Poker menteur et histoire belge à l’OM

Au sein de la plus belle ville du monde, le soleil de printemps annonce aussi le retour de parties anisées. De contrée. Un jeu, une institution plutôt, où la mauvaise foi fait loi. Mais la mode aidant, la terre de contrée s’est mâtinée de poker, où règne le bluffeur.

Mais le mélange des genres perd parfois un peu les joueurs, et leur public. A l’instar des dirigeants du plus grand club du monde [1] depuis l’annonce du départ d’Eric Gerets, coach belge de l’OM, le 29 avril dernier.

Vénéré par des supporters qui salivent à l’idée de voir leur Ohème, en tête du championnat de football, remporter le titre 16 ans après ; adulé des médias qui louent sa science et son franc-parler ; respecté par ses joueurs, « Le Lion de Rekem » a surpris tout son monde en annonçant son départ. et fendu, outre le coeur de toute une ville, la chaise de l’actionnaire majoritaire du club Robert Louis-Dreyfus, alias « Bob l’épongé » [2].

Sorcellerie belge

Un tremblement de terre difficile à endosser pour n’importe quel responsable du club. Aussi, depuis l’annonce, la chasse au coupable idéal de l’exil du sorcier belge est orchestrée.

Tout surpris, Bob l’épongé a découvert dans la Provence, qui est au président de l’OM ce qu’était la Pravda au Parti, qu’il était le seul et unique responsable de l’ire flamande. Et surtout le titre de la Provence « Je pars à cause de RLD ». D’autant que le Belge, s’il charge Louis-Dreyfus, avoue qu’il n’en veut pas à Pape Diouf le Président de l’OM, qu’il aurait aimé avoir des nouvelles de l’actionnaire après l’interview au vitriol de Dreyfus dans l’Equipe du 10 janvier, qu’on lui fasse signe pour une prolongation dès fin mars…

© Oliv’

Un peu rosse le flamand envers le milliardaire qui, s’il compte peu ses sous tient encore un agenda. Mais diable, de janvier à mars, Dreyfus était opéré à l’étranger. Bref un peu sur le flan. Le Belge n’était dans la confidence Et sitôt rentré, « Bob l’épongé » de convoquer une réunion au sommet à Zurich, le 23 mars. Avec un mandat clair pour le Pape de l’OM, Diouf, de prolonger l’entraîneur. Mieux. Pour boucler le dossier, il n’y a qu’à l’inscrire au conseil de surveillance qui tombe pile le lendemain. On revalorise plus aucun salaire de joueur, on n’en prolonge aucun d’ici la fin du championnat, mais on prolonge et on augmente l’entraîneur. Un conseil auquel Pape Diouf s’est fait porter pâle.

Et voilà une affaire rondement mené. Raté. Mais en cadeau un joli boxon. Un entraîneur en partance, des supporters qui crient vengeance et un président, Pape Diouf, qui joue avec les mots comme personne à noyer le poisson. « L’histoire de savoir si Eric Gerets a reçu une proposition n’est pas l’objet. A un moment donné, entre Eric et moi, nous savons parfaitement comment les choses se sont passées (…)Ensuite, qu’il y ait eu un délai, que peut être Eric à ce moment là a trouvé un peu trop long, ça c’est autre chose.  »

Coup de fil, bluff et mauvaise foi

Au poker comme à la contrée, après les annonces où se cotoient bluff et mauvaise foi, vient le temps d’abattre ses cartes. Et de démasquer les bluffeurs. Forcément un puisque Gerets, Diouf et RLD clament tous trois qu’ils voulaient voir le coach belge prolonger à Marseille.

Un brin furibard de devoir endosser une telle responsabilité quand il pensait le dossier bouclé, « Bob l’épongé » a, comme l’a écrit Bakchich , repris la main. Et somme Diouf, dès l’annonce de Gerets, de venir se justifier à Zurich le 1er mai dans l’après midi. Pour une petite explication de gravure… En langage diplomatico-marseillais, un éclaircissement. A savoir les raisons qui ont poussé Gerets à le charger, à ne pas prolonger. Mais surtout, le maintien de RLD dans l’ignorance quant aux négociations en cours, et leur échec.

Matamore sur les bords, Diouf a affirmé que cette réunion «  était prévu de longue date  »…(Ce qui laisse une piste de traduction du temps dioufien, trois jours est une longue date. A retenir). Mais le manque d’aise du Pape de l’OM depuis des semaines quant au cas Gerets laisse un peu songeur. Président le plus charismatique et le moins contesté de l’OM depuis Bernard Tapie, apprécié des supporters, si influent que même L’Equipe TV n’ose protester quand l’un de ses journalistes se fait virer par ses soins du centre d’entraînement, Diouf s’emporte à la moindre question sur son coach depuis un mois. Sans doute un petit souci d’ego face à un entraîneur en passe de le surclasser en terme de popularité, et son pendant à Marseille, de pouvoir. Suffisant pour ne pas prolonger le Belge, planter la négo et tenir Bob éloigné ? Le point crucial de la rencontre de Zurich.

Au sortir de l’entrevue, peu d’éléments ont filtré. Et chacun tient sa position. Diouf a maintenu devant son actionnaire qu’il avait fait une proposition au coach belge quand ce dernier ne se lasse pas de regretter n’avoir reçu aucune offre.

© Nardo

Mais la priorité pour RLD réside moins dans les explications de Diouf, que dans le maintien de Gerets. Malgré les rodomontades de Diouf, jurant grand dieu de L’Equipe au plateau de Canal + que RLD n’appellerait pas le coach belge, le facétieux milliardaire n’a pu s’en empêcher. Et a laissé maints messages sur le téléphone de son belge préféré dimanche.

Sans oublier qu’il reste un titre à conquérir. Au lendemain d’un match contre Toulouse au stade Vélodrome, l’OM occupe toujours la tête du championnat, tutoyant son premier trophée depuis 16…et le premier de l’ère Louis-Dreyfus. Signe d’accalmie, aucune banderole anti-Dreyfus n’a surgi des tribunes de supporters durant le match. Essentiel quand on sait qu’aucun « tifo » dans le Stade ne peut être introduit sans l’aval de la direction du club….

Méfi ! L’ambiance au conseil de surveillance du 6 mai promet d’être chaleureuse. Tout le monde n’a pas encore abattu ses cartes. Et la partie ne prend fin que le 30 mai, avec l’ultime journée de championnat.

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