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« La République Marseille » à Bobigny

Bakchich TV au festival Résonances / samedi 17 octobre 2009 par Anthony Lesme
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Le Festival Résonances, accueille jusqu’au 20 octobre à Bobigny (93) le réalisateur Denis Gheerbrandt, auteur de 7 films sur Marseille. Un regard aigu sur les nouveaux visages de la ville-monde méditerranéenne.

« Quand vous dites à des gens qu’ils n’existent pas, manque de bol… ils réalisent qu’ils existent, et c’est cette révélation que je cherche à filmer. » Fil rouge de l’œuvre de Denis Gheerbrandt, cette révélation des personnages se réalise face à l’adversité. Il y a des combats violents comme la lutte contre des entreprises immobilières, prêtes à tout pour chasser des habitants démunis. Il y a aussi des combats cachés où la solidarité d’antan fait place à un individualisme sans concession. Perte du bonheur, violence au travail, combat pour l’éducation… Dans ces challenges où monde ancien et modernité vivent ensemble, les êtres se font écho. Et Denis filme.

Marseille est le dernier terrain d’observation. Résultat : sept films pour six heures de bande ! le tout en projection au festival Résonances. En suranné, « la catastrophe de la désindustrialisation ». Le Marseille des anciens dockers et des ouvriers est étudié de près. L’ancien monde rouge, populaire, fait place à la marmite des cités. Les ghettos remplacent les préfabriqués. Le pouvoir politique joue les abonnés absents, trop occupés à « embourgeoiser » le centre-ville. La solidarité existe encore mais au fur et à mesure des témoignages, on a l’impression que c’est le désespoir qui résonne davantage.

Les femmes de la cité de Saint-Louis

Cité ouvrière depuis 1926, la cité Saint-Louis vivait quasi en autarcie. Travaillant et vivant ensemble, les mariages s’y sont multipliés et un lien social très fort unissait tous les habitants. Mais la fermeture des usines provoquent la vente de certaines maisons jusqu’ici en location. Les femmes, toujours plus militantes que les hommes à Saint-Louis, s’inquiètent des changements avenirs et craignent la rupture. « Ce qu’elles mettent en valeur, explique Denis, c’est bien sûr on vit dans un mode plus confortable mais on vit dans un mode dévitalisé. Un mode qui n’a plus de prix car ce qui fait le prix de la vie c’est de ne plus être seul et là, on se retrouve dans un mode isolé, esseulé. Chacun devant sa télévision. Bien évidemment… c’était pas drôle d’aller au lavoir mais quand on y allait, au moins on se racontait de bonnes blagues, disent-elles. »

Le Centre des Rosiers

« Les rosiers c’est l’antithèse de la cité des femmes. On voit d’un coté une cité cohérente et de l’autre coté un monde proche de l’explosion. La cité des Rosiers, dans les quartiers nord est immense. 600 logements où s’accumulent une misère incroyable. 70% des chefs de famille sont au chômage. Les enfants ont pour modèle dominant ce chômage. Difficile de leur dire d’aller travailler à l’école ou ailleurs. On leur dit qu’il faut parler français mais ils parlent à peine leur langue d’origine. Et on sait qu’une langue d’origine bien maitrisée facilite l’apprentissage d’une seconde langue… Ce centre social essaie de faire « société » là où tout pète dans tous les sens. Et où le seul modèle alternatif est celui de la délinquance, structuré autour du commerce de la drogue. C’est une contre-société qui se met en place avec les valeurs du capitalisme mais en beaucoup plus violente. On est simplement dans une loi du plus fort qui est sans masque. Les individus ont plus de repères, plus de lois. C’est comme ça qu’un homme de trente ans met un coup de couteau à un jeune de 16 ans. »

La République Marseille

La rue de la République est l’empreinte hausmanienne par excellence de la ville. Construite sous Napoléon III, située derrière le port, entre le centre-ville et la Joliette, la rue était jadis florissante. Après l’effondrement du commerce maritime, la population était jugée « fragile » par des opérateurs immobiliers« Quand arrive cette opération qui consiste au rachat des deux tiers de la rue, y a une espèce de complicité entre un fonds de pension américain et des méthodes presque mafieuses. Ils ont engagé des médiateurs qui ont pratiqué ce qu’il y a de pire, un mélange entre le clientélisme et la violence. En gros, si t’es gentil on te filera les primes, on te trouvera des logements qui seront bien. Si tu fais mine de résister, et bien on te cassera. Beaucoup ont cédé mais certains ont résisté.

Ce qui m’intéresse, c’est ce double processus : la lutte révèle les hommes et les hommes se découvrent dans la lutte. L’association « Centre ville pour tous » en est l’illustration. Chacun venait, exprimait son problème. Et ce problème devenait l’affaire de tous, un cas d’école qui permettait au groupe d’avancer. Comprendre la tactique de l’adversaire et pouvoir ensemble y répondre. Dans l’exemple qui suit, ils ont cherché en Mme Benmohammed le maillon faible. Une femme seule, une femme malade avec trois enfants…  »

Gheerbrandt dirige sa pensée : « Le propos global n’est pas de faire une archéologie conservatrice, c’est-à-dire de faire une photographie d’un monde qui se meurt. Histoire de faire couler du béton dessus. Non. C’est de dire : Là, ce monde qui est en train de mourir, ce monde qui est en train de perdre un certain nombre de fonctionnements, une manière de vivre qui fait le prix de la vie ; et bien ce monde, on le perd et la question est de savoir comment on va pouvoir le réinvestir dans cette nouvelle économie sociale. Et ça parait très difficile. »

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3 MESSAGES

Forum

  • « La République Marseille »
    le vendredi 16 octobre 2009 à 08:54

    Il va en faire quoi Gaudin de tous ces pauvres, avec son projet immobilier ?

    Gaudin a renforcé les quartiers riches et a laissé les quartiers nord se dégrader un peu plus, ces quartiers sont devenus des zones de tiers monde.

    • « La République Marseille »
      le vendredi 16 octobre 2009 à 15:59, lolosormiou a dit :

      Gaudin n’a rien aggravé malheureusement je suis né à Font-Vert puis parti aux Chute Lavies à l’âge de 2 ans (j’en ai 37) les Rosiers sont une cité qui est depuis toujours dans un triste état car elle était au départ une cité qui a été construite pour les personnels des administrations locales hélas elle a rapidemment sombré dans le trafic de drogue dans les années 80 qui ont conduit les habitants d’origine a déménager en masse pour finalement la laisser à des personnes qui vivent de revenus dérisoires et qui la plupart du temps n’ont pas la capacité financière d’assumer leurs loyers donc voilà où en sont les Rosiers.

      Ca me touche d’autant plus que des amis que j’adorais puisqu’on allait ensemble au lycée habitaient là. Je pense sincèrement qu’avec un bailleur social et des loyers plus abordables on aurait pu éviter celà maintenant le mal est profond et forcément plus compliqué a arranger.

      Mais il n’est jamais trop tard pour bien faire et je souhaite bon courage au centre social pour arriver a faire quelque chose surtout pour les enfants :)

      • « La République Marseille »
        le samedi 17 octobre 2009 à 17:15, Anthony lesme a dit :
        Merci pour vos commentaires. Une précision que je voulais ajouter et dont le réalisateur m’a fait part. Un sentiment d’appartenance est largement répandu chez les Marseillais. Fierté d’être Marseillais, des quartiers nord, d’une cité ou même d’un bloc. Une certaine "paix" demeure dans les quartiers. Si l’état des cités marseillaises est aussi pourri que celles d’Ile de France - marseille n’est pas l’exception française comme on l’a tant entendu en 2005 pour la crise des banlieues-, reste qu’il n’y a pas vraiment de violences d’un quartier à l’autre. Pas de bandes qui se font la guerre comme en Ile de France. Selon Gheerbrandt, "on connait les gars de la cité voisine, on se rencontre à la plage ou on joue au foot ensemble." "Il y a une certaine paix à ce niveau là et les sentiments d’appartenance à la ville ou son quartier jouent positivement". Voilà ce que je pouvais rajouter. A ceci près que les choses peuvent toujours aller vers le pire. Il y a un tel sentiment d’abandon… Que ce soit par les édiles, la presse ou n’importe quoi… on se demande bien comment les choses peuvent tourner, y compris à Marseille. Gheerbrandt emploie le terme de contre-société pour le commerce de la drogue. En 2005, Marseille s’était enorgueillit de ne pas avoir vécu d’"émeutes" comme dans le reste de la France… c’était grâce au fait que les cités faisaient partis de la ville, que les politiques subventionnaient des associations, ect… Sauf qu’à Marseille, des éducateurs, des journalistes avec lesquels j’ai pu discuter m’ont dit que rien n’avait bougé sur Marseille parce que le commerce de la drogue est peut-être mieux structuré qu’ailleurs. Des gosses ont mis le feu à quelques bagnoles, immédiatement, m’a dit à l’époque un éducateur de la PJJ, les gosses se sont fait roués de coups. le message était clair. "Pas de ça chez nous, c’est mauvais pour le business". C’est ça aussi qui est inquiétant. C’est la manière dont la "bonne société" se rassure et comment à l’inverse l’"autre société" tire les ficelles et font plonger des gosses dans leurs mailles.
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