Le Pentagone et l’OTAN ont déjà récolté des bénéfices importants de la guerre en Afghanistan. Pourquoi s’arrêter ?
Quand Barack Obama s’envolera pour le sommet de l’OTAN qui se tient au Portugal les 19 et 20 novembre, sa mission sera de rendre caduques ses promesses au peuple américain sur le retrait des « boys » d’Afghanistan à partir de juillet prochain, et de convaincre ses alliés d’y envoyer leurs propres militaires en plus grand nombre. Le vrai retrait n’interviendra pas avant 2014 au plus tôt.
Le signal de ce changement a été donné lors d’une conférence en Australie la semaine dernière par Hillary Clinton, le Secrétaire à la Défense Robert Gates, et par le chef de l’état-major, l’amiral Mike Mullen, comme l’a raconté le New York Times le 10 novembre. Et comme l’a remarqué le Times, la nouvelle échéance représente « une victoire des militaires » sur l’administration d’Obama. Le Times était même en retard d’un train, puisque la chaîne de journaux McClatchy avait déjà rapporté ce changement de cap quatre jours plus tôt.
Même son de cloche au Royaume-Uni, le plus proche allié de Washington : le ministre des Affaires étrangères a déclaré au Parlement que « les combattants britanniques quitteront l’Afghanistan en 2015, date de la prochaine élection » selon le Guardian du 15 novembre.
Les présidents mentent par tradition au peuple américain lorsqu’ils affirment qu’une guerre ne durera pas et qu’elle ne coûtera pas beaucoup plus.
Nixon a prétendu en 1968 qu’il disposait d’un « plan secret » pour mettre fin à la guerre au Vietnam (elle a continué six ans de plus). Bill Clinton a promis que des soldats américains resteraient en Bosnie pendant seulement 12 mois (neuf ans en réalité). George W. Bush et ses conseillers ont déclaré que l’occupation de l’Irak serait brève et autofinancée (l’Amérique y est toujours, et la guerre et l’occupation ont coûté plus de 3000 milliards de dollars.)
Maintenant c’est au tour d’Obama, qui a menti en justifiant une hausse massive du nombre de soldats en Afghanistan qui était censée n’être que temporaire. A Lisbonne, il formalisera devant l’OTAN un nouveau calendrier qui prolongera cette guerre débutée voici dix ans, soit la plus longue de l’histoire américaine !
Le sommet de Lisbonne verra aussi la naissance formelle de ce qu’on peut appeler l’OTAN globale. Le Pentagone et l’OTAN ont déjà récolté des bénéfices importants de cette guerre en Afghanistan qu’ils rechignent à cesser. Ils ont infiltré leurs militaires au centre de l’Eurasie pour longtemps. Ils ont construit un réseau d’installations et de partenariats militaires : de la première base multinationale pour ponts aériens en Hongrie, jusqu’à la base de transit au Kirghizstan où passent chaque mois au moins 50.000 soldats. Sans oublier la subordination des forces militaires de dizaines de pays en Europe et en Asie.
Quelles que soient les formules lénifiantes qu’Obama prononcera à Lisbonne, la réalité est que la guerre en Afghanistan est devenue une guerre sans fin. Ce n’est pas sans raison qu’on surnomme ce pays meurtri « le cimetière d’Empires ».
Et Barack Obama apparaîtra au grand jour comme le prisonnier de ses généraux.
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