Des immigrés du 3ème type parqués dans un camp de Johannesburg par des humains crétins. Une dinguerie SF, gore, politique.
Des aliens, Hollywood nous en a mitonnés des petits et des gros, des végétariens et des anthropophages, des rastas et des polymorphes, des vers et des très mûrs ! Aujourd’hui, Neill Blomkamp, surdoué venu d’Afrique du Sud, nous propose une rencontre du troisième type avec… une crevette géante. Les « Crevettes », surnoms des aliens de District 9, sont des créatures 50% humanoïde, 50% crustacé, mais 100% crados, de pauvres immigrés clandestins, parqués dans un ghetto pourri de Johannesburg depuis 28 ans (l’âge du réalisateur au moment du tournage !). Ils survivent tant bien que mal, subissent les violences de dealers et de la police, construisent des armes étranges et se défoncent avec de la bouffe pour chat. Déjà mis à l’écart, ils doivent être expulsés manu militari vers un camp de concentration, en plein désert. Chargé du transfert des extraterrestres pour le compte d’une affreuse multinationale, le très falot mais très consciencieux Wikus van der Merwe contracte un mystérieux virus qui va modifier son ADN. Il devient bientôt bien plus que l’employé du mois, quelque chose comme l’homme le plus recherché de la planète, sa mutation étant censé permettre de percer le secret de la technologie des armes aliens…
Précédé par une campagne de marketing viral absolument renversante et d’un buzz énorme, District 9 est une vraie bonne surprise. Petit protégé de Peter Jackson, Neill Blomkamp est un surdoué de la pub et du vidéoclip, il a notamment fait swinguer un robot Transformer pour Citroën. Comme son mentor Peter Jackson l’avait fait avec le très gore Bad Taste, Blomkamp fonce dans le lard avec ce premier long-métrage, véritable passeport pour Hollywood. En bon fan boy, il cite (pille) copieusement ses aînés, notamment RoboCop, La Mouche, Aliens, Independence Day, Starship Troopers… Et même si son projet présente des similitudes troublantes avec le méconnu Alien Nation (Futur immédiat, Los Angeles 1991), série B de 1988 écrite par Dan O’Bannon, avec James Caan dans le rôle principal, Blomkamp le propulse sur orbite grâce à ses petits bras musclés, son humour digne des frères Coen et ses choix de mise en scène.
Tourné en numérique HD entre deux émeutes à la machette en Afrique du Sud, Neill Blomkamp enchaîne dans un style très comics les séquences, décalées, drôles, bizarres, avant un déchaînement d’action pour un final 100% métal hurlant. Très malin, Blomkamp adopte la forme du « documenteur » made in YouTube, comme Cloverfield, et alterne fausses images d’infos, de caméras de surveillance ou témoignages. Un procédé ingénieux qu’il abandonne en cours de route, notamment lors des séquences de baston, avant d’y revenir vers la fin.
Malgré le côté bricolé et mal foutu, j’ai été constamment bluffé par le culot de Blomkamp - qui rappelle les débuts décomplexés de Sam Raimi ou John Carpenter – un cinéaste ultra-doué qui ose tout, fonce le pied vissé sur l’accélérateur sans que l’on puisse imaginer quelle sera sa prochaine dinguerie, sa nouvelle astuce narrative, son ultime secousse tellurique. En état de grâce, Blomkamp transforme une crevette peu ragoûtante en un personnage plus humain que tous les crétins racistes de son film. Car sous couvert d’un film de SF gore et déconnant, District 9 est aussi un véritable manifeste politique, tourné au pays de l’Apartheid (mais également d’actualité dans la France de Sarkozy et d’Hortefeux). Des populations migrantes, misérables, persécutées, parquées par le gouvernement en place et menacées d’expulsion, ça vous rappelle quelque chose ? Pour aller vite, on pourrait dire que District 9 va plus loin que Welcome de Philippe Loiret, avec en cadeau bonus des bastons à l’arme lourde et pas de Vincent Lindon. Carton dans le monde entier, District 9 va faire de son papa le nouveau Peter Jackson, le James Cameron de demain. On parie ?
Lire ou relire sur Bakchich :
District 9, de Neill Blomkamp avec Sharlto Copley, David James, Jaso Cope, Vanessa Haaywood.
En salles le 16 septembre
Je ne comprends pas ce que vous voulez dire.
District 9 est une production Peter Jackson. Jackson devait produire d’adaptation du jeu video Halo, avec Neill Blomkamp derrière la caméra. Le projet a capoté (trop cher) et le papa du Seigneur des anneaux et de King Kong a filé 30 millions de dollars à son jeune protégé pour qu’il mette en boîte District 9.
Voilà.