarquable).
Mais si les gosses aiment ça … Disons-le crûment : le grand avantage de la crêpe bretonne (en dehors des marges exorbitantes qu’elle autorise), c’est qu’on peut la fabriquer sans avoir la moindre notion de cuisine, en tirant la pâte d’un bidon et la garniture de quelques conserves, et réaliser ainsi le rêve absolu du « restaurateur » saisonnier : restaurer sans cuisiner.
Dans ces conditions, une fois le porte-monnaie asséché par les villages médiévaux et les crêpes bretonnes, on n’est pas mécontent de rentrer. Et là, je vous ai réservé une surprise : une énorme affiche d’une chaîne d’hypermarchés proclame que « les bons comptes font une bonne rentrée ». La preuve, cette promotion d’un objet indispensable à la rentrée scolaire : une console de jeux Wii, enrichie d’un jeu dont la teneur éducative ne vous échappera pas, puisqu’il s’intitule « The lapins crétins show ». Pas même de quoi apprendre l’anglais. L’objet vaut néanmoins 265 euros : on sait où va partir l’allocation de rentrée scolaire… La fête continue !
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Salut,
Tombée par hasard sur les commentaires du Castellet,reste étonnée par autant de compliments !!! assez sympathique ! Pas de points positifs ?peut etre mal luné ce jour ?dispute avec le banquier ? faites un effort ! regardez mieux ! soyez curieux ! cherchez les créateurs de pacotilles en reprenant vos termes qui travaillent 16hrs par jour pour les réaliser,les artisans qui travaillent le cuir,le boulanger qui travail sur place,avec ses glaces qui fabrique lui meme,ect… Bon, retourne à la création de mes pacotilles, en vous saluant sincerement. clf