Un voyage politique, pas un voyage d’affaires, qu’ils disent à Paris et à Damas. Il n’empêche que Sarko emmène avec lui en Syrie, les 3 et 4 septembre, quelques grands patrons, comme celui de Total. Sensation, un proche de la famille Hariri figure aussi dans la délégation : Jacques Saadé, le franco-libanais patron de l’armateur CMA CGM…
Les poids lourds du CAC 40 ne sont pas mécontents. Peu importe si l’Union pour la Méditerranée (UPM) retombe comme un soufflé dans quelques mois. A leurs yeux, en lançant l’UPM le 14 juillet dernier, Nicolas Sarkozy a eu le mérite de renouer les relations avec la Syrie de Bachar Al-Assad. Et de remettre accessoirement les boîtes françaises sur le chemin de Damas. Signe d’un climat propice aux affaires, un membre de l’ambassade de Syrie à Paris arpentait d’ailleurs les travées de l’université d’été du Medef à Palaiseau, juste avant le déplacement officiel de Sarkozy en Syrie les 3 et 4 septembre. « Ce n’est pas un voyage économique, c’est une visite politique » : répété en chœur par la diplomatie française et son homologue syrienne, ce leitmotiv paraît donc tout relatif. Histoire peut-être de ne pas froisser les autres Etats européens…
Car sous sa casquette de président du Conseil européen, qui recouvre celle de chef d’Etat français, Nicolas Sarkozy en a caché une troisième. Celle de VRP 100 % hexagonal. Même si l’Elysée prévient qu’il y aura peu de contrats à ramasser, le président emmène tout de même une poignée de grands patrons tricolores. Comme celui de Total, Christophe de Margerie, « le seul de tous ceux du CAC 40 que Laurence Parisot, la présidente du Medef traite comme un ministre », note avec amusement un observateur avisé. Le pétrolier moustachu devrait user de son charme à Damas pour obtenir l’extension après 2011 du permis d’extraire du brut dans l’est de la Syrie (29 000 barils par jour actuellement).
Si Anne Lauvergeon n’est pas mentionnée parmi les participantes, Areva espère toujours aboutir à des projets de nucléaire civil en Syrie. Parmi les boîtes qui visent des contrats à plus ou moins long terme, on trouve Vinci ( pour moderniser l’aéroport de Damas), Lafarge (qui négocie la construction de deux cimenteries), voire EADS/Airbus à en croire Reuters. Le hic, souligne l’agence de presse, c’est que Washington, avec qui EADS négocie le contrat géant d’avions ravitailleurs risque de se fâcher. Les Etats-Unis ont en effet interdit l’exportation vers la Syrie d’un certain nombre de marchandises.
La délégation sarkozienne réserve aussi une vraie sensation. Non pas parce qu’elle compte dans ses rangs un chiraquien pur sucre en la personne de Jacques Saadé, président de CMA-CGM, devenu le troisième armateur mondial pour les conteneurs. Mais plutôt parce que ce franco-libanais – dont la holding familiale est basée à Beyrouth – est un proche, tout comme Chirac, de la famille Hariri. Inutile de rappeler que la Syrie est soupçonnée d’avoir fait assassiner en 2005 le Premier ministre libanais Rafic Hariri… Mais l’heure serait aux grandes réconciliations au nom du business. Dans ce qui a filtré officiellement, Saadé espère implanter des activités sur le port syrien de Lattaquieh.
Toujours dans les transports, un projet pourrait faire surface au bénéfice, (qui sait ?) des bétépistes (du BTP) tricolores et d’Alstom, entreprise chouchou de Sarkozy. Le régime d’Al-Assad caresse en effet l’idée d’un métro à Damas…
Bon début, l’an passé, une boîte d’ingénierie française, filiale de la SNCF et de la RATP, a d’ailleurs obtenu de mener des études en partenariat avec un bureau d’études libanais. Objectif : déterminer le tracé de la future ligne « verte », signe qu’il pourrait y en avoir par la suite une rouge, une bleue… En espérant, si la diplomatie française fait des trésors, qu’il s’agisse de projets que les Américains ou les Chinois n’auront pas…
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En s’exprimant autrement, on pourrait dire que ceux qui ont poussé à se rapprocher de la Syrie (la diplomatie française ?) ont permis à l’humanité de progresser parce que derrière les contrats des uns et des autres, il y a des tensions qui s’appaisent au Moyen orient et que c’est toujours bon à prendre …
La "Diplomatie françaice" ne pourrait-elle continuer et pousser à un rapprochement avec l’Iran et réanimer celui qui avait été amorcé avec la Lybie ?