« Ma mère était une très belle femme ». Tel est le titre que Karlien de Villiers, dessinatrice Sud-Africaine, donne au récit de son enfance. Une bande dessinée parue aux Editions Ça et là, où le lecteur découvre la vie d’une fillette blanche rythmée par les derniers soubresauts de l’apartheid. Atmosphère morose et images décolorées…
On ne peut s’empêcher de penser au « Persepolis » de Marjane Satrapi quand on découvre « Ma mère était une très belle femme ». Tant dans leur forme que dans leur graphisme les deux bandes dessinées se ressemblent. Une autobiographie de Karlien de Villiers en images, qui retrace l’enfance de la dessinatrice dans une Afrique du Sud violemment agitée.
Les tons mats, légèrement décolorés ainsi que la mollesse des dessins forment un ensemble assez peu dynamique, qui contraste avec la violence des faits racontés. Un style bien particulier s’en dégage, qui colle parfaitement à une atmosphère à la fois dense, chaude et dure.
Karlien de Villiers naît en 1975 au Cap à la pointe de l’Afrique du Sud, dans une famille de classe moyenne ; où l’on pense que « les noirs ne sont pas des gens comme nous ». L’époque est celle des plages et des transports en commun réservés aux blancs, et les noirs sont appelés « Zulus ». Disparités sociales, préjugés raciaux et tensions politiques précipitent peu à peu le pays dans une période d’instabilité et de violences.
Après le divorce de leurs parents, pratique encore choquante pour la très pieuse communauté Afrikaans, la petite Karla et sa sœur apprendront que leur mère est atteinte d’un cancer. Et tandis que leur père se remarie, une bombe explose à Pretoria (attentat du 20 mai 1983)… Page après page, le récit s’alourdit, l’incompréhension grandit dans la tête de la petite fille, et le lecteur peine.
L’auteur a découpé les périodes de sa vie comme des albums d’images pour enfants. Elle y colle habilement les événements politiques, les conflits familiaux et le choc des cultures. Ça et là, au détour de la page, le regard croise une image sanglante, une phrase cruelle, toujours dépeintes avec une distance inquiétante. L’enfant, puis l’adolescente s’égare entre la pensée raciste, l’écrasante présence de la religion et le poids d’institutions trop rigides. Et, quand tout éclate, c’est comme si de rien n’était, comme un vague souvenir lancinant qui ronge lentement mais sûrement.
Une bande dessinée assurément réussie mais peu divertissante, on en ressort instruit.