A cause de l’inéligibilité de l’ancien maire Serge Dassault, coupable d’achat de voix, de nouvelles élections ont eu lieu dimanche 4 octobre à Corbeil-Essonnes. Résultat, Dassault est toujours là.
Article publié le lundi 6 octobre à 00h00 et actualisé le jeudi 8 octobre à 12h30
A quelques pas de la mairie de Corbeil-Essonnes, le petit local transparent des Verts est en émoi ce dimanche soir d’élections, 4 octobre. La foule qui n’a pu entrer faute de place, à vue d’oeil une soixantaine de personnes, s’est rassemblée autour du bureau, impatiente de connaître l’identité de l’heureux élu. Les résultats des élections municipales partielles, qui doivent désigner le successeur de Serge Dassault, destitué le 8 juin dernier de ses fonctions de maire, pour achat de voix, tombent, bureau de vote après bureau de vote. A l’intérieur, s’activent Jacques Picard et Carlos Da Silva, candidats Vert et PS au premier tour, qui ont rallié la liste communiste, majoritaire. Plus une belle poignée de militants. Une femme entre, bras dessus bras dessous avec Manuel Valls, député-maire socialiste d’Evry : « Alors, on en est où ? » Il est 20h30, le dépouillement des bulletins de vote commence. Deux heures passent, et enfin, les derniers chiffres s’affichent sur l’écran. Total des votes exprimés : 10 354, bulletins nuls : 175, Michel Nouaille (PC) : 5164 soit 49,87 %, Jean-Pierre Bechter (UMP) : 5190 soit 50,13 %. C’est écrit, la victoire revient à Jean-Pierre, le second couteau de Dassault. Ici, on compte 26 voix de différence. Officiellement, ce sera 27. Avec près de 50 % d’abstention.
Un bide, qui signe aussi la victoire de l’UMP. Ou plutôt, et c’est Bechter lui-même qui le dit, celle de Serge Dassault. Des Pinsons, propriété cossue du milliardaire, où l’UMP fête son élection, Jean-Pierre lance aux caméras : « C’est la quatrième victoire de M. Dassault contre les communistes ». Une façon de fêter les vingt ans de la chute du mur.
Michel Nouaille a, pour son discours, investi les locaux de la mairie. Il demande que les bulletins de quatre bureaux de vote, dont le n°20, au coeur des Tarterêts, un quartier populaire de Corbeil où Jean-Pierre Bechter a devancé le Parti Communiste d’une centaine de voix, soient recomptés. Et hop, c’est reparti pour un nouveau calcul ! Qui ne change rien. La place de l’Hôtel de ville, comble, est encadrée par les forces de police. De toute la soirée, il n’y aura pas de débordements. Même les insultes se font rares : un seul homme laisse échapper un « Dassault enculé ! ».
Dans les escaliers qui mènent à la salle du Conseil, les rumeurs, elles, fusent. Dassault aurait, « comme lors de la campagne de 2008, payé des jeunes, pour qu’ils appellent à voter pour son candidat », chuchote une femme.
Et, sur la place et dans le bistrot encore ouvert, les Corbeil-Essonnois font des confidences. Ici, on l’accuse d’avoir distribué de l’argent, là, on s’étonne des méthodes du « vieux ». Serge Dassault aurait tenté de charmer les quartiers populaires, en organisant des rendez-vous un peu particuliers. « Il a organisé une soirée méchoui à l’Hermitage », témoigne une femme, confortée par sa voisine de table. Qui lâche : « Des pressions ont été exercées à la Nacelle, le quartier “européen” ». Plus loin, un homme témoigne, plus précisément : « Ce matin, aux Quatre Vent, [un bureau de vote des Tarterêts] il y avait des jeunes devant le bureau, qui disaient : « votez B., votez B. ». Et une femme d’ajouter : « Samedi, une trentaine de pro-Bechter faisaient sa campagne aux Tarterêts ». Un autre : « A Montconseil, ils ont collé une affiche “Votez Bechter” sur un panneau de Nouaille. Un expert est même venu constater la dégradation ». Vrais ou en fantasmatiques, la multiplicité de ces témoignages laissent pantois. Tant et si bien que le candidat défait a appelé les Corbeil-Essonnois à venir témoigner des méthodes rocambolesques, voire illégales, du duo Bechter-Dassault.
Le vieux Serge n’a pas quitté la ville. Omni présent pendant la campagne, posant aux côtés de son candidat sur les affiches officielles et menant sa campagne à la baguette. Et ce soir, il est de la fête… Aux questions des journalistes sur ses fonctions futures, ni lui, ni son second, ne répondent sérieusement. Une certitude, Dassault gardera, en tant que directeur de cabinet, un bureau à la mairie. Mais dans le fond, quand Bechter est l’ombre du beau Serge, quand Jean-Pierre est à la fois le conseiller politique et médiatique (au Figaro et au Quotidien de l’Essonne) du vieux Dassault, qu’importe que ce soit l’un ou l’autre qui siège dans le bureau du maire !
De son côté, la gauche, désunie, réfléchit une fois de plus à une alternative possible. Le Parti Socialiste a annoncé, jeudi 8 octobre, qu’il déposerait un recours devant le Tribunal administratif. Soutenu par les Verts, le socialiste Carlos Da Silva ne semble pas vouloir être, sur ce point, rejoint par le Parti Communiste.
Tout changer pour que rien ne change, et ainsi se vide et se remplit la Corbeil.
Chez Serge Dassault, l’avionneur-proprio du Figaro, la tradition est à l’autocélébration. Héritier putatif du truculent Serge dans son fief de Corbeil-Essonnes, Jean-Pierre Bechter, fidèle parmi les fidèles, a fort bien retenu la leçon.
Nouveau maire UMP à la mairie de Corbeil-Essonnes, Jean-Pierre use et abuse de la com’, dans un journal qu’il connaît bien. En pleine campagne municipale, lui et son ami Serge étaient ainsi célébrés dans Le Républicain de l’Essonne. Un hebdomadaire diffusé à environ 18 000 exemplaires, dont le propriétaire n’est autre que Serge Dassault et son p-dg, Jean-Pierre Bechter… Ainsi, la semaine précédent le premier tour des élections, qui ont eu lieu le 27 septembre, Le Républicain de l’Essonne consacrait la moitié de sa page 3 – une page stratégique – au « combat de Jean-Pierre Bechter et Serge Dassault pour la renaissance de Corbeil-Essonnes ». Avec, en prime, une large photo de son équipe candidate, et au centre, Serge Dassault et son épouse Nicole (colisitière). Les sept autres prétendants se contenteront de quelques lignes chacun, en bas de page. Même coup de pub la semaine du vote, où la page 3 présente un face à face entre Jean-Pierre Bechter et Carlos Da Silva, le candidat socialiste ; et son verso une longue interview de… Serge Dassault !
Après l’affaire des achats de voix, appelons cela un regain de démocratie.
Lire ou relire sur Bakchich.info :
Un sénateur UMP de l’Essonne, qui vend des avions et de la presse, et dont le nom est Serge Dassault. Un homme connu, par conséquent, jusques au royaume de Belgique, pour sa vive brillance (qui fait comme un fanal dans la nuit des idées).
Vient (…)
Je suis tellement dégoutée je ne peux plus lire ces articles sur tout ces salauds impunis !
relaxe requise pour Pasqua dans l’affaire de l’angolatte, relaxe requise pour Chichi dans les affaires de la Mairie de Paris, réélection officieuse du parasite-miliardaire qui a vécu toute sa vie sur les contrats d’Etat, justice aux ordres du pouvoir, et des nantis application des lois pour les petits, à quoi bon se battre ?
Tu parles que Dassault débouche le champagne en dansant de joie ! C’est pas cette fois encore qu’on va découvrir ses "cadavres" dans les placards de la mairie.
Quoique 27 voix c’est pas bézef. M’étonnerai pas qu’il y ai encore anguille sous roche… et que le candidat de gauche ne fasse appel des résultats.