Ségolène Royal pense sérieusement à briguer le poste de Premier secrétaire. Réussira-t-elle à rassembler ou devra-t-elle trier finalement parmi les seconds couteaux ?
La motion de Ségolène Royal étant arrivée en tête après le vote des militants (29,6%), c’est à la présidente de Poitou-Charentes de proposer un nom de Premier secrétaire, dixit François Hollande sur son blog. Avec l’objectif d’obtenir une majorité à Reims, après le rassemblement entre deux ou trois motions. Encore faut-il la jouer fine et éviter de heurter la sensibilité des autres ténors du PS… C’est mal parti car Ségolène Royal pense sec à briguer la succession de François Hollande et à sortir et de sortir sa candidature du « frigidaire », selon son expression.
Un dernier sondage Viavoice paru hier dans Libération indique que Ségolène Royal ferait un bon chef de l’opposition pour 51% des sondés. De quoi sûrement lui avoir donné envie de se lancer dans la course. Pourtant le « Tout sauf Ségolène » n’est jamais très loin… ce qui pourrait conduire les ségolénistes à piocher parmi les seconds couteaux pour tenter un rassemblement de dernière minute. Revue des troupes avant l’annonce par Ségolène Royal de sa décision.
Premier au rang des probabilités : l’euro-député Vincent Peillon, 48 ans et toutes ses dents, capable d’incarner aux yeux des militants le renouvellement et l’ascension d’une nouvelle génération. D’autant plus que cet agrégé de philosophie et ancien porte-parole du PS, maîtrise parfaitement le magistère de la parole et les arcanes du parti. Mais - car il faut un mais ! - le socialiste n’a pas que des atouts : il jure ô grand diable sur toutes les ondes « ne pas avoir fait acte de candidature » et a déclaré à Libération, le 5 septembre dernier : « Pourquoi pas un contrat de gouvernement avec Bayrou ? ». En somme : il n’exclut pas d’éventuelles alliances électorales avec le MoDem.
Ouïe ! Les fabiusiens qui ont voté pour Martine Aubry ne s’en sont toujours pas remis. Un mauvais point sur le carnet de notes de Peillon - lui qui avait jusque-là bonne presse dans le camp de la maire de Lille. Et comme le PS ne serait pas le PS si les socialistes ne se tiraient pas dans les pattes, Julien Dray a fait remarquer hier sur le plateau de Canal+ que le Premier secrétaire devrait être un parlementaire. « S’il faut former une équipe », a déclaré Dray, « le dispositif doit partir de l’Assemblée nationale », ce qui exclue d’office le soldat Peillon.
Pour mémoire, Vincent Peillon et Julien Dray avaient créé en 2003, avec Arnaud Montebourg et Benoît Hamon, le Nouveau Parti socialiste (NPS). Mais le quatuor avait explosé et Peillon avait rejoint Royal pour la présidentielle. Désormais membre du premier cercle ségoléniste, il ne lui reste plus qu’à patienter quelques heures pour savoir s’il décrochera le premier rôle.
Deuxième dans la course : François Rebsamen. Le sénateur-maire de Dijon et numéro 2 du PS en charge de la coordination, a été le codirecteur de la campagne de Ségolène Royal au moment de la présidentielle. Rebsamen la connaît bien tout comme François Hollande, dont il est l’ex-bras droit. En somme, « Rebs » comme le surnomment certains socialistes pourraient parvenir à créer une passerelle entre la motion de Royal et celle de Bertrand Delanoë, que François Hollande a signée. Pas négligeable pour constituer un pôle majoritaire au congrès quand on sait que le maire de Paris s’est hissé à la deuxième avec 25,4 % des voix des militants. Pourtant, le sénateur de Côte-d’Or confiait hier à France Soir, ne pas « pousser du col pour » obtenir la place.
Si ce quinquagénaire de 57 ans est parfois vu comme un homme des coulisses, sans aura suffisante pour exister comme patron de l’opposition, Rebsamen a au moins le mérite - ô combien important en ces temps de tractations et de querelles internes au PS - de ne pas susciter trop de méfiance. En un mot, les présidentiables pourraient dormir tranquille puisqu’il ne vise pas l’Élysée et qu’il neutraliserait les ambitions des uns et des autres au moins jusqu’en 2010, date de l’investiture socialiste. Deux ans de gagné, c’est déjà ça !
Le choix Rebsamen aurait aussi pour avantage de convenir à Gérard Collomb, le maire de Lyon et premier signataire de la motion, et à Jean-Noël Guérini, président du conseil général des Bouches-du-Rhône qui ont toujours faire connaître leur désapprobation à voir s’installer un présidentiable à la tête du PS. Même si les barons locaux ont mis ces dernières heures de l’eau dans leur vin…
Troisième : Julien Dray dit « Juju », une petite cinquantaine et un air mystérieux qu’il affectionne pour répondre aux questions des journalistes. « Ça peut être moi », a lancé le député de l’Essonne dimanche 9 novembre, sur le plateau de Canal+. En présentant le profil du parfait candidat - un élu de l’Assemblée nationale « parce qu’il faut créer cette symbiose entre le terrain et le débat parlementaire » - il a clairement souligné qu’il s’estimait le mieux placé pour remplir le job. Au moins, Dray n’a-t-il jamais caché ses intentions ! Dès février dernier, ce parlementaire chevronné, rôdé aux techniques de débats, annonçait ses intentions de briguer la succession de François Hollande.
Mais intime de l’actuel Premier secrétaire comme de Ségolène Royal, Dray s’est retrouvé au centre d’une rupture qui a mêlé politique et relations de couple. Dès lors, il a alterné les allers-retours entre les deux protagonistes de l’histoire. S’il a soutenu la socialiste pendant la présidentielle, il s’est rapproché de Hollande après la défaite avant de signer la motion de Royal. Des revirements qui ont eu le don d’en agacer plus d’un qui se sont fendus d’un bon mot : « Julien a quitté Papa pour rejoindre Môman ! » Quand on vous dit que l’on ne s’ennuie pas au PS…
Sauf que dans ces allers-retours, Dray a perdu des plumes en suscitant la méfiance de plus d’un. Pas le scénario idéal quand il s’agit de rassembler le parti.
Dur, dur ce choix ! Étant donné l’état du parti et l’absence de majorité, personne ne veut vraiment de la direction du parti et pourtant tout le monde la demande… Benoît Hamon est toujours dans la course. Martine Aubry hésite encore. Mais de toute façon, c’est aux militants que reviendra le dernier mot, le 20 novembre, avec un second tour en cas de besoin. Si les ténors se sont mis d’accord à Reims sur le nom du Premier secrétaire, il ne devrait pas y avoir de surprise lors de ce vote.
Mais le PS reste le PS et une surprise du chef n’est jamais exclue…
Article modifié mardi 11 novembre.
À lire ou relire sur Bakchich :
Les places sont "chaudes", vent de "Socialo-follies" aux "seins" du PS….Nous autres "pôvres" adhérents (qui Payont ) soit au mois ou soit mensualisés (oui ça existe, j’en fais parti),n’avons comme d’habitude rien à dire, ou à faire puisque "les dés" ou les "jeux" de chaises musicales sont "pipés" au sommet de la "pire-amide" des ex-énarques du "bourrié".
A Reims, pour changer….."les bouchons" ne vont que sauter !!!!
Une analyse intéressante ; malheureusement, elle est fondée sur un postulat erroné, posé par Hollande. Or, il se trouve que, si personne n’a gagné la semaine dernière dans les sections, il est archi évident qu’il y a un vrai, un insondable et un irréversible perdant : Hollande et avec lui tous ceux qui étaient à ses côtés derrière Delanoë mais aussi tout le premier rang du Secrétariat national démissionnaire (justement les Rebsamen et les Dray). Patatras ! La belle analyse simpliste de Mourgue (les « tout sauf Delanoë » et les « tout sauf Ségolène ») et donc les très savantes constructions échafaudées par Royal cette semaine tombent à l’eau parce que les militants ont effectivement choisi le tout sauf une obligation de voter oui au référendum ou un soutien inconditionnel au Président lorsqu’il veut renforcer notre présence militaire en Afghanistan.
Qui reste dans le bateau ? Il en reste toujours quatre et parmi eux, il en reste deux qui ne sont pas formellement candidats à la présidentielle, qui sont historiquement très proches l’un de l’autre, et qui représentent à eux deux une majorité relative de 44% (qui réunit notamment Fabius, Emmanuuelli et Strauss) tout à fait capable d’attirer les suffrages et de réunir sur le plan des idées aussi bien les partisans de Royal que ceux de Delanoë.
Même en évitant de faire une fixation sur le "calendrier" comme l’avait fait bêtement Hollande en plombant irrémédiablement la campagne de la présidentielle pour le parti (quel que soit le candidat), on peut quand même constater que le prochain congrès a lieu dans 3 ans, soit environ un an avant la présidentielle : un confortable délais de 3 ans pendant lesquels tous les candidats, intégrés à une direction collégiale du parti, auraient tout le temps de se définir et de proposer un projet en vue du prochain congrès.