La CGT semble redouter de se faire noyauter par les militants du Nouveau Parti Anticapitaliste. Entrisme et paranoïa, comme aux plus belles heures de l’extrême gauche.
La grande messe du 1er mai devrait cette fois, après des années de déclin, connaître une affluence record. Les huit principaux syndicats y défileront, et c’est une première, main dans la main pour dénoncer la casse sociale. Boostés par un climat de tension qui joue en leur faveur, les organisations syndicales sont bien décidées à profiter de la fête du travail pour montrer leurs muscles. D’autant que la radicalisation des actions sur le terrain : séquestrations de patrons, mise à sac de la sous-préfecture de Compiègne par des salariés de Continental - a plutôt donné l’impression que la contestation sociale leur échappait.
Si les syndicats ont présenté ces actes spectaculaires comme « spontanés » et commis pas des salariés « désespérés », certains y ont dénoncé - à mots plus ou moins couverts - l’influence de l’extrême-gauche. Comme le gouvernement n’a d’ailleurs pas manqué de le relever. Le leader de la CFDT, François Chérèque expliquait ainsi récemment que les pratiques du NPA qui consistaient à « attendre la misère pour agir » faisaient « un peu rapaces », alors que « C’est tous les jours que nos délégués syndicaux sont dans les entreprises ». Ambiance.
Du côté de la CGT, malgré les discours œcuméniques officiels de la direction, on s’agace aussi de voir le parti d’Olivier Besancenot chasser sur les terres syndicales. Pire, le syndicat semble même redouter que l’entrisme soit redevenu à la mode. Un article du Figaro sur l’extrême gauche daté du 23 avril, expliquait, l’air de rien, qu’un ancien responsable de la CGT Transport, Alain Renault, aurait été chargé de surveiller l’influence croissante du NPA dans ses rangs. Une cellule de veille pour pister les militants anticapitalistes ? L’information a ému plus d’un cégétiste, lesquels n’ont pas tardé à fustiger sur leurs blogs cette nouvelle forme de chasse aux sorcières. « Je déments formellement » a affirmé à Bakchich Maryse Dumas, la numéro 2 de la CGT. « L’engagement politique chez nous est libre et nous ne demandons pas à nos adhérents à quel parti politique ils appartiennent, même si nous veillons à ce que l’action syndicale reste syndicale » a ainsi assuré la secrétaire confédérale avant d’ajouter sereine « de toutes façons, nous sommes 700 000 et eux 7000, alors… ».
Pourtant, sur le terrain, certains cégétistes reconnaissent qu’il y a effectivement un peu de paranoïa dans l’air depuis quelque temps. « On a entendu dire que le NPA avait décidé lors de son dernier congrès d’infiltrer les syndicats et en particulier à la CGT, rapporte un responsable de l’union départementale du Pas de Calais. D’ailleurs, c’est logique, ils ne sont pas assez nombreux pour mettre le feu tout seuls alors ils espèrent pouvoir nous filer les allumettes ».
Olivier Besancenot étant en partance pour la Guadeloupe pour fêter le 1er mai aux côtés du LKP, c’est Alain Krivine, LCR-historique et qui en connaît un bout sur l’entrisme, qui se chargeait de répondre à Bakchich. « Si c’est vrai que la CGT a effectivement fait ça, c’est complètement ridicule : ils feraient mieux de créer une commission d’action ! » a-t-il ironisé. « Evidemment qu’on pousse tout le monde à se syndiquer mais en toute transparence et même si, d’ailleurs, ça ne passe pas toujours auprès des jeunes adhérents. »
Un militant du NPA suggère de son côté que « l’info du Figaro est sûrement bidon. Cela vient des RG, il s’agit une fois de plus de diviser le mouvement social ». Tout ce petit monde aura l’occasion de s’expliquer lors du défilé : la tradition au NPA, ex-LCR veut qu’on commence à défiler avec son syndicat pour terminer avec le parti. Que les « infiltrés » se dévoilent !
A lire ou à relire sur Bakchich :
Bonjour, Lucie,
L’article me paraît assez peu fourni en données claires et avérées, ce qui ne permet pas d’exprimer un avis quelconque sur des "on dit" aussi peu fiables que ceux que le texte relate.
Cependant, son intérêt me paraît ailleurs, et cela mérite un commentaire approprié, amical, constructif et détendu.
Sur le plan de ses statuts, la CGT comme la CGT-FO, SUD ou la FSU acceptent tout(e) salarié(e) qui en fait la demande et acquitte sa cotisation. Donc, les opinions politiques n’ont pas à être prises en compte par aucun syndicat digne de ce nom et respectueux de ses propres statuts.
Ce qui est par contre intéressant est cette étrange focalisation (fascination ?) médiatique, formidable et quasi-institutionnelle, sur le NPA et son porte-parole désigné.
Pourtant, dans les luttes sociales, notamment ouvrières, ainsi que sur le terrain de la vie réelle, même au niveau syndical actif, on rencontre plus des militants de Lutte Ouvrière ou du Parti Ouvrier Indépendant que de militants du NPA, que l’on voit essentiellement à la télévision sur toutes les chaînes (publiques et privées), comme si….. les autorités du pays cherchaient à faire accroire que le NPA existe seul comme force militante active.
Si les journalistes professionnels attachés à cette thèse quelque peu délétère d’un "parti révolutionnaire officiel" voyageaient un peu en dehors de leurs quartiers parisiens habituels, par exemple dans les régions de province, les villes moyennes, les bourgs semi-ruraux, semi-industriels, ils constateraient que dans le pays profond, dans les entreprises en lutte active, dans les grosses mobilisations de salariés, notamment en province et dans les bastions ouvriers essentiels, les militants du NPA sont minoritaires et sont largement surclassés en efficacité et nombre par les militants de LO et du POI, qui, de plus, ont l’avantage de leur implantation locale et de leurs structures plus actives.
En résumé,les plus "actifs" militants que l’on voit depuis les bureaux feutrés des médias parisiens ne sont pas ceux qui sont le plus en contact avec les populations qui se révoltent.
Une leçon qui vaut ce qu’elle vaut, mais mérite peut-être une saine et utile réflexion. Car la médiatisation éblouit beaucoup, aveuglant parfois ceux-là mêmes qui se veulent les gardiens honnêtes de l’information vraie.
Il est possible que la star - Olivier Besancenot- auto-désignée par les médias, star censée représenter les combats ouvriers et incarner la révolte des salariés ne soit pas la bonne, vue par les intéressés eux-mêmes.
Afin de bien appréhender le problème des vrais rapports de force sur le terrain, loin des apparences et des présupposés, un journalisme sérieux enquêterait sur les vraies influences politiques au sein des populations révoltées afin de comprendre les processus réels en cours, ce qui serait intéressant autant qu’éclairant.
Ce conseil vaut ce qu’il vaut, mais un peu de vérité sur les faits ne pourrait que redonner au journalisme professionnel aujourd’hui bien malade de ses pratiques anciennes et maintenant bien auto-destructrices une santé, une crédibilité et une sincérité qui lui font pour l’heure bien défaut.
De plus, ce faisant, les journalistes colleraient aux réalités de la situation présente qui se développe dans toute l’Europe, et non à des chimères qui, dès qu’elles apparaissent comme telles aux yeux du public, ne font que faire perdre plus de crédit à une profession déjà peu aimée par la France d’en bas, qui est bien la majorité écrasante de la population, même si elle ne fait pas les unes de Paris-Match, Gala ou Voici.
Victor Hugo a bâti sa notoriété et son succès en écrivant pour le peuple travailleur qui le lisait avec passion.
Son nom est toujours connu et aimé plus de 130 ans après sa mort.
BHL a les honneurs constants des médias, mais qui donc lit ces livres et qui se souvient en 2009 de leur contenu vide ?
La différence saute aux yeux : Hugo- cet écrivain et poète pourtant peu médiatisé à son époque- a imprégné les couches populaires et ses générations successives par ses idées et conceptions, républicaines, laïques et démocratiques.
BHL est admiré par quelques personnes dans un cercle restreint proche des pouvoirs successifs, mais la population majoritaire du pays ignore totalement ses pensées et opinions. ET elle n’y porte par ailleurs aucun intérêt !
Il y a là matière à réflexion féconde, il me semble, pour quiconque est et se veut être un(e) vrai(e) journaliste.
Bien cordialement,