Après trois jours de réunions, tables rondes et autres conférences-débats, Laurence Parisot peut se montrer satisfaite du dernier raout patronal. Notamment pour les tirades hautes en couleurs des participants. Florilège.
Bonne humeur de rigueur. Pour l’édition 2009 de son université d’été, le Medef a voulu conjurer un climat économique, quoiqu’on en dise, toujours morose en affichant ses espoirs de « Temps nouveaux ». Du coup, les organisateurs ont un peu forcé sur le Technicolor. Papillons multicolores dans les allées du campus, Laurence Parisot donnait de sa personne en arborant ses éternels pulls violets ou verts fluo, volant presque la vedette au moine bouddhiste orange, Mathieu Ricard. Quant aux adhérents, ils étaient, eux, invités à revêtir le polo bleu lagon siglé Medef.
« Tu vas voir c’est vraiment sympatoche », glissait une adhérente à son voisin en faisant la queue, pour obtenir un pot de glaces Haagen-Dazs, partenaire de l’événement. « Et puis ça fait du bien de faire marcher un peu ses méninges ».
Parce qu’on a cogité sévère à Jouy-en-Josas. « Je déclare cet espace anti-idées reçues, anti-préjugés », avait d’ailleurs prévenu, en ouverture, la patronne des patrons. Philosophes, écrivains ou artistes étaient d’ailleurs invités à venir enrichir la réflexion des chefs d’entreprises. Toujours experte de la com’, et en campagne pour sa réélection l’an prochain, Parisot a organisé des rencontres plutôt iconoclastes… Voire totalement improbables. Ainsi, l’ex-otage des Farc, Clara Rojas, s’est retrouvée à la table du Pdg de Total, Christophe de Margerie, à réfléchir à l’essence de la liberté en compagnie du philosophe Raphaël (Quatre consonnes et trois voyelles) Enthoven… Subtil et du meilleur goût.
Lech Walesa, en invité d’honneur, a été présenté comme « le plus grand syndicaliste du siècle », mais a surtout été applaudi, la salle debout, comme icône de la lutte contre le communisme. MAM, la très traditionnelle ministre de l’Intérieur, était elle inscrite au débat intitulé « Surveiller et punir », en compagnie de Florence Aubenas. Michel Foucault, nouveau gourou du Medef ?
Ces rencontres de choc ont donc donné lieu à quelques tirades de haut niveau : « Je me suis senti libre le jour où j’ai jeté les bas de ma gouvernante que je détestais », a ainsi raconté à la tribune avec son ton inimitable Frédéric Mitterrand, quand Laurence Parisot, toujours en phase avec la société réelle, expliquait qu’on pouvait « faire une typologie des bébés d’ aujourd’hui : ceux qui naissent avec un blackberry dans la main et ceux avec un iPhone ». Christine Lagarde, très inspirée, a elle parlé à plusieurs reprises de « l’éthique à double dividende, à la fois individuelle et collective ». Comprenne qui pourra.
Parce que, malgré l’éclectisme apparent, le fil directeur de toutes ces tables rondes était qu’après la crise, plus rien ne serait comme avant. « Le capitalisme sera éthique ou ne sera pas », décrétait-on ainsi à une table ronde où étaient réunis, en vrac, le Pdg de la BNP, Christine Lagarde ou Laurent Fabius. Puisqu’ils le disent. Henri Guaino, appuyé par le nouveau ministre en charge de l’Industrie, Christian Estrosi, a lui rappelé que la politique industrielle était de retour, que s’en était fini de la fuite des usines. Là encore, c’est comme si c’était fait.
Côté politiques, le rendez-vous de rentrée des patrons aura été un excellent cru pour Laurence Parisot qui a réussi à réunir pas moins de douze ministres et secrétaires d’Etat : Christine Lagarde donc, Roselyne Bachelot, Eric Woerth, Christian Estrosi, Michèle Alliot-Marie, Luc Chatel, Frédéric Mitterrand, Nadine Morano, Nathalie Kosciusko-Morizet, Dominique Bussereau, Bruno Lemaire, Rama Yade et Eric Besson se sont bousculés sur les pelouses du campus d’HEC. Trop heureux de cette tribune à la gloire des « temps nouveaux ».
Lire ou relire dans Bakchich :
Permettez-moi d’ajouter à cet excellent article ce lien invraisemblable : http://www.decroissance.org/ A mon sens, ce lien tient pourtant plus de la logique dans ce qu’elle a de plus simple que de la fatalité.
Ne vivons pas une époque formidable ?