Avant d’être élu président des Etats-Unis, Barack Obama était pour la levée de l’embargo contre Cuba. Maintenant il est contre.
La décision de Barack Obama de lever l’interdiction faite aux Américains issus de l’immigration cubaine de rendre visite à leurs familles dans l’île castriste et de leur envoyer de l’argent est certes une bonne chose. Mais la guerre économique contre la Havane n’est pas pour autant terminée.
L’embargo contre Cuba, qui dure depuis cinquante ans, a puni le peuple cubain mais n’a en rien desserré l’étau politique des frères Castro alors que c’est là même son but. Du coup, le manque d’envergure du geste d’Obama souligne les doutes que l’on peut nourrir sur son intention d’utiliser son niveau de popularité sans précédent dans l’histoire des Etats-Unis pour incarner le « changement » avec la politique du passé et son manque d’audace.
Il était une fois au cours de sa carrière politique où Obama défendait une politique cubaine radicalement différente de celle d’autres politiciens ayant une chance d’entrer à la Maison-Blanche. Pour lui, en 2004, il était temps « de mettre fin à l’embargo sur Cuba » et temps « d’admettre que cette politique a été un échec. »
Puis, quand il est apparu qu’il était sur le point de remporter la présidentielle en 2008, le futur président a retourné sa veste et adopté une ligne dure destinée à bassement influencer la mafia cubano-américaine implantée en Floride. En campagne en 2008 devant un congrès de la Cuban-American National Foundation, qui représente l’extrême droite cubaine aux Etats-Unis, il a ainsi déclaré : « Je maintiendrai l’embargo ».
Mais les Cubains-américains sont de moins en moins partisans de cette ligne dure. La vieille génération aisée de supporters du dictateur Fulgencio Batista, renversée par les Castro, est en voie d’extinction et la jeune génération est de plus en plus encline à reconnaître que l’embargo ne fait que punir le peuple cubain sans affecter le régime de la Havane.
Les sondages montrent en outre que la politique de Washington envers Cuba fait de moins en moins l’unanimité chez les électeurs américains.
Même les politiciens finissent par capter le message. Au début du mois d’avril, six membres du Congressional Black Caucus (le groupe parlementaire des membres du Congrès noirs) ont visité la Havane et ont appelé à la levée de l’embargo. D’influents membres du parti républicain en ont fait de même.
Ainsi, le sénateur Richard Lugar de l’Indiana, ancien Président de la Commission des Affaires Etrangères du Sénat et plus puissant membre républicain, a, le 2 avril, appelé à un changement total de politique envers Cuba.
Lugar a demandé à Obama de « revoir une politique qui n’a pas promu les droits de l’homme et la démocratie et qui sape nos intérêts sécuritaires et politiques dans l’hémisphère occidental. » Qui plus est, Lugar voulait qu’Obama nomme un envoyé spécial à la Havane pour entamer des négociations directes avec le régime castriste, et qu’il mette fin au refus de Washington à ce que Cuba intègre l’OAS (Organisation des Etats Américains), qui regroupe tous les gouvernements d’Amérique du Nord et du Sud.
Lors du « Sommet des Amériques » qui a rassemblé trente-quatre nations la semaine dernière, la chef d’Etat argentine, Christina Kirchner, a appelé dans un discours d’une fermeté inouïe le président américain à mettre un terme à l’embargo et à admettre Cuba comme membre de L’Organisation des Etats américains(OAS). Les signes de changement de politique de l’équipe Obama envers la Havane sont faibles au regard des injonctions des chefs d’Etat sud américains.
La photo de la poignée de main souriante entre Obama et le Vénézuélien Hugo Chavez à l’occasion de ce sommet a fait le tour du monde mais était d’apparence trompeuse. Le Los Angeles Times a même mis en ligne une vidéo de la télé vénézuélienne montrant une conversation entre les deux chefs d’Etat nettement moins aimable.
« Pas de sourires dans cette rencontre, » rapporte le quotidien californien. « Obama s’en va et est retenu par Chavez, puis le président américain domine la discussion et fait des gestes où il pointe son doigt à plusieurs reprises sur la poitrine de Chavez ». Un incident que le Los Angeles Times qualifie comme « bien moins amical » et qui « montre leur rencontre sous une lumière différente. »
Larry Summers, le tsar économique d’Obama, a déclaré à la presse que le moment de lever l’embargo est « bien loin ». Le maintien d’une ligne dure au sujet de l’embargo contre Cuba, à un moment où, comme jamais auparavant, les Etats-Unis sont appelés à changer de politique, montre qu’Obama et son gouvernement de centre-droite rechignent à un vrai revirement.
Les doutes sur le courage du président sont tels que même le New York Times, pourtant peu enclin à critiquer Obama, s’est vu contraint d’écrire dans un article important en date du 18 avril, qu’un Obama président « montre une tendance au compromis et à la prudence et même une volonté de capituler sur certains de ses programmes ». Et l’historien spécialiste des présidents américains, Robert Dallek, (centriste) de dire au Times, « Si Obama est trop timide, il aura l’air trop opportuniste. Il a fait tant de promesses pendant sa campagne présidentielle, il a parlé avec tant d’audace, il a réveillé tous nos espoirs, et maintenant il n’y donne pas de suite. » Le journal New-Yorkais reconnaît tardivement la timidité de Barack Obama au moment où celle-ci devient un vrai problème politique et électoral.
A lire ou relire sur Bakchich.info :
Bref, il n’y a que les médias français "classiques" pour continuer à fermer les yeux sur Mister Obama.
Bush avait un avantage non négligeable au milieu de tous ses énôôôrmes et non moins innombrables défauts : il assumait au grand jour ses décisions. Il les prenait à la lumière d’une idéologie politique identifiée et cohérente.
La politique de BO fait plus office de fourre-tout et semble n’être qu’un grand zigzag au grès des sondages et des pressions de différents lobbys (comme qui déjà ?). Cela risque donc de se terminer comme à chaque fois dans ces cas là en très grande déception.