En Février dernier, Dominique de Villepin était discrètement interrogé par des magistrats tahitiens au sujet de frasques financières de Chirac eu Japon et à Tahiti. Bakchich publie l’ interrogatoire issu du procès verbal.
A quelle période avez-vous été Secrétaire Général de l’Elysée, sous la présidence de Jacques Chirac ?
DDV : De mai 1995 à 2002
Depuis quand connaissez-vous Jacques Chirac ?
DDV : Depuis 1980
Quelles sont vos relations avec Gaston Flosse ?
DDV : Des relations professionnelles cordiales jusqu’en 2007, liées à mon activité de Secrétaire Général, puis de ministre et de Premier ministre, et des relations amicales depuis XX, date à laquelle j’ai effectué mon premier séjour en Polynésie. En fait, plus exactement XXX mon deuxième séjour en Polynésie, puisque j’avais effectué dans les années 80 un premier séjour en Polynésie alors que mon frère y accomplissait son service militaire.
Comment qualifierez-vous les relations de Jacques Chirac et de Gaston Flosse ?
DDV : Des relations d’amitiés, très anciennes
Connaissez-vous Robert Wan, homme d’affaires polynésien, surnommé l’empereur de la perle ? Si oui, dans quelles circonstances l’avez-vous rencontré ?
DDV : Non je ne le connais pas
Vous ne l’avez pas rencontré lors de votre séjour en Polynésie en juillet 2007 ?
DDV : Pas à ma connaissance, j’ai pu le croiser mais je ne le connais pas
Le président Jacques Chirac, amoureux du Japon et de sa culture, s’est rendu à de nombreuses reprises dans ce pays, tant à titre privé qu’à titre officiel. Il apparaît qu’il y a fait une visite d’Etat au Japon en novembre 1996, et que dans la délégation française qui l’accompagnait se trouvaient Gaston Flosse et Robert Wan. Savez-vous pourquoi ?
DDV : Non. Je n’ai pas de souvenirs.
Connaissez-vous M. Shoishi Osada, qui était président de la Tokyo Sowa Bank. Si oui, quelles étaient ses relations avec M. Jacques Chirac ?
DDV : Non, je ne le connais pas.
Vous êtes-vous rendu au Japon en compagnie du Président Chirac ?
DDV : Non
Quelques jours avant la visite d’Etat de M. Chirac du 17 au 22 novembre 1996, dans un message de la DGSE en date du 11 novembre 1996 sur la Tokyo Sowa Bank, déclassifié par la décision du ministère de la Défense du 24 octobre 2008, le chef de poste annonce que le montant des sommes versées sur le compte ouvert par Sowa, au nom de M. Chirac, serait de 70 Oku Yens, soit 7 milliards de tens, soit environ 300 millions de francs français. Avez-vous eu connaissance de ce message ?
DDV : J’ai eu connaissance de ce message me semble-t-il au moment de l’affaire dite de la DGSE à la veille de l’élection présidentielle de 2002.
Qu’entendez-vous de l’affaire dite de la DGSE ?
DDV : Il s’agissait d’une éventuelle implication de la DGSE, dans une mise en cause du président Jacques Chirac, qui avait conduit le Président de la République à demander des explications au Premier ministre de l’époque Lionel Jospin, et au ministre de la Défense M. Richard
Vous n’avez donc eu connaissance de ce message qu’en 2002 ?
DDV : Je ne ’ai pas de souvenirs spécifiques de ce message. Je ne l’ai jamais eu entre les mains, mais j’ai dû avoir connaissance d’une information de ce type fin 2001 début 2002.
Quelques jours auparavant, dans un message en date du 18 octobre 1996, déclassifié par décision du ministre de la Défense en date du 22 décembre 2008, le chef de poste de la DGSE au Japon évoque la Tokyo Sowa Bank avec sa source non identifiée. La source indique que les relations du Président de la République avec cette banque, du temps où il était maire de Paris, étaient connues et que Tokyo Sowa alimentait même u, compte personnel de cette personnalité. Avez-vous eu connaissance de ce message ?
DDV : Non, je n’en ai pas de souvenirs. Je me rappelais de l’allégation contenue dans le message du 11 novembre 1996, mais pas de celles contenues dans ce message du 18 octobre 1996.
Il résulte de l’audition du général Philippe Rondot du 3 juin 2008 qu’il a été convoqué à l’Elysée, le 14 septembre 2001, par le président Jacques Chirac. A l’occasion de cet entretien où vous étiez présent, le Président lui a demandé de vérifier auprès de la DGSE les conditions dans lesquelles une enquête aurait été effectuée au Japon sur un supposé compte qu’il y aurait détenu. Etes-vous d’accord avec ses déclarations ?
DDV : Dans mon souvenir, il s’agissait en fait d’une demande faite au général Rondot, en accord avec le gouvernement puisque le Président de la République avait demandé des explications au Premier ministre M. Jospin sur ces allégations absurdes, qui à l’époque nous apparaissaient comme des manipulations susceptibles d’être utilisées dans le contexte électoral. C’est donc bien avec la conviction qu’il s’agissait d’allégations absurdes que nous avons souhaité une clarification totale dans ce dossier.
Toutefois, dès le 11 septembre 2001, il est indiqué dans les notes du général Rondot qu’il vous a rencontré à 12h20 et que vous avez évoqué ensemble "les affaires du Président de la République" et qu’il vous a ainsi exposé ce qu’il savait sur le compte de Jacques Chirac au Japon à travers les indemnités perçues localement, objet possible de l’intérêt de la DGSE. Est-ce exact ?
DDV : Je n’ai aucun souvenir de tout cela. Je sais que le général Rondot m’a rendu compte. Vous me dites que cette réunion a eu lieu trois jours avant sa mission officielle, je vous réponds qu’il s’agissait de la réunion préparatoire à l’entretien avec le Président de la République.
Que veut dire la mention "le compte Jacques Chirac au Japon à travers les indemnités perçues localement" ?
DDV : Je n’ai pas de souvenir précis de cet entretien, je pense qu’il peut s’agir des indemnités liées aux activités de Jacques Chirac comme membre de la fondation du prix impérial.
Lors de cet entretien du 11 septembre 2001, il est noté sur la fiche du général Rondot votre réponse sur ce point, à savoir "Le Président de la République a reversé ces sommes à une association, qui règle les déplacements et séjours de ses collaborateurs au Japon". Pouvez-vous nous expliquer de quoi il s’agit ?
DDV : le Président de la République, à l’époque Jacques Chirac, avait décidé de ne pas toucher personnellement ces indemnités et donc elles étaient utilisées pour des déplacements de collaborateurs.
Ces indemnités étaient conséquentes ?
DDV : Je n’en ai aucun souvenir.
Quelle était cette association ?
DDV : Je n’ai jamais eu à m’occuper de cette association, donc je n’ai aucune connaissance de cette association.
Pourtant, si le Président de la République avait missionné le général Rondot pour faire cesser des allégations absurdes et clarifier totalement le dossier, il est étonnant que vous n’ayez pas eu une connaissance plus précise d’une éventuelle association qui aurait pu gérer les indemnités perçues par le Président Chirac ?
DDV : Non, cela n’est pas étonnant, je n’étais pas chargé moi-même d’une quelconque enquête, cette tâche relevait d’une mission conjointe, confiée par le Président et le Gouvernement au général Rondot et au ministère de la Défense. Tous les éléments étaient dsponibles, c’est à dire que nous avons indiqué aux personnes qui faisaient l’enquête tous les éléments y compris l’existence de cette association, en toute transparence, nous n’avions rien à cacher bien au contraire puisque nous souhaitions que la part puisse être faite entre des allégations absurdes et la réalité de ce qui existait, lié au prix impérial.
Dans la fiche du général Rondot en date du 21 septembre 2001, il reçoit pour instruction d’envoyer un enquêteur sûr (de la DGSE) au Japon. Pourquoi ?
DDV : J’imagine que c’est dans le cadre de la mission qui lui avait été confiée. Le général Rondot, si ma mémoire est bonne, faisait partie du cabinet du ministre de M. Alain Richard et la mission qui lui avait été confiée était clairement une mission conjointe.
Quelques semaines plus tard, dans une autre fiche en date du 8 novembre 2001 lors d’une réunion à 20h15 avec le général Champtiaux, il est noté : "les affaires du président – l’enquêteur au Japon. Le compte de JC existe bien, il est alimenté TG à venir". Qu’avez-vous à déclarer sur ce point ?
DDV : Je n’ai aucune information sur le déroulement de l’enquête, mais sur ses conclusions. Je n’ai pas eu connaissance de cet entretien en particulier.
Même si vous n’aviez pas eu connaissance de cet entretien, que vous inspire cette mention selon laquelle l’enquêteur au Japon dit que le compte de Jacques Chirac existe bien et qu’il est alimenté ?
DDV : Je suppose qu’il ne peut s’agir que du compte de l’association, puisqu’il n’a jamais été fait mention d"un autre compte, lors de cette mission.
Vous ne connaissez pas le nom de l’association qui aurait eu un compte au Japon ?
DDV : Je répète que je n’ai jamais eu affaire à cette association. Je n’ai donc aucun souvenir du nom de cette association.
Parmi les documents saisi chez le général Rondot dans le dossier Clearstream, fiches et documents regroupés sous les appellations "affaires du PR" ou "affaires japonaises", il est évoqué le fait que Jacques Chirac aurait eu un deuxième compte au Japon. D’autre part, dans un livre publié l’an dernier par les journalistes Nicolas Beau et Olivier Toscer intitulé "L’incroyable histoire du compte japonais de Jacques Chirac", les journalistes publient une note datée de décembre 2004, d’un dénomme Stephen Church, responsable d’Analytica Japan, un cabinet de consultants, spécialisé dans le milieu financier japonais, note selon laquelle Jacques Chirac aurait détenu un compte bancaire au sein de la Nippon Shinko Bank. Avez-vous entendu parler ce de fait ?
DDV : Il y a eu beaucoup de ragots sur ce sujet. Je n’ai disposé d’aucun élément d’information spécifique sur ce point, mais je tiens à préciser que c’est Jacques Chirac, Président de la République, qui a saisi lui-même le gouvernement de l’époque à la fin 2001, pour que toute la lumière soit faite sur ces rumeurs qui apparaissaient comme des manipulations, visant à peser sur la campagne présidentielle de 2002. Si Jacques Chirac avait eu la moindre chose à se reprocher, aurait-il saisi le Gouvernement ? Aurait-il demandé une enquête conjointe ? Aurait-il pris le risque d’une mission d’investigation sur place ? Je crois que ces questions parlent d’elles-mêmes.
S’il y a eu effectivement confusion entre un supposé compte bancaire de Jacques Chirac à la Tokyo Sowa Bank ou dans toute autre banque japonaise et un compte bancaire au nom d’une association sur lequel étaient versés ses émoluments en tant que membre du jury du prix impérial, pourquoi le président Chirac n’a pas rendu publique cette information sur le compte bancaire de cette association pour faire cesser toutes ces rumeurs ?
DDV : D’abord le général Rondot n’a jamais évoqué devant moi l’existence d’un quelconque compte japonais occulte. Ni lui, ni aucune des personnes qui ont été chargées par le Président et le Gouvernement pour faire la lumière de cette affaire. Si un tel compte avait existé, nul doute qu’il aurait été rendu public. Par ailleurs, l’Elysée à l’époque n’a rien caché de l’existence de cette association, puisque vous avez rappelé précédemment que j’ai précisé son existence au général Rondot en charge de l’enquête. Enfin, l’expérience me conduit à souligner que rien, aucun argument, aucun fait, aucune information ne fait jamais cesser la rumeur maligne qui conduit à nourrir articles, livres, ou toute autre forme de spéculation.
En l’espèce, dans ce dossier, il convient de vérifier s’il existait des transferts de fonds de la Polynésie Française vers un compte bancaire de Jacques Chirac au Japon. Pensez-vous que si je lui demande, le Président de la République me fournira les éléments sur le compte bancaire de cette association pour que toute la lumière soit faite ?
Il ne m’appartient pas de répondre à la place de Jacques Chirac mais en tout état de cause, l’enquête indépendante qui a été menée à l’époque s’est saisie de l’ensemble du dossier et à ma connaissance les conclusions qui ont été les siennes ont été formelles.
Dans les documents déclassifiés obtenus auprès de la DGSE, il n’est jamais fait mention de cette association et d’un compte bancaire au nom de cette association. Pourquoi ?
DDV : Je rappelle qu’à l’époque, comme en témoigne les éléments que vous avez rappelés, j’ai fourni les éléments qui étaient en ma possession à ceux qui étaient en charge de l’enquête.
Voulez-vous dire par là que c’est la DGSE à l’heure actuelle qui a tous les éléments sur cette association et son compte bancaire ?
DDV : Je n’ai aucune connaissance particulière du dossier de la DGSE, mais j’ai donné au général Rondot les éléments d’informations dont je disposais.
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