C’est le débat à la mode : allons-nous vers une baisse des prix ou sommes-nous menacés d’un emballement qui fera du Zimbabwe où les prix doublent toutes les 12 heures un pays en avance par rapport au reste du monde ?
Pour le moment, l’histoire donne raison à ceux qui craignent la déflation. L’indice des prix en zone euro n’a augmenté en un an que de 0,3% et l’Insee annonce que les indices à venir vont enregistrer une baisse.
Pourtant, la population incrédule continue à se plaindre de la vie chère. Quels sont les prix qui baissent ? Il y a eu ceux des actions. En un an, les bourses mondiales ont perdu 25 000 milliards de dollars de leur valorisation. En France, où depuis les « trois tiers » sarkoziens l’actionnaire n’est plus en odeur de sainteté - fini l’enthousiasme convenu des dirigeants pour le Pea et autre actionnariat populaire -, cela ne fait guère de vague. Mais dans les pays où les retraites sont par capitalisation comme aux Etats-Unis ou en Grande-Bretagne, les personnes âgées vont trinquer, les fameux et si odieux fonds de pension n’ayant fait suer le burnous que pour payer les vieux !
Il y a dans la vie au quotidien l’immobilier. Certes, la crise se traduit pour l’instant plus par un ralentissement du volume des ventes, mais les transactions qui se font le sont à des prix 10% en dessous de ceux de l’année dernière. Et puis il y a dans la consommation courante, les prix de l’énergie et ceux des produits alimentaires. Les producteurs de lait, qui l’année dernière avaient droit à toutes les attentions du Crédit agricole et autres banquiers prêts à leur financer des plans mirobolants d’extension de leur activité, sont maintenant aux abois.
A l’Elysée, cette situation est vécue de façon distante. Pour Sarkozy, la baisse des prix améliore le pouvoir d’achat puisque, pour l’instant, les salaires ne baissent pas. Et pour autant, la population perçoit cela comme quelque chose de favorable. Il est clair que la préoccupation majeure des Français est le chômage et qu’on va pouvoir abandonner toutes les références au pouvoir d’achat qui nourrissaient le débat il y a encore un an. Certes, il y a un effet collatéral désagréable de la déflation sur les finances publiques. L’Etat voit les rentrées de TVA fondre au fur et à mesure que les prix baissent. Entre le ralentissement de l’activité économique, les décisions sur la restauration, les prix qui stagnent, Bercy craint qu’il ne manque en fin d’année par rapport au budget voté à l’automne 20 milliards d’euros de TVA, sans les mesures volontaristes du plan de relance.
Et si, après, l’inflation repartait ? Là, les experts divergent. Ceux qui parlent d’inflation mettent en avant la quantité considérable de monnaie injectée par les banques centrales. Depuis septembre, le bilan de la Réserve fédérale a doublé. Et on prévoit que pour financer l’énorme déficit budgétaire américain, il va de nouveau doubler d’ici à la fin de l’année. Bref, la planche à billets mondiale tourne à grande vitesse. Les plus subtils soutiennent néanmoins que les banques centrales sont techniquement capables de récupérer la monnaie créée, mais que cela aura un prix après la reprise. Comme d’habitude, la BCE sera là pour le faire payer aux Européens quand aux Etats-Unis on mènera de nouveau la politique de la fuite en avant. Il y aura de l’inflation aux Etats-Unis et pas en Europe. Cela va nous faire un euro à deux dollars ! On va encore avoir les dirigeants d’EADS tous les soirs à la télé… !
À lire ou à relire sur Bakchich.info :
En fait, ce n’est pas la vie qui est devenue chère, mais nous (enfin, une vaste majorité d’entre nous) qui sommes devenus pauvres…
Voir « La planche à billet US et l’inflation », par Henry C K Liu : http://contreinfo.info/article.php3 ?id_article=2750