Leonardo DiCaprio se balade dans des rêves hollywoodiens et Christopher Nolan repompe ses films préférés. Labyrinthique et visionnaire ? Non, simplement déjà vu !
Inception est sorti depuis une semaine et l’affaire semble entendue : c’est un triomphe en salles et la critique mouille sa petite culotte. Christopher Nolan serait donc « le nouveau Kubrick », et Inception un chef-d’œuvre « ahurissant », « un puzzle mental », « un Rubik’s Cube sophistiqué et jouissif », au scénario « visionnaire, labyrinthique, ambitieux ». N’en jetez plus… Depuis, j’ai vu la bête au Max Linder avec un public enthousiaste qui a applaudi, mollement quand même, à la fin. Et j’ai été profondément déçu. Pourquoi ? Parce que j’avais déjà vu Inception, repompage éhonté de Matrix, 007 et Mission : impossible . Pendant près de 2h30, on est dans le copier/coller, le repompage-hommage aux frères Wachowski, à Kubrick ou Welles dans le meilleur des cas, mais aussi à John Woo, la série des Freddy ou Rien que pour vos yeux avec Roger Moore pour les séquences les plus kitsch.
Le pitch du film : Leonardo DiCaprio se balade dans les rêves de riches industriels pour leur chiper de petits secrets ou pour leur implanter de nouvelles idées. Le concept de Nolan : empiler les strates de rêves, donner à voir le rêve dans le rêve, dans le rêve, dans le rêve : c’est un poil soporifique et pas très passionnant. Car quels sont les rêves de Nolan ? Des rêves érotiques, effrayants, mystérieux ? Non, des rêves hollywoodiens, balisés, déjà vus, sans une once de sexe, de sensualité, de peur. Tu as lu Freud, Nono ? Le réalisateur de Dark Knight aurait pu s’inspirer des cauchemars vénéneux de David Lynch ou de ceux de Lars Von Trier dans Antichrist, mais il préfère le jeu vidéo de plateformes : les rues de Paris qui se replient (pourquoi donc, alors qu’il faut faire croire au rêveur qu’il est en pleine réalité !), des beaux gosses en costard comparent leurs gros calibres et font pan-pan, s’envoient en l’air lors de séquences en apesanteur ou d’interminables poursuites à skis… C’est virtuose, mais plombé par des dialogues débiles (« On est dans quel inconscient ? »), froid et absolument dénué d’émotion. On applaudit le boulot des informaticiens, mais est-ce que l’on ressent quoi que ce soit ?
De plus, Inception manque pour le moins de finesse. Un exemple ? Le personnage de l’Architecte, interprété par la très fade Ellen Page. C’est le narrateur du film, le novice qui nous présente et nous explique l’action, notre porte d’entrée dans le labyrinthe des rêves. Et comment s’appelle ce personnage ô combien symbolique : Ariane ! Subtil, non ? Inception est un blockbuster bourrin et lourdaud qui tente de se faire passer pour un chef-d’œuvre conceptuel. Mais c’est pas parce que tu refais la scène finale de 2001 l’odyssée de l’espace que tu es le nouveau Kubrick. Alors oui, c’est étonnant de revoir la chambre Louis XVI que Kubrick avait abandonnée au-delà des étoiles. Mais Nolan a oublié qu’au cœur de tous les Kubrick, il y a un fond : un questionnement sur la nature humaine, une réflexion sur le libre-arbitre, les fantasmes, nos pulsions… Nolan-les-gros-sabots est un artisan très doué (Le Prestige était une petite merveille de mécaniques narratives), mais sûrement pas un grand cinéaste.
Je suis déçu, mais tout n’est pas à jeter dans Inception. La musique de Hans Zimmer est une de ses meilleures depuis Gladiator. Et contrairement à Matrix, desservi par un Keanu Reeves bien fadouille, la distribution d’Inception est absolument épatante : Leonardo DiCaprio, Joseph Gordon-Levitt Ken Watanabe et mention spéciale à mon chouchou, Tom Hardy, vu en moustachu musculeux dans Bronson et bientôt dans Mad Max 4. Dans les atouts, j’aurais pu mentionner l’originalité du sujet du film, à savoir faire naître une idée dans le cerveau d’une personne. Mais l’inception, je connais par cœur, d’ailleurs ma femme le pratique sur moi depuis des années : « Relève la lunette », « Ferme le dentifrice », « Range tes chaussettes sales ! » Je n’ai pas attendu Nolan pour vivre un cauchemar…
Inception de Christopher Nolan avec Leonardo DiCaprio, Marion Cotillard, Ken Watanabe, Tom Hardy, Cillian Murphy, Ellen Page, Joseph Gordon-Levitt, Michael Caine.
En salles depuis le 21 juillet
Lire ou relire dans Bakchich.info :
putain kèsske les gens peuvent s’exciter à propos de ce film ! j’aime bien, j’aime pas etc. on se croirait à une réunion d’évêques en train de décortiquer la bible ! au bout du compte, ça permet à l’excellent bakchich de voir si ses lecteurs existent, s’ils réagissent ou s’ils dorment. pas con !
comme je bosse par intermittence pour les délicieuses revues Xroads (rock) et surtout la géniale Brazil (cinoche) j’ai été souvent confronté à des diktats divers.
voir mon article sur mon site, à propos des forums :
http://pascalsamain.be/article.php3 ?id_article=268
bon, j’aime ce film et je m’en fous.
@+, p@sc@l
Je ne sais ce que vous voulez dire. Nolan est un sous-Kubrick, Nolan écrase Kubrick, Nolan se prend pour Kubrick (c’est ce que j’ai tendance à penser), que Nolan rend hommage à Kubrick…
En tout cas, dans Inception, il est évident que les rêves de Nolan sont des rêves tirés d’un continent noir et étrange appelé Cinéma. Plusieurs d’entre-eux évoquent le 2001 de Stanley Kubrick, je pense notamment aux séquences en apesanteur et à la scène entre l’enfant et son père dans la chambre-bunker, étonnante recréation de la chambre Louis XVI au-delà des étoiles où le cosmonaute vieillit et meurt, avant de ressusciter. Que veut dire Nolan avec cette scène finale ? Que 2001 est son "Rosebud", le film qui lui a donné envie de faire un jour du cinéma ? C’est une possibilité…