Syrie : le « coup » rêvé par Nicolas Sarkozy

Il y a le fond et la forme. La France compte aussi sur le sommet de l’Union pour la Méditerranée du 13 juillet à Paris pour engranger des bénéfices concrets au Moyen-Orient. Notamment en surfant sur la venue en France du président syrien, Bachar el-Assad. A l’Elysée, on ne cache pas qu’on espère reprendre la main dans le dossier libanais ainsi que mettre de la distance entre la Syrie et l’Iran. Et pourquoi pas, aussi, jouer un rôle dans d’éventuelles négociations de paix directes entre la Syrie et Israël. En clair, Nicolas Sarkozy a fait sienne cette vielle maxime de l’ancien secrétaire d’Etat américain Henry Kissinger, qui demeure d’actualité : « pas de guerre sans l’Egypte et pas de paix sans la Syrie ». Voilà pour le fond.

Sur la forme, le chef de l’Etat français rêve de frapper un coup médiatique en faisant en sorte que soit annoncée ce week-end, à Paris, l’ouverture d’une ambassade syrienne au Liban. Ce qui serait une première tant le sujet est un vieux serpent de mer. Damas n’a en effet jamais reconnu officiellement l’existence du « Grand Liban » fondé par les Français en 1920 et n’a jamais, non plus, entretenu de relations diplomatiques normales avec le pays du Cèdre depuis son indépendance en 1943.

L’Orient compliqué

Aujourd’hui, la situation a toutefois évolué. Ce pas en avant dans la normalisation des relations diplomatiques entre la Syrie et le Liban est rendu possible par les accords de Doha de mai dernier, qui ont mis fin à dix-huit mois de crise libanaise. Dans un entretien accordé au quotidien français Le Figaro paru le 8 juillet, Bachar el-Assad a d’ailleurs confirmé cette volonté syrienne mais en la conditionnant à « la formation d’un gouvernement d’unité nationale au Liban ». Ce n’est pas à un jeune singe (Bachar fils a 43 ans) qu’on apprend à faire la grimace. Et, pour le moment, la formation de ce nouveau gouvernement traîne en longueur à cause de désaccords de politique politicienne au sein de la majorité libanaise.

A l’Elysée, on croit pourtant dur comme fer que c’est bien ce week-end que sera annoncé l’ouverture d’une ambassade syrienne à Beyrouth. Même si on n’est jamais à l’abri d’un rebondissement propre à l’Orient compliqué…

C’était même l’une des conditions posées par Nicolas Sarkozy (et les Européens en général) pour réintégrer la Syrie dans le concert des nations « respectables ». « Cette concession ne coûterait pas trop cher aux Syriens et leur permettrait même de ramener au Liban sous statut diplomatique les agents des services secrets qu’ils ont dû retirer après la mort de l’ancien premier ministre libanais Rafic Hariri. Ca leur donnerait aussi une image de pays modéré et conciliant, bien utile face aux pressions américaines et à la menace de tribunal pénal international » souligne un expert chevronné de la région.

Reste maintenant à savoir ce que la France a mis dans la corbeille de la mariée en échange. Il est en effet bien connu que les Syriens n’offrent jamais de cadeaux gratuitement et, qu’en plus, il faut les rembourser à l’avance. « Une chose est sûre, les Saoudiens ne seront pas contents et menaceront de faire payer la France. Mais comme, malgré leurs promesses, ils ne nous achètent rien, leurs menaces commencent à doucement faire rigoler tout le monde » conclut l’expert chevronné.