Après les révélations de Mediapart sur la gestion opaque du musée du Sénat, l’entourage du président du Sénat s’affole. Bakchich publie les extraits d’une note interne ahurissante.
Depuis les révélations du site Mediapart, reprises dans le Figaro, sur les soupçons qui pèsent sur les gestionnaires du musée du Luxembourg, propriété du Sénat, le président Gérard Larcher et ses principaux collaborateurs cherchent visiblement à temporiser. D’autant plus que les mises en cause de la société gestionnaire du musée, SVO Art, et de son responsable, Silvestre Verger, ont provoqué, en décembre, l’ouverture d’une enquête préliminaire par le Parquet de Paris. Sans même parler de la démission, en octobre, des cinq Italiens du conseil scientifique [1], tous surintendants de célèbres musée italiens, susceptibles de prêter les chefs d’œuvre de Titien, Boticelli et autres Véronèse.
Le ton des Italiens était sans appel, comme le révélait le Parisien : « Devant la situation qui s’est créée au musée du Luxembourg et ne voulant aucun rapport avec M. Sylvestre Verger, écrivaient ces sommités, nous sommes contraints de nous retirer… »
Autant d’accusations qui mettent en cause le fonctionnement du musée sous le règne de Christian Poncelet, le très chiraquien prédécesseur de Gérard Larcher. Après tout, le bon président Larcher, allié du Château, pourrait aujourd’hui tourner la page. On l’a vu, à la demande de l’Elysée, chasser l’ancien Préfet de Police et collaborateur de Chirac, Philippe Massoni, qui avait trouvé au Sénat un modeste poste de conseiller avec voiture et chauffeur. Gérard Larcher pourrait bien aujourd’hui à éclaircir la gestion opaque du musée, qui date de son prédécesseur.
Hélas, le Palais du Luxembourg est une maison compliquée. Et il ne saurait être question pour le nouveau patron du Sénat de se fâcher avec quelques grands féodaux ; les principaux questeurs naturellement, le secrétaire général de la Questure et enfin, le secrétaire général du Sénat, Alain Delcamp.
Pour gagner du temps face aux attaques qui pointent dans la presse, Gérard Larcher a demandé la réalisation d’un audit. Hier mardi, lors de la réunion du bureau du Sénat, la réalisation du contrôle du bilan de la société gestionnaire SVO Art était encore évoquée. Lors de la conférence de presse qui a suivi, Gérard Larcher affirmait être totalement serein face aux papiers fort critiques parus dans la presse.
Au Sénat, certains commencent à craindre, en haut lieu, les possibles conclusions du fameux audit. Ainsi, Bakchich s’est procuré la copie d’une note interne de quatre pages, datée du 10 mars, adressée par le secrétaire général du Sénat, Alain Delcamp, au président Larcher. La lettre, sans en-tête, s’intéresse à l’« audit du musée du Luxembourg ». Et il y est question de l’ « accord » nécessaire entre les auditeurs et les audités pour rendre « l’audit acceptable ». Voilà une jurisprudence inédite où contrôleur et contrôlé se mettent d’accord, avant que tout contrôle intervienne ! « Je ne comprends pas comment vous vous êtes procurés cet écrit, s’insurge Alain Delcamp hier mardi au téléphone, il n’en existe qu’un seul exemplaire et le président Larcher l’a détruit ». Des notes sans en-tête que Gérard Larcher aurait détruit, voici d’étranges pratiques !
Au service de presse de la Présidence du Sénat, on semble embarassé : « Le président Larcher et son directeur de cabinet voient très bien de quelle note il s’agit, mais elle n’engage que le secrétaire général du Sénat et il n’y a eu aucune suite. D’autant plus que monsieur Delcamp n’a aucune compétence sur la gestion du musée ». Et de conclure : « C’est une note de suggestion, expliquent les collaborateurs de Larcher, qui n’a pas été suivie ». Un concept original, « la note de suggestion » et surtout une façon délicate de botter en touche !
La note du secrétaire général à la Présidence, datée du 10 mars, que Bakchich s’est procurée, est fort instructive, comme on peut en juger ci-dessous.
Voici, grossièrement résumé, le contentieux entre le gestionnaire du musée, Silvestre Verger, et son principal organisateur d’expositions, Patrizia Nitti, une spécialiste reconnue de la Renaissance italienne.
La note reste naturellement silencieuse sur le lourd désaccord financier entre M. Verger et Mme Nitti qui ont amené cette dernière à porter plainte. Le document ne dit rien non plus des filatures organisées par certains collaborateurs de la Présidence contre madame Nitti. Depuis, le concessionnaire du musée, M. Verger, a tenté d’organiser, seul, une exposition, « Filippo Lippi », qui a reçu un accueil plus que mitigé. « La déception est de taille », notait une critique assassine du journal la Croix.
Peu importe pour le secrétaire général du Sénat, Alain Delcamp, qui, sans même attendre le résultat de l’audit décidé par la Présidence, fait connaître à Gérard Larcher son sentiment : la gestion de SVO Art, écrit-il dans sa note, aura été irréprochable, comme on peut le lire ci dessous.
Prenant ouvertement la défense du concessionnaire, le secrétaire général de laisser entendre qu’il aurait même, si l’audit était réalisé, quelques bonnes raisons de porter plainte contre le Sénat. Et de mettre en avant le fait que la société qui pratique l’audit, Lord Culture, avait été partie prenante à l’appel d’offre initial.
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Fort de ses certitudes sur la qualité du concessionnaire, SVO Art, le Secrétaire général propose à monsieur Larcher, toujours dans sa note, une approche nouvelle du concept d’audit. La société de conseil en stratégie « Lord Culture », chargée de cette tâche, devrait conclure, plaide-t-il, une sorte d’entente préalable avec le concessionnaire. De l’inédit !
Le message est clair. Pas question que les intérêts du concessionnaire du Musée du Luxembourg, adoubé par les hauts cadres du Sénat, soient remis en cause. Et peu importe l’existence d’un audit, le dépôt d’une plainte, la publication de multiples articles négatifs dans la presse, l’écroulement du comité scientifique et la baisse drastique d’affluence au Musée. « Cette note n’engage que son auteur », a répondu monsieur Larcher aux questions de Bakchich.
L’initiative du secrétaire général, qui date du 10 mars, n’avait pas provoqué, jusqu’à présent, le moindre étonnement de la part de monsieur Larcher et de son directeur de cabinet. Mieux, dans un premier temps, leur service de presse avait répondu à Bakchich n’avoir aucun souvenir de l’existence d’un tel document. Et la Présidence du Sénat s’était contentée de relancer une vague plainte à Nanterre contre un ancien collaborateur du Sénat soupçonné d’être un des auteurs des fuites. Rien qui ressemble à la plus petite remise en cause.
Autant de dénégations et de retards à l’allumage qui ne traduisent pas une volonté de voir clair dans les comptes opaques du musée du Luxembourg !
Lire ou relire dans Bakchich :
[1] Antonio Paolucci, directeur général des musées du Vatican et ancien directeur des musées de Florence, Francesco Buranelli, secrétaire de la Comission pontificale pour les biens de l’Eglise, Giandomenico Romanelli, directeur des musées de Venise, Nicolas Spinosa, surintendant des musées de Naples et Claudio Strinati, surintendant des musées de Rome
Quel imbroglio destructeur autour de ce musée du Luxembourg ?
Il y a dix ans ce musée était à l’abandon. Le Sénat confie à la société SVO ART la gestion de ce magnifique espace en plein coeur de Paris. Depuis y sont organisées par le Sénat des expositions de qualité qui attirent un public très nombreux. Cette initiative contribue fortement à améliorer l’image du Sénat et à dynamiser la consommation cultuelle à Paris. Sans que cela ne coûte rien au contribuable si l’on en croit les déclarations des uns et des autres. Et à la plus grande satisfaction de certains hauts responsables du Sénat si l’on en croit cette note publié sur Backchich.
Ou est le problème ? Sont-ce les jaloux et les aigris qui se sont mis au travail pour détruire ce qu’ils n’ont pas inventé ou n’arrivent pas récupérer ? Mr Larcher est-il réticent à développer et défendre une initiative de son prédecesseur ?
J’ai du mal à comprendre pourquoi certaines personnes s’acharnent à démolir à un moment ou beaucoup de choses s’écroulent autour de nous !