La presse a attendu 2009 pour tomber sur le râble du patron de la Société Générale, Daniel Bouton, à propos de ses stock options…Pourtant, c’est une tradition maison depuis 1999.
On assiste depuis quelques jours à un déferlement de haine médiatique envers Daniel Bouton et ses 3 compères de la Société Générale. Reconnaissante, la banque a en effet annoncé le 18 mars dernier, son intention d’octroyer des stocks-options portant sur 320 000 titres dont 70 000 pour le seul « Dany le mal-aimé » qui a eu la décence de renoncer à cette douceur deux jours plus tard.
A la remorque de l’opinion ou du gouvernement –dans cette affaire on ne sait plus qui fait écho à qui- les commentateurs, l’écume aux lèvres, ont fait assaut de démagogie sur le thème « trop c’est trop ». Avant de jeter Dany avec les actifs toxiques, l’honnêteté intellectuelle eut exigé qu’on replaçât les choses dans leur contexte.
D’abord on oublie un peu vite que c’est lui et sa petite équipe qui ont miraculeusement récupéré 11,9 milliards de dollars dans les poches percées de l’assureur américain AIG en état de semi-faillite, en « enfumant » au passage, le contribuable yankee d’une jolie pincée de billets verts. Il suffit d’ailleurs de voir le scandale que ça a déclenché outre-atlantique, pour apprécier l’arnaque à sa juste valeur. Observons en outre qu’avec un sang froid extraordinaire, et dans le but évident de n’inquiéter ni ses actionnaires déjà à la peine, ni ses autorités de tutelle, la direction de la Société Générale s’était montrée d’une exquise discrétion sur l’existence de cette créance méga risquée. C’est à porter doublement à l’actif de Dany et de ses Dany’s Boys, d’avoir su mener à bien une mission aussi périlleuse.
Au lieu d’hurler avec les loups, les journalistes seraient bien avisés de se demander ce qu’il serait advenu de la Société Générale sans cette action de génie. On la disait déjà perdue après les 5 milliards d’euros évanouis début février 2008 et attribués, peut être un peu vite à Kerviel, alors imaginons un instant la situation sans les 12 milliards de dollars d’AIG…
Ensuite, sur les stock-options à proprement parler, Dany et ses boys sont victimes d’un regrettable malentendu. Jusqu’ici personne n’avait proféré le moindre propos un brin désobligeant sur sa légendaire faculté à lire le marché et à en tirer personnellement profit le cas échéant. Il était donc fondé à croire que sa cérémonie personnelle des Oscars durerait chaque année jusqu’à son départ en retraite.
Comment se fait-il qu’aucun spécialiste digne de ce nom n’ait mis en perspective les stock-options dont a bénéficié Dany, avec le programme de rachat d’actions de la Société Générale débuté, excusez du peu, en septembre 1999. Rien qu’en 2008, le document de référence 2009 de la banque fait état d’une annulation de 10 millions d’actions pour un montant total de 1 217 millions d’euros ; ça passe quand même difficilement inaperçu non ? Il eut été facile avant que le scandale n’éclate, de dire à Dany que, dans les circonstances présentes, il devait mettre au moins temporairement, un terme à ses petites affaires.
Dans l’indifférence ambiante, Dany et ses Boys se sentaient donc parfaitement justifiés à utiliser, comme par le passé, le programme de rachat d’actions de la banque combiné à celui d’attribution de leurs stock-options pour se préparer une retraite confortable. Des exemples ? Ils ne manquent pas :
Du 13 au 17 novembre 2006, la Société Générale rachète 1 million de ses propres actions à 129 euros pièce, et allonge donc 134 millions d’euros pour donner un brin de « peps » au cours du titre SocGen. Le 30 novembre 2006, Dany Bouton profite de l’aubaine pour céder 21 000 actions qu’il détient au titre de ses stocks options, au cours de 118 euros, pour un montant total de 2,5 millions d’euros. Et roule ma poule…
Du 4 au 22 décembre 2006, la banque rachète de nouveau 850 000 de ses actions à un cours compris entre 124 et 127 euros ; coût de l’opération, 106 millions d’euros dont on prive l’actionnaire pour Noël. Dany, lui, s’offre des étrennes digne de son rang ; le 20 décembre, il cède 30 000 actions à plus de 119 euros et fait rentrer dans la cheminée pour les fêtes, 3,6 millions d’euros.
Une fois dissipé le mal aux cheveux de fin d’année, les affaires sérieuses reprennent : du 15 au 19 janvier 2007, SocGen rachète 420 000 de ses actions à plus de 131 euros pièce. Elle y consacre 55 millions d’euros qui vont redonner du tonus à son cours boursier. Dany en profite donc pour mettre sur le marché, le 12 janvier, 10 000 actions au cours dodu de 122 euros la pièce, faisant de nouveau entrer sur son compte en banque 1,2 millions d’euros. L’année s’annonce faste…
Où étaient alors les critiques ? Y-a-il eu, à cette époque, des réserves, des remarques amicales ? Non. Dany était donc dans son bon droit à poursuivre son négoce. Dès début avril, la Société Générale reprend ses emplettes : du 02 avril au 29 juin 2007, elle rachète 805 000 de ses actions moyennant 114 millions d’euros. Au cours flamboyant du titre qu’il a largement contribué à maintenir, Daniel Bouton cède le 16 mai 2007, 10 000 nouvelles actions à 144 euros l’unité, soit un total de 1,4 millions d’euros. Observons au passage que son enthousiasme est communicatif : le lendemain, Monsieur Alix, l’un de la « bande des 4 » privé de dessert il y a quelques jours, vend à son tour 23 171 actions de ses stock-options au cours « boosté » de 142,93 euros, pour la rondelette somme de 3 311 900 euros…Le 15 juin, c’est Dany le Boss qui remet çà : 10 000 actions – c’est son chiffre porte bonheur – au cours de 135 euros pour un montant total de 1,3 million d’euros…
Et quelques grincheux voudraient priver Daniel Bouton de 70 000 malheureux stock-options supplémentaires ? Une honte ! L’actionnaire et lui seul a droit au chapitre. Il ne manquera sans doute pas de se manifester lors de la prochaine assemblée générale prévue le 19 mai 2009 à la Grande Arche de la Défense.
Aucun doute qu’entre gens de bonne compagnie, on demandera à Dany la raison pour laquelle ceux qui lui ont fait confiance depuis le 31 décembre 2004 en conservant leurs titres, enregistrent une rentabilité cumulée de – 41% (source : Groupe Société générale – document de référence 2009). C’est peut être finalement là qu’il faut rechercher la raison de leur courroux.
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Pautreb,
Je pense que les auteurs sont très second degré. Il n’y a aucun génie dans tout ça et il serait même interessant de connaitre le montant de la provision qu’avait constituée la SG pour faire face à un éventuel défaut d’AIG. ça a dû encore serrer pas mal les miches à la Défense. Là où Dany est plus malin, c’est de se servir du programme de rachats d’actions de la banque pour tirer, avec le flouze des actionnaires, les marrons personnels du feu…