Palais de Justice de Paris, le 13 octobre 2009, onzième jour d’audience. « Tout ça pour ça »…
Fin de l’acte I lundi soir, avec la clôture des débats. Place aux plaidoiries des parties civiles, les conseillers de Clearstream, de Delmas, Martinez, Gomez, Gaubert, Gaydamak, Madelin, Hortefeux, Ambiel, Plenel, Baudis, Squarcini, Martini, Chevènement, Kiejman, Sarkozy – et les autres. Chacun chante et chantera jusqu’à lundi prochain combien l’Ignominie de cette Vaste Machination, combien l’Infamie des Faux Listings, a assailli son client dans sa chair, sa réputation ou son portefeuille. Et chacun demandera ce qu’il considère être sa juste réparation.
À les écouter ainsi pendant des heures, on prend ses aises, on bascule sa tête en arrière, on admire le plafond doré et travaillé de la 11e chambre correctionnelle, on repense à la reine Marie-Antoinette condamnée ici même, et l’on médite sur la capacité de travail investie dans ce procès pour chercher à établir des faits qui, par définition, sont presque impossibles à constituer. Cette instruction aura occupé deux juges à plein temps pendant cinq ans. Le fruit de leur travail, des PV, des commissions rogatoires en veux-tu en voilà, s’étale sur 42 tomes soigneusement étalés sur les étagères du fond de la salle. Un mois de procès. Quarante-huit parties civiles constituées. Une trentaine de gendarmes pour assurer la sécurité des lieux. Une vingtaine de témoins. Une cinquantaine de journalistes et autant d’avocats, parmi les plus renommés du barreau de Paris, certains rémunérés à hauteur de 500 ou 600 euros de l’heure.
À ce stade, on réfrène un « Tout ça pour ça ». Car si l’on doit tirer un trait et faire le compte de ce qui ressort jusque-là, force est de constater que l’addition mène à ce curieux résultat : pas grand-chose. Rien de concret effectivement pour prouver que M. de Villepin avait conscience de la falsification des listings. Pas de complicité active. Certes, les débats ont bel et bien souligné quelques menus mensonges de la part de l’ex-premier ministre, de quoi ajouter des soubresauts et des coups de théâtre à l’audience, mais de preuve de sa culpabilité, point. Les pronostics s’enflamment. On s’attend à un non-lieu pour de Villepin qui aura attaqué jusqu’au bout pour mieux se défendre. On appose un gros point d’interrogation sur Gergorin. Et l’on se dit qu’Imad Lahoud, aujourd’hui modeste professeur agrégé de mathématiques au lycée Racine à Paris, risque gros. Le jugement sera mis en délibéré jusqu’au début de l’année 2010. On pense alors aux élèves de 1e S de Monsieur Lahoud. Et l’on se dit qu’ils vont encore prendre un sacré retard sur le programme.
Pour relire les précédentes cartes postales du procès :