Comme le révélait Bakchich, la direction de l’AFP a annulé le plan de départ volontaire, tentant dans le même temps de faire porter le chapeau aux syndicats. Tout ça sur fond de réforme de statut.
Les temps sont durs pour Pierre Louette, patron de l’Agence France-Presse (AFP). Les syndicats, vent debout contre son projet de réforme du statut de l’AFP, l’attaquent sur tous les fronts, et le calendrier imaginé par le haut fonctionnaire est un poil grippé. Il le reconnaît d’ailleurs dans une lettre adressée le 16 novembre aux personnels : « Depuis plusieurs semaines, des projets importants pour l’Agence et ses personnels sont au point mort ou presque. » Un courrier cosigné par le directeur de l’information Philippe Massonnet et Jean-Pierre Vignolle, le directeur général, que Bakchich a pu lire, dans lequel les trois pontes appellent à la « responsabilité de tous et de chacun ».
C’est qu’avec une diminution du chiffre d’affaires de 7 millions d’euros entre 2008 et 2010, il est urgent pour l’AFP de poursuivre son développement – Reuters ou AP ont déjà une longueur d’avance – tout en soulevant de nouveaux fonds. Une équation des plus complexes quand les syndicats se montrent intraitables sur l’indépendance de l’agence.
Le déménagement d’un pôle multimédia dans de nouveaux locaux rue Vivienne ? Bloqué. Le plan de départs volontaires proposé par la direction ? Bloqué. À cela faut-il ajouter la crise des relations contractuelles avec la presse quotidienne régionale. Après Paris Normandie et la Provence, c’est au tour de Nice-Matin, Var-Matin et Corse-Matin de résilier en partie leur abonnement à l’agence.
Le bon Louette a donc commencé à faire le tour des services pour tenter de convaincre les salariés du bien-fondé de son projet. Sans toutefois rencontrer une folle adhésion. « Personne ne sait ce qui va se passer, lâche un salarié. C’est plutôt l’Agence France-Stress en ce moment. » Le PDG fait donc le tour des médias pour expliquer, malgré un projet de réforme du statut ambigu, combien il était attaché à l’indépendance de l’agence, thème sur lequel se cristallisent toutes les inquiétudes. Mais depuis le procès intenté par la direction de l’AFP contre le secrétaire du CHSCT, Philippe Capdevielle (CFDT), pour s’être opposé à un projet de déménagement, le dialogue social est rompu. Aussi il redouble d’efforts pour convaincre les politiques. Comme lors d’un déjeuner organisé le 20 octobre par un cabinet de lobbying, où, invité par des parlementaires, il a défendu son projet.
Las ! Même au gouvernement, Frédéric Mitterrand en tête, assure qu’il « faut prendre un peu de temps » pour réfléchir à cette réforme. Lors de son audition devant la Commission des affaires culturelles de l’Assemblée, le 2 décembre dernier, Pierre Louette a estimé que le projet de loi serait débattu à l’Assemblée en avril prochain. En attendant, la situation de blocage ne fait qu’empirer, et la direction compte bien en tirer profit. Dernier exemple en date l’abandon du plan de départ volontaire annoncé vendredi dernier par la direction. Un bon moyen d’expliquer aux salariés que les syndicats, dans leur stratégie d’opposition systématique au projet de réforme, en oublie l’essentiel. Mais dans le même temps, la pétition pour la sauvegarde du statut compte aujourd’hui près de 20 500 signatures et le sujet de l’indépendance de l’agence doit rester une préoccupation majeure.
Lire ou relire dans Bakchich
L’article évoque bien la pétition intersyndicale, mais oublie de signaler qu’elle est ouverte à tous et qu’elle peut être signée en ligne.
Le site, accessible par lien ci-dessous, fournit d’ailleurs de nombreuses infos sur le combat pour l’AFP.
Cordialement, David Sharp (journaliste AFP, webmestre SOS-AFP)