Ah, les nouilles, les spaghettis, les macaronis ! Ces Italiens, aux dires des médias et des dirigeants français, sont incurables. Voilà qu’ils viennent de réélire pour la troisième fois une majorité parlementaire dirigée par l’inusable Silvio Berlsuconi, qui devrait former son gouvernement fin avril. L’homme d’affaires italien, première fortune de la péninsule, leader du Peuple de la Liberté, nouveau nom de son rassemblement de droite, allié aux durs de la Ligue du Nord, a battu le pâle Walter Veltroni, héritier du centre gauche, après la chute du gouvernement de son mentor Romano Prodi.
On peut le regretter, tant l’emphase et les excès ont marqué, à chaque fois, le passage du Cavaliere au pouvoir à Rome, comme sa campagne des dernières semaines, qui fut outrancière à souhait, blagues sexuelles à l’appui. Mais le verdict des urnes est imparable. Dix points d’avance. A 71 ans, chevelure et visage refaits à neuf, Berlusconi, qui se juge « irremplaçable », remonte sur les planches, avec une légitimité reconnue même par ses opposants, une santé visiblement retrouvée (ayant défailli lors d’un meeting il y a quelques mois, il est équipé d’un stimulateur cardiaque), un programme très droitier. Et quelques dossiers chauds sur la table : la faillite annoncée de la compagnie aérienne nationale Alitalia, une croissance molle, des réformes institutionnelles nécessaires, des comptes publics en plein dérapage, des menaces de grève, des ménages furieux contre la hausse des prix.
Silvio va immanquablement reprendre son style et ses méthodes, qui ont provoqué autrefois tant de moqueries de ce côté-ci des Alpes : taille drastique dans les dépenses publiques, libéralisme décomplexé, affairisme de ses proches, déclarations à l’emporte-pièces, populisme rampant, médias et justice instrumentalisés, provocations européennes calculées, atlantisme effréné et sourire tous azimuts…
Euh ??? Cela ne vous rappelle pas quelqu’un ? Un certain Président bling-bling, sa politique et ses travers ? L’Italie n’est pas la France, sans doute. Silvio est plus caricatural, forcément, direz-vous ? Quoique… Les deux pays, voisins et cousins, piliers de l’Europe, sont désormais dirigés à droite toute, avec des leaders qui savent user des discours et des télés. N’avait-t-on pas évoqué, pour la France, dès l’an passé, une « berlusconisation » galopante du pouvoir ? Aujourd’hui, n’est-ce pas l’Italie qui se « sarkoyise » brutalement ? « La première chose que je ferai après le vote sera d’appeler Sarkozy » a d’ailleurs annoncé Silvio, répétant que le président français a vu en lui un « modèle ». Diable ! Les deux, décidément, font la paire. Ca promet et ça risque de décoiffer. Tous aux abris ! Comme on le disait à la SNCF : e pericolo sporgersi [1].
A défaut de se réjouir, on va désormais mesurer, in vivo, qui, du maître ou de l’élève, va dépasser l’autre dans le débordement cavalier.
[1] il va être dangereux de se pencher à la fenêtre