Silvio Berlusconi, le sexe, les photos et le fric. Et « la vérité n’a même pas encore été effleurée… », nous dit son ex-femme, Veronica Lario. Qui accompagne le président du conseil italien sur ces photos ?
« Les 700 photos qui ont été saisies ne sont pas les seules que j’ai faites… entre 2006 et 2009, j’ai pris cinq mille photos ». Antonello Zappadu est le reporter par qui le scandale arrive. C’est lui qui a « planqué », pendant des années, Silvio Berlusconi et ses réceptions dans sa villa en Sardaigne… Quel genre de photos a donc mis Zappadu dans son boîtier ? Qu’y a-t-il sur les milliers d’images qui se trouvent quelque part à l’abri, alors que seulement 700 photos ont été saisies sur demande de l’avocat de Berlusconi ? « Je dirais, des images politiquement embarrassantes », répond Zappadu, sibyllin, aux journalistes de La Repubblica. Le photographe a pris la précaution d’envoyer la totalité de ses archives à une agence de presse colombienne, juste avant que les juges n’ordonnent la saisie.
Une question agite alors la cour berlusconienne : à part les jeunes filles qui déambulaient nues dans les jardins de la villa sarde du Cavaliere, qu’y a-t-il d’autre sur les milliers de photos prises par Zappadu ? Y aurait-il des photos avec des hôtes de marque de Berlusconi, à l’instar de Mirek Topolanek, alors Premier ministre de la République tchèque… Qui semblait apprécier le séjour sarde, ainsi que la jeune et charmante compagnie mise à disposition par son hôte ? Cette question, paraît-il, aurait le pouvoir d’empoisonner les nuits d’un certain nombre de proches du Cavaliere. Pour ne pas dire du Cavaliere en personne.
Les enquêteurs ont remonté la filière qui « approvisionnait » le président du Conseil italien en compagnie féminine tarifée. Il s’appelle Gianpaolo Tarantini, c’est un homme d’affaires de Bari, que Berlusconi prétend avoir connu l’été dernier en Sardaigne, et c’est lui le recruteur des jeunes femmes destinées aux fêtes du président du Conseil. Des fêtes organisées en Sardaigne tout comme au palais Grazioli, la demeure privée du chef du gouvernement. Selon les enquêteurs, l’activité de Tarantini ne s’arrêtait pas uniquement aux caprices du président du Conseil. L’homme d’affaires aurait aussi organisé des rencontres festives pour des hommes politiques de premier plan de sa région, les Pouilles.
Les enquêteurs s’interrogent aussi sur les relations de Tarantini avec un prénommé Nicola D., soupçonné d’être au centre d’un vaste trafic de drogue, de la cocaïne. Selon les enquêteurs, ledit Nicola serait bien le trait d’union entre le monde du pouvoir et celui des « escort-girls ». L’enquête met aussi en évidence le fait que le sexe et, peut-être, la drogue n’étaient pas les seuls vices de Tarantini et de ses amis : le poker était aussi au rendez-vous.
Patrizia D’Addario faisait partie des « escort-girls » choisies par Tarantini. Elle a raconté aux enquêteurs avoir été choisie parmi les nombreuses filles invitées à une fête le 4 novembre 2008 à la demeure privée du président du Conseil à Rome. Patrizia raconte avoir passé la nuit avec le Cavaliere « dans le grand lit », comme le lui avait indiqué le maître de maison. Patrizia a même pris des photos avec son téléphone portable, sans oublier d’enregistrer ses dialogues avec le principal responsable politique de la République italienne. Ces documents sont dans les mains des enquêteurs. [1]
Le témoignage de Patrizia est corroboré par les déclarations d’un autre témoin, Barbara Montereale, 23 ans. Barbara faisait aussi partie des filles recrutées par Tarantelli. Elle a raconté que, selon un scénario préétabli avec Tarantelli, le 4 novembre 2008, après le dîner dans la demeure privée du président du Conseil à Rome, il fallait laisser Patrizia seule, en tête à tête avec le Cavaliere. « Pourquoi Patrizia est restée ? » Interrogée le 20 juin 2009 par Paolo Berizzi et Gabriella De Matteis, journalistes à La Repubblica, Barbara Montereale a répondu : « Elle est restée pour travailler ». Travailler ? « Tout le monde savait qu’elle était une escort-girl » Même le président ? « Je présume précisément que oui ».
Patrizia est rentrée le lendemain matin vers huit heures… Elle vous a dit quelque chose ? « Elle m’a raconté qu’elle a eu une relation sexuelle avec le président…. » 5 jours plus tard, dans la nuit du 24 au 25 juin, la voiture de Barbara est partie en fumée. Un incendie volontaire. S’agit-il d’un acte d’intimidation sur un témoin ?
Dans le milieu politique italien, les bruits vont bon train. Et la question devient de plus en plus pressante. Qui d’autre pourrait bien figurer sur les milliers de photos prises par Zappadu entre 2006 et 2009 ?
Personne n’oublie, en Italie, que le Cavaliere avait été un membre de la fameuse loge maçonnique P2. Une loge occulte, qui se distingua dans les années soixante-dix pour son intense activité anti-républicaine, en étroite liaison aussi bien avec les services secrets de l’Oncle Sam qu’avec bon nombre d’hommes « d’honneur » liés à la mafia… L’image d’une vielle relation bien embarrassante pourrait-elle se retrouver sur un cliché de Zappadu ?
Mais c’est surtout une phrase quelque peu « cryptée », qui rebondit sans cesse dans les palais romains et qui donne matière à penser. C’est Veronica, l’épouse du Cavaliere, qui l’avait lâchée au Corriere della Sera pour expliquer son désir de divorce : « La vérité du rapport entre moi et mon mari n’a même pas encore été effleurée, tout comme les raisons pour lesquelles j’ai du recourir à la presse pour communiquer avec lui… » La vérité, donc, n’a même pas encore été effleurée…
A lire ou relire sur Bakchich.info
[1] Enregistrements Patrizia D’Addario. 4 novembre 2008. On distingue la voix du président du Conseil qui s’adresse à Patrizia lui expliquant qu’il va s’absenter pour prendre une douche et mettre un peignoir. Le président invite la jeune femme à l’attendre dans le « grand lit ». Patrizia répond affirmativement : « Oui, dans le grand lit ».
5 novembre 2008. Patrizia D’Addario enregistre un appel téléphonique entrant. On reconnaît la voix du président du Conseil qui lui demande « comment ça va ». La jeune femme répond qu’elle est « un peu enrouée ». Le président, en retour, se déclare ironiquement surpris puisque la nuit passée il n’a pas entendu de « cris ».
Bonjour la Bakchich Team. Merci de cet excellent article ; l’arbre qui cache la forêt…
Quel Bonheur que vive encore la Presse de Qualité.
Je me demandais tout simplement qui paye la drogue, les prostituées et l’argent du poker, c’est le contribuable de chaque chefs d’état et politiques qui se sont rendu en Sardaigne, ou est-ce que cela se fait par d’autres arrangements aussi pires.. ?
Bises, Zou.