Goujat, arriviste, cupide. La plainte pour abus de faiblesse qui a fait naître l’affaire Bettencourt ne présente pas le photographe Banier sous son meilleur jour. Bakchich en dévoile quelques extraits.
A près de 86 balais, dame Liliane Bettencourt, du haut de la plus grande fortune française, a encore le panier bien rempli. Actionnaire majoritaire de L’Oréal, à la tête d’une grande fondation qui porte son nom, propriétaire foncier fort respectable, la gentille mamie affiche au bas mot 23 milliards au compteur.
Mais l’argent ne fait pas le bonheur. Des pauvres, disait le poète, c’est sûr. Des riches, c’était à voir. Et dame Bettencourt, avec toutes ses dents et ses milliards, n’aurait plus toute sa tête. C’est du moins l’avis de sa fille Françoise Meyers-Bettencourt, qui la trouve un peu palotte. Un brin faiblarde même.
Et c’est pour la protéger, qu’un peu avant Noël 2007, le 19 décembre, l’héritière s’est portée au secours de môman, en déposant plainte pour abus de faiblesse contre X, auprès du procureur de Nanterre, Philippe Courroye. Bettencourt, 86 ans et toutes ses dents, mais peut-être pas toute sa tête.
Il aura fallu une petite année avant que ce glorieux anonyme ne soit dévoilé, et que Bakchich, qui a défloré l’affaire en décembre dernier, ne dévoile le pots-aux-roses.
Derrière ce X, se cache à peine l’illustre François-Marie Banier, photographe jet-setteur et acteur à ses heures. Enfin se cache.
La fille de Madame Bettencourt n’y va pas de main morte pour dézinguer les manières et le peu de douceur du saltimbanque, attestation de proches qui l’ont vu à l’œuvre et secret de famille à l’appui.
En moins de dix ans, Banier s’est vu honorer de plus d’un milliard d’euros de dons par la veuve Bettencourt, principalement en contrat d’assurance-vie. Mais le bonhomme ne crache pas non plus sur les chèques bancaires, à en croire la liste dévoilée par l’avocat de Françoise Bettencourt, Maître Olivier Metzner :
« 2002 : de l’ordre de 11 000 000 d’euros sous forme de chèques bancaires
2003 : de l’ordre de 250 000 000 d’euros sous forme de chèques bancaires, donations et désignations en qualité de bénéficiaire (acceptant) de contrats d’assurance-vie
2004 : de l’ordre de 6 000 000 d’euros sous forme de chèques bancaires et donations
2005 : de l’ordre de 56 000 000 d’euros sous forme de chèques bancaires et donations
2006 : de l’ordre de 250 000 000 d’euros sous forme de chèques bancaires, donations et désignations en qualité de bénéficiaire (acceptant) de contrats d’assurance-vie
2007 : de l’ordre de 2 000 000 d’euros sous forme de chèques bancaires et donations obtenus entre les mois de mars et mai de cette année. »
« Cette liste ne saurait être exhaustive », précise Me Metzner.
Car qu’importe l’argent dépensé après tout, le chagrin est ailleurs. Dans les méthodes employées.
A en croire le texte de la plainte, les sommes ainsi obtenues l’auraient été « lors de périodes suivant immédiatement une hospitalisation. » Notamment en 2003 et en 2006. Pas classe. Et limite grossier de la part de Banier, à lire les attestations et témoignages reproduits dans la plainte. « Au mois de décembre 2006, Monsieur Banier était présent. Il harcelait Madame Bettencourt pour qu’elle lui fasse un chèque, ce qu’elle refusait. Devant son refus il a refusé de déjeuner et de dîner avec elle (…) alors qu’elle s’apprêtait à mettre du rouge à lèvres, il lui a enlevé des mains et l’a jeté contre le mur ». Au moins, cette fois-ci, n’a-t-il pas pissé dans les tasses, à l’instar de ce qu’il fit alors qu’il fréquentait Madeleine Castaing…
Banier a appris à se tenir et à se prémunir. Ainsi, rapporte un autre proche de la famille Bettencourt qui a produit une attestation judiciaire en ce sens. « Pendant plusieurs années, quand Madame Bettencourt allait déjeuner à l’extérieur avec Monsieur Banier, il lui arrivait de m’appeler pour me demander si elle avait bien pris son chéquier ». Prévenant garçon, qui n’hésite pas à dire ce qu’il pense des proches de sa protectrice. « Une attitude de dénigrement systématique envers sa fille (…) et ses petits-enfants, argumente la plainte, sans parler des propos médisants et indécents quant aux chances de survie de son mari ». Peu gracieux mais juste. L’époux de Liliane succombera en novembre 2007. Un malheur qui n’entame en rien l’entreprenant garçon. « François-Marie Banier a évoqué auprès de Madame Liliane Bettencourt le projet d’une adoption pour lequel il l’enjoignait de prendre contact, seule, avec Maître Jean-Michel Normand, Notaire à Paris, et ce quelques jours après le décès de M. André Bettencourt ». Un rendez-vous qu’elle prendra le 12 décembre 2007.
Pour désagréable qu’elle soit, la goujaterie n’est pas encore pénalement répréhensible. Et interrogé par les poulets, Banier n’a pas nié être sponsorisé par Madame Bettencourt.
Afin de démontrer l’existence d’un abus de faiblesse de Banier sur Bettencourt, encore faut-il arguer de la faiblesse de la dame. Et dès 2007, fifille lève un voile du secret sur une maladie dont souffre bien des personnes âgées, dont sa mère. « Une leucoaraïose hémisphérique » , diagnostiquée au moins depuis 2002, et qui s’accompagne de problèmes de concentration, « de pertes de mémoire, de crise d’angoisse, perte de conscience passagère de la réalité ».
Autant de désagréments qui feraient de dame Liliane une personne particulièrement vulnérable. Ce qu’elle dément avec force et conviction depuis l’éclatement de l’affaire, se prêtant même à une expertise psychologique auprès d’un médecin choisi par ses soins. Las, le proc’ de Nanterre, Philippe Courroye, exige toujours qu’elle se soumette à l’un de ses psys… L’affaire en est là.
Peut-être que Banier, qui sait si bien la prendre, pourrait jouer les intermédiaires…
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